Il y a quelques printemps, les étudiants désertaient les cours de leur propre chef pour scander leurs revendications dans les rues. Ce printemps, c’est un virus qui les chasse bien malgré eux des universités. L’étudiante Sora Braën prendra à son tour les rues d’assaut, mais pour livrer les courses à des personnes âgées avec son vélo.

La jeune femme de 19 ans avait prévu de terminer son trimestre à l’Université McGill et de travailler tout l’été pour payer le suivant, celui de l’automne.

Sora Braën habite chez ses parents et c’est elle qui paye ses études universitaires. Sans l’aide de prêts et bourses ni d’un REEE. L’an dernier, elle préparait des cornets de crème glacée dans une crèmerie. Cette année, elle devait servir les clients du Time Out Market de Montréal.

« Les droits de scolarité coûtent environ 5000 $ pour une année, explique-t-elle au téléphone. J’ai donc fait plus de 5000 $ dans les 12 derniers mois. »

Dire qu’un certain printemps 2012, les étudiants réclamaient du gouvernement plus d’argent dans leurs poches. Voilà qu’avec celui-ci certains verront leur compte en banque grimper sans l’avoir revendiqué. Sora Braën fait partie de celles et de ceux qui auront 2000 $ par mois pendant quatre mois, soit 8000 $. Une situation qui, avoue-t-elle, la rend mal à l’aise.

« C’est bien, mais en même temps injuste pour ma mère, soulève-t-elle. Ma mère est préposée aux bénéficiaires. Elle gagne autour de 2000 $ par mois alors que moi, je gagnerais d’habitude 1600 $ par mois. »

Je me sens mal d’avoir accès à ce montant-là quand je ne fais rien et que ma mère, elle, travaille. Ma mère travaille vraiment beaucoup en ce moment.

Sora Braën

Sora Braën tient à préciser qu’elle comprend le gouvernement de ne pas avoir le temps d’élaborer un système complexe en fonction de toutes les situations. Le temps presse. La solution des 2000 $ imposables convient mieux, croit-elle.

« Je vais avoir amplement les moyens de payer mes études pour la prochaine année, souligne-t-elle. Lorsque j’aurai mon diplôme, je rêve de travailler dans un organisme qui aide à la protection du patrimoine culturel. »

Livraison à vélo

En attendant, comme Sora Braën a perdu son emploi d’étudiante, elle a décidé de se joindre à l’OBNL créé par son ami d’enfance, aussi universitaire. Jonas Sultan a imaginé un système de livraison à domicile pour le temps de la crise : www.aide-a-la-communaute-livraison.com/.

Sora Braën fait donc des courses à l’épicerie et à la pharmacie, puis les livre aux personnes âgées ainsi qu’à tous ceux qui sont confinés à la maison. L’organisme demande de 5 $ à 10 $ par livraison.

« Je trouve que c’est une belle initiative, alors j’ai embarqué, dit-elle. Pour nous, c’est déjà compliqué de faire toutes les mesures sanitaires. Pour les personnes âgées, ce l’est encore plus. Je suis heureuse de leur venir en aide », conclut-elle.