Trois mois après son lancement, l’Initiative BlackNorth (IBN) compte déjà plus de 350 entreprises partout au Canada qui ont promis d’agir pour faire accéder les Noirs aux entreprises et aux conseils d’administration et briser les barrières auxquelles ils se butent. « Elles sont prêtes pour ce défi, estime Dahabo Ahmed Omer, directrice exécutive de l’IBN. Si on peut le faire pour les femmes, on peut le faire pour les Noirs. Il faut trouver des moyens d’améliorer leur qualité de vie au Canada. Trop longtemps, on a fait l’autruche en se disant que ça ne se passait que chez nos voisins américains. »

Au Québec, le mouvement créé par Wes Hall, homme d’affaires de Toronto et fondateur de Kingsdale Advisors, a séduit jusqu’ici une trentaine d’entreprises. Parmi celles-ci, on note Desjardins, BMO, Gowling, CAE, Air Canada, Lightspeed, Telus et Molson Coors. « Chaque jour, je reçois des courriels d’entreprises qui veulent se joindre à BlackNorth, affirme Dahabo Ahmed Omer. J’espère qu’on va pouvoir faire tomber les barrières ensemble. »

PHOTO FOURNIE PAR BLACK NORTH INITIATIVE

Le fondateur du mouvement, Wes Hall

Le 27 août dernier, on pouvait lire ce qui suit sur le site de la firme d’avocats Fasken, signataire elle aussi du pacte BlackNorth : « Nous continuerons de collaborer avec l’IBN, l’Association des avocats noirs du Canada et d’autres intervenants au sein de la profession juridique pour faire tomber les barrières lorsqu’il est question de recrutement, de rétention et d’avancement des personnes noires au sein de nos cabinets. Ensemble, nous sommes plus forts. »

Établie à Ottawa, Mme Ahmed Omer a elle-même rejoint l’IBN il y a un mois. En compagnie de 150 bénévoles, la seule salariée de l’organisme bûche jusqu’à 60 heures par semaine pour mener à bien cette mission. « Quand j’étais jeune, mon père me répétait : l’éclair ne fait jamais de bruit jusqu’à ce qu’il frappe, relate la Somalienne qui a émigré au Canada à 9 ans. Je ne comprenais pas. Je me suis rendu compte plus tard que j’aurais l’occasion de faire bien des choses, mais qu’il était avant tout important d’avoir un impact. »

Alors que se tient un deuxième Sommet de l’Initiative BlackNorth, au Québec cette fois, où prendront la parole notamment Macky Tall, de la Caisse de dépôt et placement du Québec, Louis Vachon, de la Banque Nationale, Geneviève Mottard, de l’Ordre des CPA du Québec, Frantz Saintellemy, de Leddartech et Michael Denham, de la BDC, Dahabo Ahmed Omer n’a pas ralenti la cadence.

Il y a vraiment une énergie. Je dors moins, j’oublie de manger, mais je vois qu’on a une occasion qu’on n’a jamais eue. Cette fatigue en vaut la peine. Les gens commencent à réfléchir au problème. On a des conversations franches.

Dahabo Ahmed Omer, directrice exécutive de l’IBN

Le leadership terre à terre et posé de Wes Hall, né en Jamaïque et père de cinq enfants, la motive. « C’est un bon leader, estime-t-elle. Il travaille très fort et dort peu. Il est présent et nous aide chaque jour. »

Impliquer les entreprises pour changer les choses, parler leur langage, avec des mots, mais aussi des chiffres, voilà ce qu’il faut faire, au dire de Wes Hall. « On est en 2020, passons à autre chose ! a lancé l’homme d’affaires lors d’une récente entrevue avec le Financial Post. Les problèmes n’ont pas besoin d’être éternels. »

« Chaque jour, les entreprises font face à plusieurs problèmes et savent quoi faire pour les régler, ajoute Dahabo Ahmed Omer. On sait que la communauté noire souffre et se heurte à des barrières. Les entreprises savent trouver des solutions. Comment se fait-il qu’elles n’en aient pas encore pour ce problème ? »

Le Sommet québécois virtuel de l’Initiative BlackNorth a lieu ce mercredi, alors que le sentiment d’injustice est encore à vif, à la suite des meurtres des Américains George Floyd et Breonna Taylor, notamment. L’IBN en profite pour ouvrir, élargir et maintenir un dialogue à long terme, épauler les entreprises pour trouver des solutions et les appliquer. « Je pense au taux de chômage des femmes noires au Canada qui est de 11 % en moyenne, souligne Dahabo Ahmed Omer. Le problème d’accessibilité existe depuis longtemps. On le niait. Mais je sens le changement. »