Les petits fromages français vendus partout au Canada seront fabriqués au Québec d’ici la fin de l’année

(Sorel-Tracy) Les Mini Babybel prennent une teinte québécoise. D’ici la fin de l’année, les populaires petits fromages français enveloppés de cire rouge, vendus dans les supermarchés de tout le pays, seront fabriqués au Québec, dans une usine de Sorel-Tracy. L’objectif : produire annuellement plus de 150 millions de fromages ronds, marqués du logo de la vache bleue, symbole des producteurs de lait d’ici.

« C’est un produit qui est très apprécié dans le marché. C’était assez logique qu’on vienne implanter une production locale ici pour continuer à développer nos affaires au Canada, a affirmé Thierry Vialard, directeur d’usine et vice-président opérations, au cours d’un entretien mardi alors que La Presse visitait l’usine de Sorel-Tracy, en fonction depuis le mois d’août. Ça fait partie de nos fiertés de commencer à mettre le petit logo de la vache bleue sur nos étiquettes. » Les ventes du produit au pays sont en croissance constante, dit-on. Il a toutefois été impossible d’obtenir des chiffres.

La société Bel a investi 87, 5 millions pour la construction et le développement de son installation québécoise – voisine de la Laiterie Chalifoux qui lui fournit la matière première – où travaillent présentement 111 employés.

Rappelons que les fromages Mini Babybel achetés actuellement par les consommateurs de la Belle Province proviennent majoritairement de la France. Les premiers petits fromages ronds « québécois » se retrouveront dans les frigos des supermarchés d’ici la fin de l’année. « Il faut laisser le temps que l’usine monte en puissance », explique M. Vialard. Une fois fabriqué ici, le fromage aura le même goût que celui produit en France, assure-t-on. « Les consommateurs n’y verront que du feu », assure Marilou Chapdelaine, gestionnaire des ressources humaines à l’usine. Celle-ci fait partie d’un groupe d’une dizaine de goûteurs, chargés d’analyser régulièrement le produit. Le fromage sera également vendu au même prix.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Thierry Vialard, directeur d’usine et vice-président aux opérations

Si Bel a transféré la production au Canada de La Vache qui rit, son produit vedette, à la fromagerie Bergeron, et la confection du Boursin à Agropur, l’usine de Sorel-Tracy « est la première implantation industrielle en propre » que la société possède au Canada, rappelle Thierry Vialard.

Quelle est la différence avec l’entente de sous-traitance que Bel a conclue avec Bergeron et Agropur ? « On a la maîtrise sur ce que l’on fait, répond le directeur de l’usine. Et dans le cas particulier du Mini Babybel, il y a le secret industriel. Ce n’est pas quelque chose qu’on a envie de sous-traiter. »

Partenariat avec la Laiterie Chalifoux

Et l’entreprise n’a pas jeté son dévolu sur Sorel-Tracy par hasard. La présence de la Laiterie Chalifoux – connue notamment pour son yogourt Riviera – située tout juste à côté de l’usine a pesé lourd dans la balance. « C’est ce qui a été déterminant pour venir à Sorel-Tracy, lance sans détour Thierry Vialard. On a cherché un partenaire en amont. »

Ils [la Laiterie Chalifoux] reçoivent les camions de lait pour nous. Ils vont aussi s’occuper de la standardisation du lait.

Thierry Vialard

Pour le moment, Chalifoux envoie 45 000 litres de lait par jour à Bel. À terme, ce sont plus de 150 000 litres qui arriveront quotidiennement à l’usine.

Pour ajouter à la collaboration, les entreprises, par un corridor aérien qui relie les deux usines, partagent un seul et même système de gestion de l’énergie. « On arrive à mieux optimiser nos énergies », souligne fièrement le directeur de l’usine.

Le Groupe Bel s’est également associé à l’entreprise TerraCycle, dont l’usine est située en Ontario, pour permettre aux amateurs de Mini Babybel de recycler l’emballage. Ainsi, la cellophane, les filets, les étiquettes, l’attache métallique et la cire pourront être expédiés gratuitement par les consommateurs. Ils seront recyclés et transformés.

Fabriquer ici un produit d’ailleurs

Fabriquer localement un produit d’ailleurs est une grande fierté pour l’entreprise qui souhaite notamment réduire son empreinte écologique, selon M. Vialard. Or, l’idée de s’implanter outremer apporte tout de même son lot de difficultés, reconnaît-il lorsque La Presse le questionne sur les conseils qu’il donnerait aux entrepreneurs qui souhaitent produire au Québec un bien étranger. Celui-ci travaille sur le projet d’usine à Sorel-Tracy depuis le début de l’année 2018.

« Il y a un travail préparatoire à faire, prévient Thierry Vialard. On ne va pas arriver un jour et dire : “On construit une usine et on y va.” »

« Il faut bien travailler en amont, s’entourer des bonnes personnes pour connaître les contraintes locales, les réglementations locales. Il faut avoir de bons partenaires locaux qui connaissent le marché. Alain Chalifoux [grand patron de la Laiterie], c’est quelqu’un qui connaît très bien le milieu laitier et il a été de bon conseil pour nous sur le projet. »

La principale difficulté rencontrée par son équipe en terre québécoise ? Recruter de la main-d’œuvre, répond-il sans détour. « C’est difficile de trouver des gens. On le savait. Mais c’est plus compliqué que ce qu’on avait pensé. »

L’usine qui emploie actuellement 111 personnes souhaite accueillir 140 employés. On cherche notamment des opérateurs avec expérience pour les quarts de soir et de nuit. « C’est notre défi principal. »

La qualité des employés est là, assure-t-il. C’est la quantité qui pose problème.

Bel en bref

Superficie de l’usine de Sorel-Tracy : 70 000 pieds carrés
Investissement pour l’installation québécoise : 87, 5 millions
Nombre d’usines de Bel dans le monde : 30
Quelques pays où l’entreprise est présente : États-Unis, France, pays d’Afrique du Nord, Viêtnam, Pologne
Quelques marques : Babybel, Boursin, La Vache qui rit