Il existe 719 mines souterraines en activité sur l’ensemble du globe, et l’entreprise technologique montréalaise Newtrax, fondée en 2008, a implanté ses solutions de sécurité et de productivité dans 98 d’entre elles.

Son objectif est de se retrouver d’ici trois ans au cœur des activités de 400 mines souterraines à l’échelle mondiale. Newtrax s’est classée l’an dernier au 166e rang des 500 entreprises de technologie avec la croissance la plus rapide en Amérique du Nord, selon le palmarès Fast 500 de Deloitte, et son PDG a résolument décidé de garder le pied sur l’accélérateur.

Le Québec a acquis au fil des ans une expertise réelle dans le domaine minier. Est-ce pour cette raison que vous avez décidé de développer des technologies spécifiques à ce domaine d’activité ? Aviez-vous des affinités avec la géologie ?

Pas du tout. En 2001, j’étais finissant en génie électrique de l’Université McGill et en compagnie de quelques collègues, on a lancé une entreprise qui utilisait les réseaux de capteurs sans fil pour retrouver de la marchandise volée.

Puis on a développé une technologie pour le transport des marchandises et une autre pour la surveillance des frontières. On développait des projets, mais pas de produits.

Puis, un professeur de l’Université du Québec en Abitibi nous a suggéré d’appliquer nos technologies au secteur minier. En 2008, on a développé des solutions qui permettaient de mieux monitorer les travaux qui se réalisaient au cœur de la mine, là où les télécommunications sont impossibles.

On a eu une première commande d’une société minière du Chili, et c’est comme ça qu’est née Newtrax.

Qu’est-ce que vous apportiez de neuf à cette industrie qui avait jusque-là toujours opéré de façon plutôt traditionnelle ?

Les gestionnaires ne savaient pas ce qui se passait dans la mine en temps réel. Ils avaient un rapport lorsque les travailleurs ressortaient après leur quart de travail. C’est tout.

Ils n’avaient aucune idée de ce qui se passait avec les machines, avec les travailleurs, ni avec l’environnement dans lequel les gens opéraient. On leur a apporté la lumière, rien de moins.

On a développé des systèmes qui permettent d’évaluer en temps réel la stabilité du sol, la qualité de l’air et le niveau d’eau, grâce à des capteurs que l’on installe dans la mine souterraine.

On a aussi développé des capteurs qui permettent de mesurer le travail des machines, de connaître le métrage réalisé par les foreuses, le tonnage que déplacent les camions.

On a équipé les travailleurs d’une puce qui leur permet d’être localisés partout où ils sont dans la mine et d’être détectés dans les angles morts par les tracteurs.

On donne aux gestionnaires de mines des solutions qui leur permettent de mieux planifier la maintenance de leurs équipements, d’augmenter la productivité de leurs opérations tout en assurant la sécurité des travailleurs.

Vos solutions ont obtenu un bon accueil des grandes sociétés minières, comme en témoigne la forte augmentation de vos revenus au cours de la dernière année. Où en êtes-vous dans votre développement ?

En 2008, on était huit employés, dont les deux fondateurs, Vincent Kassis et moi-même. On a obtenu notre premier gros contrat avec le producteur mexicain Fresnillo, le plus gros producteur d’argent au monde, et depuis, les affaires n’ont jamais cessé de progresser.

On est rendu à 120 employés, dont 75 travaillent à notre siège social de Montréal à développer nos solutions technologiques existantes et de nouvelles.

On fait assembler nos systèmes par trois entreprises de la région montréalaise et on fait l’installation et la formation sur place dans les mines souterraines.

On prévoit embaucher cette année 40 personnes, dont la moitié à Montréal et l’autre moitié dans nos 6 bureaux de Vancouver, Santiago, Londres, Johannesburg, Moscou et Perth.

Nos clients sont les grands producteurs d’or, d’argent et de nickel du monde entier. Ce sont des sociétés inscrites à la Bourse qui sont soucieuses de leur productivité et de la sécurité de leurs opérations.

Nos systèmes sont installés dans 98 mines souterraines et on prévoit être présents dans 400 mines d’ici trois ans, notamment parce qu’on vient de signer une entente avec la société Sandvik, le plus gros fabricant au monde d’équipements pour les mines souterraines.

Sandvik est présente dans les 719 mines en activité et on va devenir le système nerveux de ses machines. Ça nous ouvre des perspectives incroyables. On a réalisé des ventes de 45 millions en 2018 et on prévoit atteindre les 100 millions d’ici trois ans.

Comment assurez-vous le financement de votre développement ? Avez-vous ouvert votre capital à des groupes financiers ?

On a financé notre développement à partir des ventes que l’on réalisait. On a aussi reçu un bon coup de pouce de l’investisseur Robert Brouillette, fondateur de la firme d’avocats BCF et ange financier reconnu, qui nous accompagne encore aujourd’hui.

On a accueilli un nouvel actionnaire en 2014, lorsque le fonds minier australien Ressource Capital Fund a lancé un fonds de technologies minières qui a pris une participation de 30 % dans Newtrax.

Quelle sera la prochaine étape dans le développement de Newtrax ?

On est déjà dedans. Nos solutions technologiques génèrent des quantités d’informations et on va en générer encore davantage en raison de notre association avec Sandvik et de sa plateforme de numérisation des opérations minières.

On a créé un partenariat avec l’Institut de valorisation des données IVADO pour développer l’apprentissage automatique, nos équipements vont devenir plus performants encore.

On a mis le pied dans la porte. On ne fait aucun revenu pour l’instant, mais on est convaincus que l’intelligence artificielle va amener plus loin nos techniques et nos solutions minières.