En mobilisant la presque totalité des ressources du système de santé canadien, la pandémie de COVID-19 a accéléré de façon exponentielle l’implantation de la télémédecine ou de la médecine virtuelle. L’incapacité de voir un médecin ou l’accès extrêmement limité aux cliniques médicales en raison des risques de contracter le coronavirus ont forcé les acteurs du système de santé à utiliser des solutions de rechange existantes, mais qui, étrangement, ont été longtemps boudées.

On peut présumer que la révolution de la télémédecine ne sera pas que passagère, qu’elle est bien là pour de bon et qu’elle se développera tellement elle vient de faire la démonstration auprès de la population qu’il est possible d’avoir rapidement accès à des diagnostics qui pouvaient auparavant prendre des semaines à obtenir.

François Gratton est président de groupe Telus et chef de la direction de Telus Québec, et il est engagé depuis des années dans le développement de technologies de l’information dans le secteur des soins de santé, puisqu’il était auparavant vice-président exécutif d’Emergis, une entreprise de TI dans le domaine de la santé, avant que cette société ne soit acquise par Telus en 2008.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

François Gratton est président de groupe Telus et chef de la direction de Telus Québec, et il est engagé depuis des années dans le développement de technologies de l’information dans le secteur des soins de santé.

« Cela fait des années chez Telus que l’on développe et propose des solutions technologiques pour la santé, mais la gestion du changement est lente dans ce secteur, contrairement à l’ouverture que les entreprises de l’aéronautique ou du système bancaire ont manifestée à l’endroit des nouvelles technologies. La nécessité qu’a générée la crise du coronavirus a forcé le secteur à faire des changements », constate François Gratton.

Emergis avait notamment développé à l’époque le dossier médical électronique ainsi que des systèmes de gestion des bénéfices des régimes d’assurance, et Telus a poursuivi le travail et l’implantation de ces solutions par l’entremise de sa division Telus Santé.

Au cours des 10 dernières années, on a investi 3 milliards dans le développement de cette division, mais l’éclosion de la pandémie de coronavirus a coïncidé avec la mise en place de trois programmes distincts qui ont littéralement explosé depuis leur lancement.

François Gratton

Le premier programme, baptisé Akira, est destiné aux employeurs et leur permet d’offrir à leurs employés un accès à un service de santé virtuel, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.

Les participants peuvent obtenir par vidéoconférence une consultation virtuelle avec une infirmière et même avec un médecin et recevoir un premier diagnostic dans un laps de temps extrêmement serré ; dans certains cas, on peut même obtenir une ordonnance au besoin.

Le délai moyen de réponse aux appels est de moins de 40 secondes, et en un mois seulement, Telus Santé a dû doubler ses capacités d’accueil pour répondre à la demande qui n’a pas cessé de progresser.

La division Santé de Telus a aussi lancé un autre service – offert pour l’instant dans quatre provinces, mais qui sera élargi à la grandeur du pays – qui permet à tous les citoyens d’avoir accès à une consultation gratuite avec un médecin. Le service Babylone est remboursé par les régimes d’assurance maladie de chaque province.

« Ce n’était pas possible avant pour les médecins de se faire payer pour une consultation virtuelle, mais avec la crise du coronavirus et l’impossibilité d’avoir accès à un spécialiste, les gouvernements ont accepté de rembourser les consultations virtuelles », souligne François Gratton.

Le gestionnaire précise que depuis le déclenchement de la pandémie, le nombre de téléchargements de l’application Babylone a été multiplié par 10.

Enfin, au fil des ans, Telus Santé avait branché quelque 28 000 médecins à travers le pays à sa plateforme de gestion des dossiers médicaux électroniques. Dans la foulée de la crise, Telus Santé a ajouté une fonctionnalité à son système en branchant une caméra qui permet au médecin de réaliser une consultation vidéo avec ses patients.

« On a lancé cette nouvelle fonctionnalité le 10 avril et en deux mois, on cumule maintenant 100 000 qui ont été réalisées via notre plateforme de dossier médical électronique, qui permet notamment aux médecins de faire le suivi des dossiers de leurs patients », observe François Gratton.

L’inaccessibilité des cliniques médicales et la quasi-impossibilité de rencontrer un médecin en personne ont finalement accéléré l’utilisation de nouvelles méthodes que permettent les nouvelles technologies, mais dont on ne se servait que de façon exceptionnelle parce qu’on était habitué à un rituel.

La crise exceptionnelle que l’on traverse nous aura permis de découvrir de nouvelles façons de faire qui vont s’enraciner dans nos pratiques usuelles et alléger le fardeau organisationnel de nos systèmes de santé et rendre plus optimales les interventions qui exigent une consultation sur place, de médecin à patient.