Un litige qui oppose la Ville de Fermont, sur la Côte-Nord, aux créanciers de Cliffs Resources pourrait priver toutes les autres villes minières du Québec de plusieurs centaines de millions de dollars de revenus fonciers.

La cause qui sera entendue en Cour supérieure les 3 et 4 juin prochain est d’une importance capitale pour les villes minières, explique Martin St-Laurent, maire de Fermont, qui a déjà dépensé 2 millions pour défendre ses intérêts dans ce dossier.

Bloom Lake General Partners Ltd. représente les créanciers de Cliffs Resources, l’entreprise américaine qui a exploité la mine de fer jusqu’en 2015 avant de faire faillite. Le groupe conteste l’évaluation foncière des installations de la mine d’une manière encore jamais vue au Québec.

Bloom Lake General Partners affirme que les dispositions de la Loi sur la fiscalité municipale qui exemptent l’équipement d’une mine de la taxe municipale incluent l’ensemble des immeubles, bureaux administratifs et chemins d’accès qui sont nécessaires à son exploitation. En somme, à peu près aucune taxe municipale ne pourrait être perçue sur les installations d’une société minière, si la Cour lui donne raison.

Toutes les autres compagnies minières, que ce soit ArcelorMittal ou Agnico Eagle, pourraient faire de même. On ne peut pas laisser faire ça.

Martin St-Laurent

À elle seule, la Ville de Fermont perdrait 18 millions par année, soit les deux tiers de son budget annuel. Pour l’ensemble du Québec, ce sont 420 municipalités qui sont à risque de perdre 1,3 milliard en évaluation foncière.

Devant l’importance de l’enjeu, l’Union des municipalités du Québec a décidé d’aider la Ville de Fermont à se défendre devant les tribunaux. Avec les moyens que lui donne le Fonds municipal d’action juridique, l’UMQ a déjà appuyé la Ville devant le Tribunal administratif du Québec et la Cour du Québec. Bloom Lake General Partners a contesté les décisions de première instance.

« On va maintenant intervenir devant la Cour supérieure », confirme le porte-parole de l’UMQ, Patrick Lemieux.

La mine de fer du lac Bloom est maintenant exploitée par Champion Iron, qui n’a aucun lien avec le groupe qui représente les créanciers de Cliffs Resources. L’actuel exploitant est en bons termes avec la Ville et ne conteste pas l’évaluation foncière des installations, indique le maire de Fermont. Toutefois, selon lui, il serait surprenant que Champion, comme les autres sociétés minières, ne profite pas d’une décision du tribunal qui serait favorable à Bloom Lake General Partners.

Il n’a pas été possible de joindre les dirigeants de Champion. À l’Association minière du Québec, on fait valoir qu’il s’agit d’un dossier qui ne concerne pas un de ses membres. « L’AMQ a comme politique de ne pas commenter les dossiers qui sont judiciarisés, afin de laisser les processus suivre leur cours », a fait savoir son porte-parole, Mathieu St-Amant.

Champion Iron, une entreprise établie en Australie, a racheté les installations de Cliffs Resources en 2016 avec l’appui de la Caisse de dépôt et placement du Québec et d’Investissement Québec. L’exploitation minière a repris en 2018.