Replacez-vous en 2017.

Le mouvement #metoo vient à peine de commencer. George Floyd est encore en vie. Greta Thunberg n’est pas encore un nom connu de tous. Et deux hommes d’affaires montréalais qui ont déjà fait leurs preuves dans le monde du stylisme, en créant une marque, Want Les Essentiels, vendue partout dans le monde, et qui se sont retirés de l’entreprise reprise par leurs anciens associés, s’assoient et cherchent ensemble une nouvelle idée pour leur prochaine aventure.

On va faire quoi maintenant ? se disent ces jumeaux montréalais ayant grandi à Ottawa et dont les parents sont d’origine jamaïcaine, qui ont déjà taillé leur place depuis 20 ans dans les listes des grands magazines de mode et d’affaires recensant les personnalités les plus influentes avec leurs sacs, leurs chaussures et leur œil impeccables.

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Byron et Dexter Peart, fondateurs de Goodee

Mais leur nouvelle idée était déjà claire, m’expliquent-ils en entrevue : ils vont se relancer en affaires, avec un nouveau concept axé non plus sur la mode, mais sur la maison. Une entreprise éthique qui met en valeur les artisans du monde entier, peu importe leurs origines ethniques. Qui va donner une chance à tous ceux qui ont du talent et mettre de côté les normes occidentales de ce qu’est le design. Et on va faire ça, se disent-ils, avec un souci humain, mais aussi environnemental. Les produits offerts seront écolos et seront équitables.

Et ce nouvel univers pour la maison, pour nos cocons, se passera en ligne.

Puis arrive la pandémie.

Et Black Lives Matter.

Et toutes les remises en question de l’ordre établi attendues depuis longtemps.

Devinez la suite.

La suite, c’est que Goodee, la marque des frères Byron et Dexter Peart, avait sans qu’ils le sachent complètement au départ – car qui aurait prédit la fin des sorties et le début de notre enfermement domestique ? – mis le doigt sur l’esprit du temps.

Et qu’elle cartonne.

On veut du vert, on veut du juste et on en veut dans nos nids à la maison, parce que la vie s’est tournée vers l’intérieur. On veut tout ça en ligne. Et on veut savoir qui sont ces gens qui fabriquent les objets qu’on achète. « On est au cœur d’un moment culturel », résume Dexter Peart.

Pas étonnant que le magazine américain Fast Company ait choisi Goodee pour sa liste d’entreprises les plus innovantes en 2021, dans la catégorie « style », aux côtés de Gucci, Hermès et Lululemon.

Lancée en 2019, l’entreprise certifiée B Corp affiche des chiffres de croissance entre 30 % et 50 % chaque trimestre.

Que la chaîne de grands magasins Nordstrom ait conclu une entente pour vendre « 100 produits à moins de 100 $ » dans cinq boutiques Goodee à l’intérieur de leurs grands espaces n’a pas nui à leur notoriété. Environ 80 % des revenus de vente viennent des États-Unis, surtout de Los Angeles et de New York, même si Montréal « est dans une solide troisième place ».

Et que trouve-t-on dans ces boutiques et en ligne, chez goodeeworld.com ?

Des meubles, des paniers, des lampes, des balais, des couvertures, des savons… De tout pour la maison. Et chaque objet est étiqueté de façon claire pour justifier sa présence sur la liste, outre le fait que l’objet ait été choisi pour son caractère esthétique, par l’œil aguerri et sans faille des frères Peart.

  • Que trouve-t-on dans ces boutiques et en ligne, chez goodeeworld.com ? Des meubles, des paniers, des lampes, des balais, des couvertures, des savons…

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    Que trouve-t-on dans ces boutiques et en ligne, chez goodeeworld.com ? Des meubles, des paniers, des lampes, des balais, des couvertures, des savons…

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Vous aimez les paniers à vélo multicolores du Ghana ? Ils ont été sélectionnés notamment parce que l’entreprise est engagée au sein de sa communauté, en plus d’utiliser des matériaux naturels, de faire travailler des gens marginalisés et de mettre en valeur des savoirs traditionnels. Et les chaises de la société belge ecoBirdy ? Elles sont faites à partir de plastique de jouets d’enfants recyclés, refondus pour en faire de jolis meubles pour enfants.

Matériaux naturels et matériaux recyclés entrent autant dans la fabrication de bougies que de cahiers de notes, de ciseaux ou de savons.

Cette année, l’entreprise publiera un rapport d’impact pour faire le suivi sur les effets de son engagement auprès de tous les artisans avec qui elle travaille dans le monde. « On travaille déjà avec des professionnels pour mettre en place notre méthodologie pour mesurer tout ça », dit Byron Peart.

Et sachez que si vous aimez les kangourous Goodee, en coton, ils sont fabriqués avec du coton égyptien, pas chinois. Et que certains des produits sont montréalais, comme les jouets de Raplapla vendus sur la plateforme.

L’entreprise est-elle déjà profitable ? « On grandit vite et ça prend du capital », répond Dexter Peart.

La Banque de développement du Canada les soutient financièrement, tout comme Good and Well, un fonds d’investissement voué à encourager des entreprises responsables, durables, éthiques, ainsi que Marigold Capital. En outre, les propriétaires du géant de la vente en ligne Farfetch ont investi, expliquent les frères, tout comme l’homme d’affaires montréalais Stephen Bronfman, tout comme Joe Mimran, celui qui a lancé Joe Fresh et Club Monaco. À l’automne dernier, les cofondateurs de Goodee, avec l’aide de BDC Capital, ont ainsi réussi à conclure une deuxième ronde d’investissements avec 2 millions dans leurs tiroirs pour aider leur projet à croître.

« On est 10 fois plus gros, on est rendu une entreprise qui brasse des millions seulement à notre deuxième année, on grandit très vite », résume Byron.

« On est des leaders dans notre secteur… Et les architectes nous appellent. »

Donc le changement prend racine. Ce ne sont pas uniquement les jeunes femmes milléniales – leurs principales clientes – qui achètent les produits, mais aussi de plus en plus les professionnels qui réalisent que l’inclusion d’artisans et de designers de toutes origines et de tous profils ajoute une nouvelle richesse à l’offre d’objets pour la maison, les bureaux, les intérieurs. Plus de 50 % des entreprises avec lesquelles les frères travaillent comptent des femmes propriétaires, et plus de 45 % sont dirigées par des gens autres que blancs.

Quand George Floyd a été assassiné par un policier et que les Américains ont commencé à manifester leur exaspération, j’avais parlé aux frères Peart, qui m’avaient confié deux choses. D’abord qu’ils étaient soulagés de voir la population de toutes origines se révolter contre de telles injustices. Mais aussi qu’ils avaient des doutes sur la profondeur des changements sociaux que cela pourrait apporter.

La semaine dernière, quand je les ai appelés pour parler de Goodee, ils m’ont confié qu’un an plus tard, leur optimisme était pas mal plus grand.

« On dirait que ça pourrait être durable, tout ça », m’a confié Dexter.

« Je pense, ajoute Byron, qu’il y a un réel changement. »