Voilà enfin une bouée de sauvetage pour les travailleurs autonomes, les salariés à temps partiel et tous les autres oubliés de l’assurance-emploi dont les finances sont en train de couler à pic.

Eux qui n’avaient droit à rien pourront maintenant compter sur 2000 $ par mois, durant quatre mois, grâce à la Prestation canadienne d’urgence (PCU) dévoilée mercredi par le premier ministre Justin Trudeau.

Il reste encore des zones d’ombre, mais le brouillard se lève tranquillement sur cette aide fédérale qui combine et remplace deux autres mesures de soin et de soutien d’urgence annoncées il y a quelques jours.

En gros, la PCU sera disponible pour tous les travailleurs dont les revenus se sont évaporés à cause de la pandémie de COVID-19, qu’ils soient admissibles ou pas à l’assurance-emploi (A-E). On parle autant des salariés que des contractuels ou des travailleurs autonomes :

Ceux qui sont malades.

Ceux qui sont en quarantaine ou qui prennent soin d’une personne atteinte de la COVID-19.

Ceux qui doivent cesser de travailler pour s’occuper de leurs enfants qui n’ont plus d’école ou de garderie.

Et ceux qui ont tout simplement perdu leur gagne-pain.

La PCU leur donnera un bon coup de main, même si certains se plaignent déjà que la prestation est inférieure à celle de l’A-E. À 2000 $ par mois, il est vrai que la PCU fournit un montant d’environ 460 $ par semaine, ce qui est inférieur à la prestation maximale de 573 $ de l’A-E.

Mais le ministère des Finances nous a confirmé que le montant de 2000 $ est fixe pour tout le monde. Alors, la PCU sera nettement plus avantageuse que l’A-E pour des travailleurs à faibles revenus.

Par exemple, une personne travaillant à temps plein au salaire minimum ne toucherait que 275 $ par semaine de l’A-E qui compense seulement 55 % du salaire.

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Mais la clé, c’est surtout la rapidité. Ottawa promet qu’un portail sera disponible bientôt. Les premières demandes pourront être déposées le 6 avril. Et l’argent sera versé 10 jours plus tard, soit le 16 avril.

C’est loin. Et c’est si tout va bien…

« Le nerf de la guerre, c’est d’avoir la capacité de faire une administration rapide et efficace pour que tout le monde reçoive son argent à temps », estime Luc Godbout, professeur de fiscalité à l’Université de Sherbrooke.

Développer une telle infrastructure en deux semaines sera un défi titanesque pour Ottawa.

Déjà, le système de l’assurance-emploi souffre de délais inadmissibles. Avant même que la pandémie éclate, certaines personnes attendaient depuis des mois le traitement de leur demande qui remontait jusqu’au mois de novembre.

Avec près d’un million de nouvelles demandes la semaine dernière, un volume 30 fois plus élevé que la normale, le système était complètement engorgé

« Le système de l’assurance-emploi était défaillant, et la crise vient de l’illustrer de façon éloquente », dit Sylvain Lafrenière, coordonnateur du Mouvement autonome et solidaire des sans-emploi.

Alors, croisons-nous les doigts pour que la PCU aboutisse sans délai. Ça presse : beaucoup de familles sont à sec.

Selon un sondage Angus Reid dévoilé mardi, plus du tiers des Canadiens qui ont subi une perte d’emploi craignent de ne pas pouvoir payer leur prochain loyer ou versement hypothécaire.

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Pour avoir droit à la PCU, le travailleur doit avoir gagné, au cours de l’année précédente, au moins 5000 $ de revenus provenant d’un emploi, d’un travail à son compte, de prestations de l’assurance-emploi ou d’un programme de congé parental, précise le projet de loi.

A priori, il s’agit donc d’une excellente nouvelle pour les étudiants qui travaillent à temps partiel ou qui comptent sur un emploi d’été pour renflouer leur portefeuille.

« Comme ils sont à l’école à temps plein, dans bien des cas, ils ne sont pas admissibles à l’A-E, car ils sont considérés comme non disponibles à l’emploi », explique M. Lafrenière.

Reste à savoir s’ils obtiendront le plein montant de 2000 $ par mois, même si leurs revenus mensuels sont inférieurs, ce qui serait plutôt incongru. Il serait plus équitable et moins coûteux de plafonner la PCU ou de faire un versement au prorata des revenus mensuels perdus.

Or, plus les calculs sont complexes, plus l’administration est lourde et lente…

Excellente nouvelle aussi pour tous ceux qui sont revenus récemment sur le marché du travail, après une période de chômage ou un congé parental. Incapables de dénicher un emploi en pleine pandémie, de jeunes papas ou mamans se retrouvaient face à un mur. Ils n’avaient pas droit à l’A-E, faute d’avoir accumulé le nombre d’heures de travail nécessaires au cours des 52 dernières semaines précédentes.

Finalement, les travailleurs autonomes peuvent aussi pousser un soupir de soulagement. Mais une question demeure…

Le projet de loi indique que, pour toucher la PCU, le travailleur doit avoir cessé d’exercer son emploi – ou d’exécuter un travail pour son compte – pendant au moins 14 jours consécutifs durant la période de 4 semaines pour laquelle il demande l’allocation.

Qu’arrive-t-il si un travailleur autonome ne perd pas ses revenus au grand complet ? Le privera-t-on de 2000 $ de PCU parce qu’il a fait un petit contrat de 500 $ ? Ce serait absurde. Mais attendons de voir les détails qui viendront avec les règlements…

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