Le bœuf du Québec est de plus en plus présent dans les comptoirs des supermarchés : il s’est transformé trois fois plus de viande bovine dans la province cette année qu’à pareille date l’an dernier, confirme Jean-Sébastien Gascon, coordonnateur du Partenariat Bœuf Québec. Déjà offerts dans les supermarchés IGA, les produits identifiés par la marque Bœuf Québec ont fait leur entrée dans les 114 magasins de l’enseigne Maxi à la fin du mois d’août. Et d’autres grandes surfaces pourraient leur emboîter le pas.

« La demande est très forte pour le bœuf du Québec, affirme M. Gascon. Le téléphone sonne. La pandémie a vraiment amplifié la demande. C’est très fort. »

Actuellement, chaque semaine, il se transforme en moyenne 750 bouvillons dans la province, soit le triple de ce qui se faisait hebdomadairement l’an dernier. Il ne s’était pas transformé autant de viande bovine au Québec depuis 2007.

« Ça fait depuis 2008 que la production est en décroissance », indique Jean-Sébastien Gascon. En 2007 et en 2015, la faillite de deux abattoirs québécois sous inspection fédérale – une condition sine qua non pour être dans la grande distribution – a presque réduit à néant la présence de bœuf 100 % québécois dans les étals des grandes enseignes. Or, la création de la marque Bœuf Québec en 2017, qui garantit une traçabilité de la ferme à la table, l’arrivée d’acteurs dans la transformation, comme Montpak à Terrebonne, et la pandémie, qui a fragilisé les usines de transformation dans l’Ouest canadien, ont permis à la viande d’ici de se tailler tranquillement une place dans les comptoirs.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Jean-Sébastien Gascon, coordonnateur du programme Partenaires Bœuf Québec

Rappelons qu’en avril, la fermeture temporaire de l’usine de transformation Cargill, en Alberta, et le ralentissement des activités de celle de JBS, dans la même province, qui font à elles seules de 70 % à 80 % des abattages au pays, ont eu un impact sur l’approvisionnement de certaines boucheries au Québec et ont semé une certaine inquiétude dans les supermarchés.

« Pendant la pandémie, les usines sont devenues très fragiles et elles n’étaient plus capables de fournir les gros distributeurs, raconte M. Gascon. C’est là que les petits transformateurs du Québec ont été vus comme une bouée de sauvetage. Ça a créé des liens d’affaires. Dans cet esprit-là, tout le monde veut les maintenir. »

Cette volonté de faire en sorte que le Québec développe sa propre filière bovine, à l’instar du porc et du poulet, est un « chantier d’une grande importance », selon M. Gascon. Et cet objectif va dans le même sens que celui poursuivi par le premier ministre François Legault. En entrevue à La Presse lundi, il déclarait vouloir faire de l’augmentation de la production locale « une grande priorité ».

Il déplorait par la même occasion le fait que « 50 % seulement de nos aliments sont fabriqués au Québec ». L’agroalimentaire compte ainsi parmi les secteurs sur lesquels le gouvernement a l’intention de se pencher pour corriger le tir.

La présence des produits Bœuf Québec chez IGA depuis trois ans, où on offre cinq coupes différentes, et la nouvelle entente avec Maxi, que l’on approvisionne en bœuf haché, bifteck de côte et bifteck de bavette, permettent à la marque d’être plus visible.

Le consommateur n’a jamais été habitué de se poser des questions sur la provenance de son bœuf. Notre objectif, c’est de rendre accessible le bœuf du Québec. Quand Maxi nous a appelés, on ne pouvait pas dire non.

Jean-Sébastien Gascon

« Les gens vont à l’épicerie chaque semaine, ajoute-t-il. C’était important pour nous d’aller dans les grandes chaînes. »

Pandémie et produits québécois

Du côté de Maxi, on admet que la pandémie a grandement influencé ce choix d’aller vers des produits québécois, même si des démarches avaient déjà été entreprises avant la COVID-19. « C’est sûr qu’avec ce qui est arrivé dans l’Ouest, on a eu vraiment peur à un moment donné pour nos approvisionnements ; par chance, on n’en a pas trop souffert, raconte Johanne Héroux, directrice principale, affaires corporatives et communications de Loblaw (Maxi, Provigo). Mais la principale motivation, c’est d’offrir des produits québécois. »

C’est ce que la clientèle recherche. Avec Bœuf Québec, on s’est rendu compte qu’ils [les producteurs] étaient prêts à desservir une enseigne comme Maxi. Maxi, c’est beaucoup de volume. Il faut être en mesure de bien approvisionner l’enseigne. On a eu des pourparlers avec eux et on a vu qu’il y avait une belle opportunité des deux côtés.

Johanne Héroux

Mme Héroux a refusé de nous dévoiler quelle quantité de viande sera livrée chaque semaine dans ses magasins.

Chez IGA, la porte-parole Anne-Hélène Lavoie confirme que les ventes de bœuf d’ici sont « en croissance » depuis les derniers mois. Il a toutefois été impossible d’obtenir des chiffres.

Si M. Gascon assure que d’autres enseignes pourraient bientôt offrir le bœuf d’ici dans ses comptoirs, sans donner plus de détails. Du côté de Metro, la porte-parole Geneviève Grégoire assure que l’enseigne « veut plus de bœuf 100 % Québec, mais on ne sait pas comment on va l’identifier ». Il est trop tôt pour le moment, dit-elle, pour savoir si les produits emballés sous le sceau Bœuf Québec seront vendus dans les magasins de la chaîne.

Quelques chiffres

Nombre de producteurs de bouvillons qui travaillent sous la marque Bœuf Québec : 75
Nombre de bouvillons disponibles annuellement pour la transformation et l’abattage :
• en 2020 : 80 000
• en 2008 : 220 000
Source : Bœuf Québec