Geneviève Fortier est entrée en fonction comme PDG du groupe Promutuel Assurance le 16 décembre dernier et, la gestionnaire ne s’en cache pas, la crise du coronavirus s’est révélée un redoutable test de leadership alors qu’elle a dû notamment finaliser avec son équipe – malgré ces temps difficiles – l’exercice de planification stratégique en vue d’assurer la croissance rentable de la plus vieille mutuelle d’assurance québécoise.

Q. Vous êtes entrée en fonction comme PDG de Promutuel seulement trois mois avant que la crise du coronavirus éclate. Comment avez-vous vécu cette double expérience ?

R. Je dois avouer que, comme leader, je l’ai vécue comme un excellent test. Quand tu entres en fonction et que survient un évènement comme celui que l’on vit actuellement, tu dois rapidement créer un climat de confiance et arriver à composer avec tous les éléments de la crise.

Ç’a été tout un baptême, une initiation, une expérience unique. En l’espace de trois semaines, on a revu toutes nos façons de fonctionner et, heureusement, on a une équipe extrêmement agile et très bien orientée qui a répondu rapidement. Il fallait d’abord voir à la santé et à la sécurité de nos 2000 employés et de nos clients, ce qu’on a fait, et régler chacun des dossiers.

Depuis le début de la crise, je suis en contact quotidien avec nos leaders et j’ai gardé le conseil d’administration très engagé dans le développement de la situation.

Le groupe avait amorcé depuis l’automne dernier une nouvelle planification stratégique que l’on a poursuivie malgré la crise. On va présenter prochainement tous les résultats de notre réflexion autour des défis de la transformation et de la croissance rentable.

Q. Vous avez fait toute votre carrière dans le secteur pharmaceutique avant de vous joindre à SSQ Assurance, à titre de première vice-présidente aux ventes, et de devenir deux ans plus tard PDG de Promutuel. Qu’est-ce qui explique ce changement de cap ?

R. Il faut savoir quand entrer et quand sortir. Moi, je suis une leader de croissance, je n’aime pas gérer le statu quo. J’ai rejoint le secteur pharmaceutique d’abord dans les biotechs, chez Biochem Pharma, à titre de directrice des ressources humaines, puis j’ai rejoint le secteur manufacturier chez Merck Frosst et enfin la distribution chez McKesson Canada à titre de vice-présidente principale.

J’avais la possibilité de poursuivre ma carrière chez McKesson au siège social à San Francisco, mais j’ai décidé de faire une pause et je me suis retrouvée devant cinq occasions, dont trois dans le secteur des assurances. J’ai choisi d’aller chez SSQ Assurance, où j’ai adoré mon expérience ; ç’a été pour moi un laboratoire formidable et un tremplin pour devenir PDG chez Promutuel.

Q. C’était l’automne dernier, au moment même où SSQ Assurance et La Capitale préparaient leur fusion. N’était-ce pas une belle occasion pour vous de participer à la création d’un nouveau grand groupe ?

R. Promutuel m’offrait un défi de transformation parce que l’entreprise, qui célèbre aujourd’hui ses 168 ans d’existence et qui est la plus vieille mutuelle d’assurance au Québec, cherchait à accélérer ce processus de transformation.

Notre entreprise est le quatrième assureur de dommages au Québec et le deuxième assureur d’entreprises. C’est le résultat du regroupement de 16 sociétés mutuelles d’assurance. Le groupe a une structure décentralisée et, à l’image du Québec, est bâti autour des régions.

On a un défi de transformation technologique et de croissance rentable. Produire de la croissance, c’est toujours possible, mais produire de la croissance rentable, c’est le défi qui nous occupe. Avec les changements climatiques, le coût des sinistres augmente, il faut revoir la tarification, les données deviennent très importantes et il faut se rapprocher de nos membres en leur rendant l’information le plus accessible possible.

Q Vous évoquez la présence régionale de Promutuel. Il est assez stupéfiant de voir combien vous êtes présent dans toutes les régions du Québec, où vous semblez avoir des bureaux partout, mais c’est moins le cas dans les grands centres urbains, où vous semblez moins visible. Est-ce vraiment le cas ?

R. Oui, c’est la réalité. Promutuel a été créée il y a 168 ans par des agriculteurs de Huntingdon qui voulaient se protéger contre le feu, la foudre et le vent, et le modèle s’est propagé dans toutes les régions du Québec.

On est bien présents à Québec, où on a établi notre siège social, mais on est sous-représentés. C’est la même situation dans plusieurs marchés urbains, notamment à Montréal, où on n’a pas de bureaux, mais où on fait affaire via nos antennes de Longueuil ou de la Rive-Nord.

On a une bonne base de plus de 630 000 assurés que l’on veut élargir, mais de façon rentable en ayant une présence plus forte dans les marchés urbains. On va le faire en visant de façon intelligente, en réalisant une bonne vigie des occasions, c’est au cœur de notre stratégie de croissance rentable.

Q. De quelle façon pensez-vous être en mesure de participer à la réalisation de ces objectifs ?

R. J’amène avec moi ma capacité à produire des résultats et je mise sur la personnalité, sur l’ADN de Promutuel, qui est la collaboration. On représente 16 sociétés mutuelles qui s’entraident et qui ont toujours offert un service à leurs membres à l’échelle humaine ; c’est ce qui nous différencie.

On souhaite maintenant accélérer notre développement en milieu urbain et à l’extérieur du Québec en misant sur cette expérience membre à échelle humaine.

On vit une transformation et j’en suis l’exemple puisque je suis la première femme à devenir PDG du groupe en 168 ans d’existence et que je ne suis pas une actuaire de formation, c’est tout dire.