Quelques heures à peine après le vote, le résultat du référendum du Maine est déjà devant les tribunaux. Le partenaire américain d’Hydro-Québec a demandé mercredi à la Cour supérieure du Maine d’invalider le résultat de l’initiative citoyenne, qu’il juge illégale et inconstitutionnelle.

New England Clean Energy Connect et Avangrid, la société mère de Central Maine Power, réclament aussi une injonction pour permettre aux travaux de construction de la ligne de transport de se poursuivre le temps que le débat se fasse devant les tribunaux.

CONSULTEZ le libellé de l’injonction (en anglais)

Mardi, les citoyens du Maine ont voté majoritairement pour interdire rétroactivement le projet d’interconnexion qui doit permettre à l’énergie d’Hydro-Québec d’alimenter le Massachusetts pendant 20 ans, un contrat d’une valeur de 10 milliards pour la société d’État québécoise.

Hydro-Québec et son partenaire américain estiment qu’ils sont en terrain solide pour obtenir gain de cause devant les tribunaux. La présidente-directrice générale d’Hydro-Québec, Sophie Brochu, estime que donner suite au résultat du référendum reviendrait à changer les règles du jeu après le match.

« C’est comme si on voulait changer le score d’une partie de hockey alors que la joute est terminée, que le monde est sorti du stade et [qu’on décide de] rajouter une période », a-t-elle commenté à Radio-Canada. Elle a affirmé que le projet se réalisera.

La ligne de transport est en construction depuis un an, après avoir obtenu tous les permis et toutes les autorisations requis des instances de l’État du Maine et du gouvernement fédéral, a réitéré Lynn St-Laurent, porte-parole de la société d’État.

Un plan B ?

De Glasgow, en Écosse, où il participe à la COP26, le premier ministre François Legault a laissé entendre que le Québec avait un plan B pour concrétiser le contrat d’exportation d’électricité vers le Massachusetts.

Il y a différents chemins qu’on peut prendre pour se rendre au Massachusetts et différents moyens aussi. On sait que le gouvernement fédéral américain appuie le projet, mais je ne peux malheureusement pas aller plus loin ce matin.

François Legault

Avec un autre partenaire américain, Hydro-Québec veut construire la ligne Champlain Hudson Power Express pour vendre de l’électricité à long terme à la ville de New York. Ce projet d’interconnexion, qui a tous les permis requis, pourrait-il être modifié de façon à permettre aussi la desserte du Massachusetts, sans passer par le Maine ?

Ce n’est pas envisagé, selon Hydro-Québec. Pour le moment, la contestation judiciaire est la seule avenue possible, a indiqué mercredi la société d’État.

Les travaux de construction de la ligne dont le coût de construction est estimé à 1 milliard se poursuivent normalement. Quelque 400 millions US ont déjà été dépensés par le promoteur depuis le début des travaux.

Mercredi, les opposants au projet, qui ont remporté le vote référendaire avec 59 % des voix, ont réclamé la fin des travaux, la suspension des permis accordés et la restauration des terrains déjà déboisés. Un recours devant les tribunaux est envisagé.

En principe, les résultats du référendum de mardi doivent être certifiés par l’État et avoir ensuite force de loi, ce qui devrait arriver au début de l’année 2022.

Ce nouveau détour devant les tribunaux retardera un projet déjà en retard sur son échéancier. Hydro-Québec et son partenaire prévoyaient que la ligne de transport serait en exploitation à la fin de 2022 et que les premières livraisons du contrat avec le Massachusetts commenceraient au début de 2023.

Avec la collaboration d’Hugo Pilon-Larose, La Presse, à Glasgow

Chronologie

Le processus d’autorisation du projet d’interconnexion a duré 33 mois. Voici la chronologie des permis obtenus.

  • Mai 2019 : Commission des services publics du Maine
  • Juin 2019 : département des Services publics du Massachusetts
  • Janvier 2020 : Commission de l’aménagement du territoire du Maine
  • Mai 2020 : département de l’Aménagement du territoire du Maine
  • Novembre 2020 : Corps des ingénieurs de l’armée
  • Janvier 2021 : département de l’Énergie des États-Unis (permis présidentiel)