Il y a bien sûr les grosses PME de près de 500 employés, mais le confinement n’épargne pas les TTE. Ni même les animaux.

Et les difficultés n’excluent pas la bonne humeur.

Bref, Monick Drolet nous a écrit.

« Je suis propriétaire d’une pension pour animaux et d’un salon de toilettage, exprimait-elle. En l’espace de deux jours, mon carnet de réservations s’est vidé… Ben oui ! Les familles, en annulant leur voyage, n’auront plus besoin de mes services. »

Une conversation téléphonique nous a permis d’en apprendre plus. Son entreprise, le Manoir des Majestés, est située à Beaumont, à quelques kilomètres à l’est de Québec.

L’édifice, situé au milieu d’un champ, se présente en effet comme un petit manoir, avec son haut toit à quatre versants et sa façade de pierres. Monick Drolet et son conjoint habitent à l’étage – l’étage noble, disait-on autrefois –, les chiens occupent le rez-de-chaussée.

D’abord éleveuse de golden retrievers, elle a ajouté en 2009 une pension pour animaux et un salon de toilettage à ses activités. Ses pensionnaires canins occupent des enclos au manoir et dans ses dépendances.

PHOTO FOURNIE PAR LE MANOIR DES MAJESTÉS

Le Manoir des Majestés, qui compte une pension pour animaux et un salon de toilettage, fait face à un raz-de-marée d'annulations.

Elle se flatte de pouvoir accueillir jusqu’à 90 clients : chiens, chats, oiseaux… « J’ai même essayé un rat, une fois. J’ai de la place pour tout le monde. »

Mais entre le 13 et le 15 mars, un raz-de-marée d’annulations a déferlé. « Tout ce qu’il me restait à faire, c’est de dire que je comprenais et d’encourager mon client à ne pas sortir », dit-elle.

Les animaux déjà en pension ont quitté l’établissement à mesure du retour de voyage de leurs propriétaires.

« Cette semaine, j’en ai eu beaucoup de l’Espagne », raconte l’entrepreneure.

Elle les a informés (les propriétaires) du montant de la facture, et pour éviter tout contact, leur a demandé de l’acquitter par transfert bancaire.

« Ça fait spécial. Tu mets sa poche de moulée à la porte, son coussin, ses petites affaires personnelles, tout dans un sac. Tu habilles le chien avec son harnais, sa laisse, son manteau. »

Quand le client arrive, elle entrouvre la porte et lui laisse la laisse.

Le dernier est parti ce matin. Un beau petit fox-terrier. Il n’y a rien de négatif : ma cliente a appris à faire un transfert bancaire ce matin !

Monick Drolet

La réduction draconienne de son activité hôtelière l’a forcée à mettre à pied quatre de ses cinq employés. « On apprend à faire des cessations d’emploi par internet ! », observe-t-elle, sereinement. « On devient débrouillard ! »

Elle n’a conservé qu’une seule employée, qu’elle paie son plein salaire malgré ses heures réduites. Elles se divisent la journée.

« Elle fait un bout, elle gâte ma gang, et elle a sa paie normale. »

Sa gang ?

« J’ai trois belles petites corgis et j’ai quatorze golden retrievers ! »

« En fin de journée, c’est moi qui reprends le collier », ajoute-t-elle dans une formule de circonstance, pendant qu’en arrière-plan, un membre de la gang donne de la voix.

Les activités de toilettage sont interrompues, elles aussi, mais Monick Drolet maintient la vente de moulée. Avec les précautions qui s’imposent, bien sûr. « Les gens m’envoient un transfert bancaire, et quand je l’accepte, je mets la poche de moulée à la porte. »

Le retour des chaleurs

Reste l’élevage canin. Qui n’est pas sans poser quelques difficultés aussi. « Le dilemme, c’est que toutes les filles sont en chaleur. On fait quoi ? On accouple ou on attend l’année prochaine ? »

L’an dernier, les six accouplements avaient produit quatre portées, soit au total une vingtaine de chiots.

Cette année, elle compte les réduire de moitié, ce qui devrait lui permettre de placer tous les chiots. « Et s’il y en a un de trop, vous savez bien où il va rester. »

Entre-temps, Monick Drolet n’a plus de revenus.

« Sauf que je travaillais auparavant pour un organisme de bienfaisance », relance-t-elle avec un inébranlable optimisme. « Avec une piastre, il fallait en faire dix. J’ai toujours géré mon commerce comme je gérais l’organisme, dans le temps. C’est ce qui va me permettre de m’en sortir. »

Ses 17 chiens et elle.