(Montréal) Le Fonds de solidarité FTQ va investir 75 millions dans la mine du Lac Bloom. Le propriétaire de la mine avait reçu un avis défavorable de la part du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) quant à son plan de gestion des déchets miniers, en février dernier.

Le prêt non garanti d’un montant maximal de 75 millions à Minerai de fer Québec (MFQ), une filiale de Champion Iron, servira de source de financement à un projet d’expansion qui permettra à la minière de doubler sa capacité de production annuelle à 15 millions de tonnes, dans la mine située à 13 kilomètres de Fermont.

Le projet revêt une grande importance pour l’économie de la Côte-Nord, affirme Dany Pelletier, premier vice-président aux investissements du Fonds de solidarité FTQ, dans un communiqué. « Il permettra de créer plus de 400 emplois permanents de qualité et de générer un impact positif sur la région pour des années à venir », commente-t-il.

Le Fonds FTQ et MFQ ont souligné que les activités de la mine permettraient également de réduire les émissions de gaz à effet de serre dans l’industrie sidérurgique.

Gestion des déchets

Le projet d’expansion, qui dispose de toutes les autorisations réglementaires pour aller de l’avant, sera suivi d’un autre projet lié à la gestion des déchets produits par la mine. MFQ tente d’obtenir un permis pour agrandir son parc de stockage de résidus miniers et stériles afin d’augmenter sa production. Son projet initial aurait eu pour conséquence de détruire 151 hectares de lacs et de cours d’eau, dont un lac de 88 hectares. Le rapport du BAPE publié en février conclut que MFQ a écarté des solutions de rechange qui auraient moins d’impacts écologiques. Il recommande au gouvernement Legault que la construction du parc de stockage ne soit pas approuvée tel que présenté.

À la lumière du rapport, Ugo Lapointe, porte-parole de la Coalition pour que le Québec ait meilleure mine, espère que l’investissement du fonds de travailleurs est conditionnel au respect des recommandations du BAPE. « Il est temps que les investisseurs mettent leur lunette sociale et environnementale lorsqu’ils font des investissements et exigent certaines conditions. Le minimum qu’on peut attendre, c’est qu’on exige les meilleures pratiques environnementales et sociales. »

Au Fonds de solidarité FTQ, on répond que le développement durable est une « préoccupation constante ». On considère que le projet d’expansion et le projet d’agrandissement du parc de stockage sont deux dossiers séparés. « Le bilan passé de MFQ est positif, réagit Patrick McQuilken, porte-parole du fonds. Elle suit le cours normal des approbations gouvernementales. »

M. Lapointe assure être en faveur du projet d’expansion. Il estime que MFQ peut mieux gérer ses déchets en les remettant dans la fosse plutôt que de les décharger dans des lacs. Une recommandation appuyée par le BAPE. Une telle solution réduirait les bénéfices d’exploitation de la mine du Lac Bloom de 5 % à 10 %, estime le porte-parole de la coalition. « C’est le prix à payer pour protéger les lacs au Québec. Faut mettre cette balise-là. Ce n’est pas utopique. C’est réalisable. »

En février, MDF avait affirmé que l’idée de remblayer la fosse pourrait faire perdre des occasions futures d’exploitation. En entrevue, Michael Marcotte, vice-président des relations avec les investisseurs, ne veut pas commenter le projet de parc d’extension avant la décision gouvernementale.

Il souligne que les activités de la mine du Lac Bloom permettent de réduire les émissions de gaz à effet de serre grâce au minerai de fer du Québec « qui a l’une des meilleures teneurs sur la planète ». Un minerai de bonne qualité est nécessaire au processus de décontamination de l’acier recyclé, explique-t-il. « Si les gens veulent qu’on commence à recycler de l’acier au lieu de remplir de grands parcs avec de vieilles automobiles et de vieux lave-vaisselle, il faut la contribution d’un endroit comme le Québec. »

Le verdict de Québec

Le projet d’agrandissement du parc de stockage attend encore l’approbation de Québec. Aux dernières nouvelles, le ministre de l’Environnement, Benoit Charrette, doit faire une recommandation au conseil des ministres au cours de l’automne 2021 avant que le gouvernement fasse connaître sa décision. Il n’a pas été possible d’avoir une réaction immédiate de la part du ministère.

Par le passé, la mine du Lac Bloom a joui du soutien du gouvernement Legault. En décembre, il a accordé un soutien financier de 120 millions à la Société ferroviaire et portuaire de Pointe-Noire, à proximité de Sept-Îles. La mine du Lac Bloom devrait être un client important du transporteur. Investissement Québec est le deuxième plus gros actionnaire de Champion Iron, la maison-mère de MDF, avec 8,59 % des titres en circulation, selon Refinitiv. La Caisse de dépôt et placement du Québec arrive au neuvième rang avec 1,13 % des actions en circulation.

Québec doit envoyer le message que les lacs ne doivent pas « servir de poubelles pour les déchets miniers », plaide M. Lapointe. Il craint que l’approbation de la proposition initiale du propriétaire de la mine du Lac Bloom ne serve de précédent et amène d’autres mines à détruire des lacs. À long terme, cela pourrait jouer contre l’économie du Québec tandis que les fabricants de voitures électriques, de panneaux solaires et d’éoliennes cherchent un approvisionnement éthique en métaux, selon lui.