À un mois de la fin de la trêve conclue l’été dernier entre les débardeurs du port de Montréal et leurs employeurs, l’impasse dans les négociations inquiète l’Administration portuaire de Montréal et les industries qui utilisent ses services.

Après sept jours de négociations, les médiateurs du gouvernement fédéral ont annoncé vendredi dernier qu’ils suspendaient les négociations entre le Syndicat des débardeurs du port de Montréal et l’Association des employeurs maritimes. L’équipe de médiateurs considère que les deux parties sont encore trop éloignées dans leurs demandes pour en arriver à une entente.

« Ce n’est pas des bons signaux », réagit Sophie Roux, vice-présidente de l’Administration portuaire de Montréal (APM), au bout du fil. « Ça crée un climat d’incertitude quant à la fiabilité des opérations du port. »

Selon Mme Roux, plusieurs entreprises québécoises et ontariennes comme Olymel, Produits forestiers Résolu, la Société des alcools du Québec et Dollarama ont déjà commencé à utiliser de nouveaux itinéraires pour importer ou exporter leurs marchandises par conteneurs, appréhendant la possibilité d’une nouvelle grève à l’expiration de la trêve, le 21 mars prochain.

« Les impacts de l’été dernier ont commencé avec les arrêts de travail, mais vu que les [entreprises qui utilisent les services du port de Montréal] ont eu cette mauvaise expérience, elles ont la possibilité d’être proactives pour assurer la continuité de leurs échanges commerciaux », explique Sophie Roux.

« On a appris »

« On a appris du conflit de l’été dernier, affirme Richard Vigneault, responsable des communications corporatives chez Olymel. On a un plan de contingence qui pourrait nous amener à transiter par d’autres ports de l’Atlantique. »

À l’Association du camionnage du Québec (ACQ), les membres craignent de vivre une nouvelle grève des débardeurs qui entraînerait d’importants délais de livraison et perturberait les chaînes d’approvisionnement.

On est tous affaiblis économiquement en ce moment. Ça a pris trois mois pour se sortir de la dernière grève, avec des frais d’exploitation qui ont explosé.

Marc Cadieux, PDG de l’ACQ

Si une deuxième grève devait se déclencher, Marc Cadieux craint les effets à plus long terme sur le port de Montréal. « Ce deuxième coup-là aurait de très graves conséquences sur l’avenir du port de Montréal, déplore-t-il. Les armateurs qui devront aller ailleurs, je ne suis pas sûr qu’ils vont revenir si vite. »

L’APM appelle les parties intéressées et le gouvernement fédéral à « ne ménager aucun effort » pour en arriver à une entente négociée. « Il reste encore du temps et on veut tout faire pour éviter tout ce qu’on a déjà vécu l’été dernier », ajoute Mme Rioux.

L’APM gère les installations du port de Montréal, mais elle n’emploie pas les débardeurs, qui travaillent pour des entreprises privées. Elle n’est donc pas impliquée directement dans les négociations.

À Ottawa, la ministre du Travail, Filomena Tassi, a demandé aux médiateurs qui ont quitté la table de négociation de « rester en contact étroit avec les parties », peut-on lire dans un communiqué publié mercredi.

Nous encourageons les deux parties à déployer immédiatement les efforts nécessaires pour parvenir à un accord.

Filomena Tassi, ministre du Travail

« Nous évaluons présentement toutes nos options et nous demeurons prêts et disponibles pour négocier », a réagi l’Association des employeurs maritimes (AEM), qui représente la partie patronale, dans un communiqué mardi soir.

Le Syndicat des débardeurs du port de Montréal n’a pas rappelé La Presse, mercredi.

La grève des 1125 débardeurs du port de Montréal a été déclenchée le 10 août dernier et a duré 12 jours. Le 23 août, le syndicat et l’AEM ont décrété une trêve de sept mois sans moyens de pression pour négocier une nouvelle convention collective. Les débardeurs sont sans convention collective depuis 2018.