Tous les détaillants à l’extérieur de Montréal n’ont pas respecté la directive de Québec les obligeant à reprendre les contenants consignés. Mais certains ont choisi de le faire de façon nouvelle, et Recyc-Québec se montre ouvert à ces solutions imaginées par les épiciers.

Des amateurs de bière ou de boisson gazeuse qui ont voulu retourner leurs canettes et bouteilles consignées lundi ont dû rebrousser chemin. Des dépanneurs et de petits épiciers refusaient les contenants, a-t-on pu constater lors d’une tournée en Montérégie. En revanche, plusieurs grandes chaînes de supermarchés accueillaient les clients avec de nouvelles procédures de collecte.

Même si Recyc-Québec a clairement écrit que la reprise des contenants devait se faire « en magasin », la société québécoise de récupération et de recyclage a confirmé à La Presse que les détaillants qui ont trouvé d’autres méthodes ne s’exposent pas systématiquement à des amendes.

« On va les évaluer au cas par cas », a indiqué la porte-parole Brigitte Geoffroy. Pourvu que le site ait les mêmes heures d’ouverture que le commerce et que l’argent soit retourné dans les poches du client, Recyc-Québec va « faire preuve d’ouverture », assure-t-on.

L’organisation a notamment visité « la solution » imaginée par le propriétaire du IGA St-Pierre, à Granby. Et lui a donné sa bénédiction. Une vidéo diffusée sur Facebook montre un local, situé en face du IGA dans le même stationnement, qui contient des gobeuses éloignées les unes des autres, un lavabo et des employés équipés de masques qui désinfectent. L’épicier affirme que « plus de 350 000 contenants consignés [y ont été] récupérés en une semaine ».

> Voyez la vidéo

« C’est vers ça qu’on devrait s’en aller », croit le porte-parole de l’Association des détaillants en alimentation du Québec (ADA), Stéphane Lacasse. Et ce, de façon permanente, pas seulement pendant la pandémie. D’autres détaillants qui avaient installé un abri semi-permanent dans leur stationnement ont continué à l’utiliser, indique aussi l’ADA. « Que la gobeuse soit à l’extérieur du magasin, elle récupère quand même, fait valoir Stéphane Lacasse. Notre job, c’est d’accepter les contenants et de redonner l’argent. »

Les Travailleurs unis de l’alimentation et du commerce (TUAC) cherchent eux aussi « une solution » pour sortir la consigne de la courtoisie en partenariat avec une chaîne de supermarchés, a-t-on appris.

Le syndicat voudrait que les employés qui sont en contact avec de la nourriture n’aient plus à manipuler des contenants souillés entre deux clients qui attendent à la caisse. « C’est plein de bestioles mortes ou vivantes et de fluides corporels. C’est dégueulasse à manipuler. Ça n’a pas d’allure que ça rentre dans une épicerie, dit la porte-parole des TUAC, Roxanne Larouche. Il faut des centres de dépôt à l’extérieur comme ça se fait ailleurs. Il est temps qu’on arrive au XXIe siècle. »

  • Certains consommateurs attendaient avec impatience le retour de la consigne pour rapporter toutes les bouteilles et canettes vides consommées pendant le confinement.

    PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

    Certains consommateurs attendaient avec impatience le retour de la consigne pour rapporter toutes les bouteilles et canettes vides consommées pendant le confinement.

  • La solution du Super C à Brossard pour récupérer les bouteilles et canettes consignées

    PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

    La solution du Super C à Brossard pour récupérer les bouteilles et canettes consignées

  • Le IGA de Brossard a installé un abri et deux conteneurs pour accueillir les clients avec leurs canettes et bouteilles consignées.

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    Le IGA de Brossard a installé un abri et deux conteneurs pour accueillir les clients avec leurs canettes et bouteilles consignées.

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Les dépanneurs plus frileux

Lundi, les Provigo, Maxi, Metro et IGA que La Presse a visités reprenaient graduellement les bouteilles et canettes chacun à leur manière. Chez Maxi à Boucherville, un employé s’assurait qu’un client qui avait terminé de déposer ses contenants dans la « gobeuse » située à l’entrée de l’épicerie ne croise pas un autre client qui voulait entrer. Pour ce qui est des bouteilles en verre, elles étaient échangées, comme avant la pandémie, au comptoir de service contre de l’argent comptant.

Du côté du IGA de Place Longueuil, des dizaines de clients faisaient la file devant un local loué à l’extérieur de l’épicerie à l’entrée du centre commercial. Au IGA de Brossard, on avait plutôt installé une tente et des conteneurs.

Du côté des dépanneurs visités par La Presse, aucun n’avait repris la consigne.

« C’est pour la sécurité de tout le monde, a affirmé le caissier d’un dépanneur indépendant derrière un plexiglas. Oui, je sais que le gouvernement a dit qu’on devait les reprendre aujourd’hui. Si le propriétaire change d’idée et décide de les reprendre, je vais quitter mon emploi. »

Même scénario, une rue plus loin, au dépanneur Super Relais Petro-Canada : « Non, je n’ai pas de place en ce moment », affirme la caissière.

Pas de portrait précis

Impossible pour le moment d’avoir une idée chiffrée de la situation. L’ADA dit ne pas être en mesure d’évaluer quelle proportion des 7500 détaillants du Québec (épiceries et dépanneurs) a recommencé lundi à prendre les contenants consignés.

Au Conseil canadien du commerce de détail (CCCD), on observe que la plupart des gros acteurs ont mis en place de nouveaux processus sécuritaires pour les clients et les employés. Mais les plus petits comme Richelieu, Bonichoix et Intermarché n’ont pas encore trouvé de solution. « Pour eux, ça va être plus dur, soutient le directeur général du CCCD, Marc Fortin. Prenez un magasin dans un village, s’ils n’ont pas d’espace dans un stationnement, ils vont être obligés de trouver d’autres solutions. »

Stéphane Lacasse, de l’ADA, confirme que certains de ses membres n’ont pas l’espace pour reprendre la consigne et respecter les 2 mètres. « On a dit à nos marchands de faire une demande d’exemption à Recyc-Québec. […] On ne peut pas mettre les employés et les clients à risque pour ça [la consigne]. » En fin d’après-midi, Recyc-Québec n’avait reçu aucune demande du genre, mais assure qu’il n’obligera « pas les détaillants à les remettre [les gobeuses] s’ils n’ont pas la place ou ne peuvent respecter les 2 mètres ».