Fraîchement arrivée à la tête de la Banque de développement du Canada (BDC), Isabelle Hudon a l’intention de renforcer les efforts ESG de l’institution. Cette démarche n’ira toutefois pas jusqu’à l’exclusion du secteur gazier et pétrolier de son portefeuille.

« Comparativement à d’autres organisations qui ont dû annoncer le désinvestissement, on n’est pas du tout là, répond-elle en entrevue en marge d’une allocution devant le Conseil des relations internationales de Montréal (CORIM). On se pose plutôt la question comment on équipe nos PME, comment on intensifie notre présence dans les technologies propres. »

Le secteur pétrolier et gazier ne représente qu’une « infime » partie des interventions de la BDC, ajoute sa présidente et cheffe de la direction. Seulement 1 % du portefeuille y est exposé. « Ce n’est pas comme si on avait un portefeuille extrêmement investi dans ce secteur-là. On reconnaît comme institution fédérale qu’on a un rôle à jouer pour appuyer ces entreprises dans leur transition. »

Elle a souligné que la BDC était très active dans les technologies propres. Au cours des cinq dernières années, elle y a investi 1,2 milliard au Canada.

Nouvelles orientations

Arrivée en poste au mois d’août dernier, Mme Hudon travaille sur les nouvelles orientations stratégiques de la BDC qu’elle entend dévoiler en 2022. Si elle n’a pas voulu trop s’avancer sur le plan à venir par « respect pour son conseil d’administration », l’impact économique et social de l’institution fédérale, la diversité et l’aide à la transformation numérique en seront vraisemblablement des pierres angulaires.

L’augmentation du nombre de clients (72 000 actuellement) fait partie des réflexions en cours. « Je n’ai pas commencé par le nombre de clients qu’il faut servir, nuance-t-elle. Si on fait un calcul rapide, pour avoir plus d’impact dans l’économie, il faut probablement toucher à plus d’entreprises et plus d’entrepreneurs. »

Lors d’un échange sur scène avec Françoise Bertrand, présidente du conseil de VIA Rail Canada, Mme Hudon a dit que la BDC devait être plus présente auprès des communautés dans l’angle mort des grandes institutions financières, notamment les communautés noires et les autochtones.

« Il faut développer ces entrepreneurs pour que les institutions financières s’intéressent à leurs entreprises. C’est là où je pense que nous devons avoir un rôle de premier plan. »

Hausse des taux d’intérêt

Comme n’importe quelle institution financière, la BDC devra s’ajuster à une éventuelle hausse des taux d’intérêt. « On s’adapte à la hausse des taux d’intérêt, répond Mme Hudon en entrevue. On est comme les autres institutions financières. Lorsque les taux d’intérêt augmentent, on s’ajuste aussi. On n’a pas de taux fixes. On doit respecter les mêmes règles que les autres institutions financières. »

L’équipe de la BDC surveille de près l’évolution des taux d’intérêt. Une hausse trop brusque aurait inévitablement un effet sur le coût du capital qu’elle prête aux entreprises. Un tel scénario viendrait freiner la croissance économique, prévient-elle.

« D’après moi, il n’y a qu’un seul sens vers lequel les taux peuvent bouger, ça ne peut pas vraiment aller plus bas, explique-t-elle. Il va falloir qu’elle [la hausse] soit minime et surtout qu’elle ne se fasse pas d’un coup. »

Dans un contexte de hausse des taux d’intérêt, la BDC pourrait effectuer plus de partenariats avec les institutions financières pour assurer une part du risque des petites entreprises. L’institution l’a fait durant la pandémie et « ça a très bien été », note la dirigeante.

Ambassadrice du Canada en France avant sa nomination à la BDC, Mme Hudon faisait son discours quelques heures avant de recevoir la Légion d’honneur de la France, au grade de commandeur, lors d’une cérémonie officielle à Ottawa.