Sherbrooke, Baie-Comeau, Alma et les autres villes qui exploitent des réseaux municipaux de distribution d’électricité sont exclus de l’appel de propositions d’Hydro-Québec pour le choix des projets de cryptomonnaies les plus prometteurs pour le Québec.

L’appel de propositions se termine le 31 octobre. Il se déroule sans Hydro-Sherbrooke et les autres réseaux municipaux, qui ont contesté la décision de la Régie de l’énergie sur les conditions et les tarifs de fourniture de l’électricité pour le secteur des bitcoins et autres cryptomonnaies.

« Effectivement, les réseaux municipaux sont exclus de l’appel d’offres de 300 mégawatts d’Hydro-Québec pour des clients de cryptographie », confirme Louis Gosselin, porte-parole du bureau du maire de Sherbrooke.

Les réseaux municipaux contestent les conditions de l’appel de propositions, que la Régie de l’énergie a approuvées, parce qu’ils estiment qu’elles portent atteinte à leur compétence exclusive de fixer les tarifs et les conditions de fourniture de l’électricité sur leur territoire.

Au cœur du litige, la définition de la période de pointe hivernale pendant laquelle Hydro-Québec se réserve le droit de débrancher les entreprises de cryptomonnaies, pour éviter d’avoir à faire des achats d’énergie coûteux sur les marchés voisins.

Des millions en jeu

Les réseaux municipaux, dont plusieurs ont déjà des contrats avec des entreprises de cryptomonnaies, ne veulent pas laisser Hydro-Québec décider du moment du délestage.

« La pointe hivernale n’arrive pas toujours au même moment ici qu’à Montréal », explique le directeur d’Hydro-Jonquière, Martin Vachon.

En décidant eux-mêmes quand débrancher les entreprises sur leur territoire, les réseaux municipaux peuvent réduire leurs achats ponctuels de puissance et économiser beaucoup d’argent.

On parle de millions de dollars. Ça peut faire la différence entre des pertes ou des profits pour une année.

Martin Vachon

L’opposition des réseaux municipaux à la volonté d’Hydro-Québec de décider du délestage a eu pour effet de retarder l’appel de propositions, qui devait à l’origine être conclu le 21 août.

La Régie de l’énergie a permis à la société d’État d’aller de l’avant avec son appel de propositions, et elle examinera les arguments des réseaux municipaux plus tard, en décembre.

Aucun des projets retenus dans le cadre de l’appel de propositions ne se fera donc sur le territoire des réseaux municipaux.

Plusieurs des villes qui exploitent des réseaux municipaux misent sur les cryptomonnaies pour augmenter leurs revenus et diversifier leur économie. Elles devront attendre avant de relancer la machine, au risque de voir l’engouement pour les cryptomonnaies disparaître. Déjà, la baisse de valeur du bitcoin a refroidi l’enthousiasme des entrepreneurs qui voulaient se lancer dans cette activité. Le téléphone ne sonne plus, constatent des responsables des réseaux municipaux.

Assez attendu

C’est une situation assez particulière, admet-on chez Hydro-Québec. La décision à venir de la Régie pourrait mener à des conditions et des tarifs différents pour les activités de cryptomonnaies, selon l’endroit où elles se situent sur le territoire québécois. « Comme deux équipes de hockey qui jouent sur la même patinoire, mais avec des règles différentes », illustre Jonathan Côté, porte-parole de la société d’État.

Selon lui toutefois, Hydro est satisfaite de pouvoir achever son appel de propositions.

Les entreprises intéressées attendent déjà depuis longtemps. Ce n’est pas un bon signal pour les marchés.

Jonathan Côté

M. Côté rappelle qu’en 2018, Hydro-Québec a été autorisée à imposer un moratoire sur les projets de cryptomonnaies, parce que leurs besoins en électricité dépassaient ses capacités.

La société a ensuite fait approuver par la Régie sa décision de consacrer 300 mégawatts au secteur des cryptomonnaies et des chaînes de blocs, à un tarif de 5 cents le kilowattheure, assorti d’une obligation de renoncer à l’électricité pendant la pointe hivernale, à des périodes déterminées par Hydro.

Ce bloc de 300 mégawatts s’ajoutera aux ententes conclues avant le moratoire, par Hydro-Québec (158 mégawatts) et par les réseaux municipaux (210 mégawatts), pour un total de 668 mégawatts.

Une fois son appel de propositions terminé, Hydro n’exclut pas la possibilité de consacrer 50 mégawatts supplémentaires au secteur des cryptomonnaies, spécialement pour des projets dans les régions desservies par les réseaux municipaux, si la demande le justifie.

Les projets retenus à la suite de l’appel de propositions seront ceux qui offrent le plus de retombées économiques pour le Québec en matière d’emplois et de technologie.

Les réseaux municipaux

Il y a neuf réseaux municipaux et une coopérative qui achètent l’électricité d’Hydro-Québec et la redistribuent à 156 000 clients.

La liste : 
Alma
Amos
Baie-Comeau
Coaticook
Joliette
Magog
Saguenay
Sherbrooke
Westmount
Coopérative Saint-Jean-Baptiste

Quatre de ces réseaux sont propriétaires de centrales hydroélectriques, soit ceux de Coaticook, Magog, Saguenay et Sherbrooke.

Achats annuels d’électricité

4,5 térawattheures ou 250 millions de dollars

Source : Association des redistributeurs d’électricité du Québec