(New York) Faute d’un accord de dernière minute au Congrès américain, les compagnies aériennes fragilisées par la pandémie de coronavirus vont commencer jeudi à licencier des dizaines de milliers de personnes aux États-Unis.  

American Airlines a été la première à confirmer mercredi soir qu’elle allait commencer « le difficile processus » de mise au chômage technique de 19 000 de ses employés.

United Airlines a annoncé un peu plus tard le licenciement de 13 432 salariés.

Les deux compagnies ont toutefois assuré dans des messages à leurs équipes, consultés par l’AFP, que si démocrates et républicains parvenaient dans les jours à venir à un compromis, elles annuleraient ces décisions.  

Comme les autres grandes sociétés du secteur, American et United s’étaient engagées au printemps à ne licencier personne jusqu’au 30 septembre, en échange de subventions d’un montant total de 25 milliards de dollars.

Mais cette aide expire mercredi.  

Or les discussions entre démocrates et républicains sur un nouveau plan de soutien à l’économie, si elles ont bien repris mercredi à Washington, n’ont pas encore abouti.

Les prêts accordés mardi par le ministère américain des Finances à sept compagnies pour un montant total de 25 milliards de dollars n’ont pas changé la donne : cet argent est destiné à les aider à couvrir les dépenses courantes mais n’est pas dédié aux salaires.

De nombreux passagers restent réticents à voler dans un espace confiné, les vols internationaux sont encore soumis à de strictes restrictions et les voyages d’affaires sont en berne.

Le nombre de clients traversant la sécurité dans les aéroports américains est encore en baisse d’environ 60 % à 70 % par rapport à la même période en 2019, selon les chiffres du gouvernement.  

Les compagnies ont déjà beaucoup sabré dans leurs effectifs via des plans de départs volontaires, des départs à la retraite anticipée et des congés sans solde.  

Chez Delta, plus de 40 000 salariés ont déjà opté pour l’un de ces programmes. Southwest s’est séparée, de façon temporaire ou permanente, de 27 % de ses employés.  

Mais cela ne suffit pas pour certaines compagnies.

« Demain, des dizaines de milliers de salariés de l’aviation, qui sont considérés comme des travailleurs essentiels, vont se réveiller sans travail et sans assurance santé, et des milliers d’autres n’auront plus de salaires », a déploré dans un communiqué Sara Nelson, la présidente du syndicat des agents de bord AFA.

Delta garde ses pilotes

Syndicats comme patrons du secteur plaident tous azimuts à Washington depuis plusieurs semaines pour une rallonge du programme de subventions.

Les licenciements sont toutefois un peu moins importants qu’initialement annoncé : United Airlines avait dans un premier temps averti qu’elle pourrait avoir à licencier jusqu’à 36 000 salariés.  

Les compagnies aériennes ont d’une part levé beaucoup d’argent au cours des derniers mois pour faire face à la crise et leur situation financière n’est pas aussi désespérée qu’elle pouvait apparaître au printemps.  

Certaines compagnies ont saisi l’opportunité de piocher dans l’enveloppe de 25 milliards de dollars mise à leur disposition par le gouvernement pour des prêts.  

D’autres comme Delta ou Southwest ont préféré ne pas avoir à répondre aux exigences de l’État (prise de participation minoritaire, interdiction temporaire de verser des dividendes, limite des rémunérations des dirigeants) et ont emprunté massivement auprès des marchés financiers.

Les compagnies doivent par ailleurs être prêtes à étoffer leurs programmes de vols une fois que le trafic aérien redécollera.  

Delta a par exemple accepté de ne licencier aucun pilote avant le 1er novembre, le temps de voir où menaient les négociations dans la capitale américaine.

Secteur public décimé

Le secteur aérien est loin d’être le seul à être touché par la pandémie.  

Disney a par exemple annoncé mardi la suppression de 28 000 emplois aux États-Unis.  

Certaines aides du gouvernement ayant permis à des entreprises ou à des particuliers de garder la tête hors de l’eau arrivent bientôt à expiration, souligne Nancy Vanden Houten de Oxford Economics.

Les fonds dédiés aux allocations chômage versées par le gouvernement fédéral en plus de celles des autorités locales, déjà réduites de 600 dollars par semaine à 300 dollars début août, « devraient s’assécher au courant du mois d’octobre », prévient l’économiste.  

Les finances des États et des collectivités locales sont aussi touchées de plein fouet par la baisse de l’activité économique.  

Le centre de réflexion Economic Policy Institute estime que, sans aide du gouvernement, 5,3 millions de personnes pourraient être licenciées d’ici fin 2021 dans le secteur public.