Des élus qui représentent les 82 villes du Grand Montréal demandent à Québec des investissements « massifs » et « urgents » pour permettre la construction d’au moins 3000 logements sociaux par année dans la région.

« Le gouvernement nous a donné des signaux encourageants lors du dernier mini-budget, mais les besoins exigent des investissements massifs », a fait valoir la mairesse Valérie Plante, qui est aussi présidente de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM), dans une déclaration publiée jeudi après-midi.

Québec a annoncé à la fin de novembre des sommes qui permettront de financer la construction d’environ 450 logements « sociaux et abordables » par année à l’échelle de la province d’ici cinq ans. Or, il en faudrait 3000 par an seulement pour le Grand Montréal, estime la CMM.

La Presse a révélé jeudi matin de nouvelles données sur l’ampleur du sous-financement qui touche le logement social dans la métropole. Bâtir son quartier, un promoteur de logement communautaire, a sur sa planche à dessin 16 projets très avancés totalisant 1467 logements abordables, qui sont « ralentis ou bloqués » en raison du manque de financement, apprenait-on. Cette entreprise d’économie sociale compte 10 autres projets regroupant 928 logements qui peinent eux aussi à obtenir des fonds.

Le sous-financement touche aussi des promoteurs privés comme Prével, TGTA et Atelier Chaloub, qui ont essayé d’intégrer plus de 300 logements sociaux à des complexes immobiliers depuis deux ans à Montréal. Ils ont dû abandonner cette idée, en raison du manque de fonds du programme AccèsLogis, financé par Québec.

Ces révélations de La Presse ont soulevé de nombreuses réactions. Le député néo-démocrate Alexandre Boulerice a entre autres dénoncé sur Twitter une situation qui n’a « aucun bon sens ».

Les groupes de défense des locataires ont eux aussi exprimé leur indignation. « Le gouvernement du Québec devrait avoir honte d’abandonner le logement social alors qu’une sévère crise du logement sévit partout dans la province », a déploré le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec.

Incertitude

La sortie de la CMM survient alors qu’un certain flou plane sur le financement du logement social dans la province. Québec a annoncé de nouvelles sommes il y a quelques semaines, mais c’est seulement au retour des Fêtes que les modalités d’application seront connues. Beaucoup craignent que le programme AccèsLogis ne soit abandonné, ce qui pourrait pénaliser les ménages les plus démunis si une distinction nette n’était pas établie entre logement « social » et logement « abordable ».

« Quels vont en être les paramètres, quels engagements devront être pris par le secteur privé ? On ne le sait pas », a dit en entrevue Alain Marcoux, président de l’Association des groupes de ressources techniques (GRT) du Québec.

Dans AccèsLogis, il y avait des paramètres clairs permettant aux clientèles très démunies de ne pas payer plus que 25 % de leur revenu en loyer.

Alain Marcoux, président de l’Association des groupes de ressources techniques (GRT) du Québec

Les 25 GRT membres de cette association ont dans leurs cartons des plans, souvent très avancés, qui permettraient de construire 10 000 logements sociaux à l’échelle de la province, dit M. Marcoux. Or, seule une fraction est assurée d’aller de l’avant, en raison du manque de financement.

Dans sa déclaration publiée jeudi, la CMM formule une série de demandes au gouvernement provincial. Elle requiert des fonds pour permettre de construire « le plus rapidement possible » les 2500 logements sociaux déjà « programmés », mais non financés, par AccèsLogis.

La CMM souhaite aussi que le financement gouvernemental du logement social soit prévu sur une période de 10 ans, plutôt qu’annuellement.

Dans une déclaration transmise à La Presse mercredi, la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation, Andrée Laforest, a indiqué que son nouveau programme, qui sera dévoilé début 2022, visait à « augmenter l’offre de logements abordables dans toutes les régions » et en « accélérer le rythme de livraison ».