Les trois quarts des entrepreneurs noirs au Canada voient leurs chances de succès minées par le racisme systémique. La couleur de leur peau, la difficulté d’accéder au capital et l’absence d’un réseau d’affaires sont les principaux obstacles à la croissance et à la pérennité de leur entreprise.

C’est le constat d’un sondage réalisé à la demande du Groupe canado-africain du Sénat et du sénateur Colin Deacon, en collaboration avec 12 organisations dirigées par des membres de la communauté noire, dont les résultats ont été publiés jeudi.

Pilotée par la firme Abacus Data, l’enquête a été menée ce printemps auprès de 342 entrepreneurs noirs répartis d’un océan à l’autre, mais concentrés au Québec et en Ontario. Notons que 54 % des répondants étaient des femmes. La moitié des entrepreneurs ont déclaré des revenus de moins de 50 000 $ en 2019. « Le niveau de racisme perçu dans les activités quotidiennes est un élément caractéristique du vécu des entrepreneurs noirs du Canada », constate le rapport.

Impact majeur du racisme systémique

En effet, 76 % des entrepreneurs ont acquiescé à l’affirmation suivante  : « Il est plus difficile pour moi de réussir en tant qu’entrepreneur à cause de ma race. » Leur expérience en fait foi : plus de la moitié des entrepreneurs disent avoir fait face à un client qui a refusé de faire affaire avec eux parce qu’ils étaient noirs.

Difficile accès au capital

L’accès au capital est la principale difficulté des entrepreneurs, ont signalé les répondants. À peine 15 % des entrepreneurs noirs ont obtenu un emprunt ou une marge de crédit pour se lancer en affaires. Ces difficultés perdurent : les trois quarts déclarent qu’ils auraient de la difficulté à obtenir 10 000 $ pour soutenir leur croissance.

Confiance érodée envers les institutions financières

Près de la moitié (45 %) des répondants se seraient vu refuser un prêt d’une institution financière en raison de la couleur de leur peau plutôt que celle de leur bilan. Un sur trois soutient qu’une organisation gouvernementale a décliné sa demande de subvention ou de financement parce qu’il est noir. Par conséquent, seulement 19 % des entrepreneurs noirs disent faire confiance aux banques pour agir dans leur intérêt et celui de leur communauté.

Absence de réseaux d’affaires

Les réseaux d’affaires et l’accompagnement par des professionnels ou des mentors sont des facteurs essentiels de réussite entrepreneuriale. Pourtant, 55 % des entrepreneurs noirs ignorent où trouver du soutien et des conseils en cas de difficulté. Malgré ces obstacles, ils ne perdent pas courage : 87 % se disent très ou assez optimistes à l’égard de l’avenir de leur entreprise.

Un effort de toute la société

« Le rapport fait état de chiffres inquiétants qui témoignent d’une exclusion économique de la communauté noire au Canada », indique Tiffany Callender, présidente de la Fédération africaine canadienne de l’économie. « Les chiffres racontent l’histoire des entrepreneurs noirs au Canada. »

À l’heure de la relance économique, il est essentiel que la communauté entrepreneuriale noire puisse donner son plein rendement, fait-elle valoir : « Il s’agit d’un effort commun. Nous devons tous – la société civile, le gouvernement, les institutions financières, les groupes d’intérêts – travailler ensemble pour enlever ces barrières. »

Chacun peut y jouer un rôle, plaide-t-elle : « Comme consommateurs, on peut contribuer à leur développement. »