Après une quinzaine d’années à décortiquer des états financiers pour aider les investisseurs à dénicher des occasions de placement, l’analyste Martin Landry, de la firme Valeurs mobilières GMP, est devenu cadre dans le secteur de la marijuana.

Celui dont le travail a souvent été reconnu et récompensé occupe depuis ce matin le nouveau poste de chef du développement et de la stratégie d’entreprise chez Neptune, un fournisseur lavallois de produits à base de cannabis. Entretien.

Pourquoi avoir pris cette décision ?

Je suis prêt pour un nouveau défi. Ça fait 15 ans que je travaille dans les marchés des capitaux. Je souhaitais développer mon expertise opérationnelle. Je suis classé numéro un au pays depuis quelques années pour les titres de petites capitalisations et de situations spéciales, et numéro un cette année dans les soins de la santé, selon la firme Brendan Wood. Je suis l’évolution de l’industrie du cannabis depuis ses débuts en 2013 et j’ai récemment produit un rapport de recherche sur les extracteurs qui m’a permis de prendre contact avec Neptune.

Comment allez-vous aider Neptune ?

Je crois pouvoir apporter beaucoup de valeur avec mon Rolodex pour les aider à accélérer leur croissance. Les extracteurs sont moins connus du public et gagnent à l’être. Il y aura peut-être une surcapacité de production en ce qui concerne la fleur, mais les extracteurs ne seront pas affectés par cette dynamique de marché. Au contraire, ça fera peut-être en sorte d’abaisser leurs coûts d’approvisionnement. Les extracteurs sont très bien positionnés pour les prochaines années. C’est tôt dans leur stade de développement. La demande pour les services d’extraction va exploser avec l’arrivée des produits dérivés comme les boissons, vaporisateurs, etc.

Quel a été votre meilleur coup en carrière ?

Je pense que c’est ma recommandation d’achat sur Canopy. J’ai amorcé la couverture alors que le titre valait 1,80 $. Il est à 60 $ quatre ans plus tard. C’est dur de battre ça.

Quel a été votre pire coup ?

Il y en a plusieurs. Ma première recommandation d’achat alors que je travaillais chez Desjardins a été Garda. L’entreprise a eu des problèmes d’endettement et l’action est rapidement passée de 10 $ à 2 $. Il y a aussi eu GLG Life Tech, un fabricant de sucre non calorique à base de plante. C’était ma première recommandation à mon arrivée chez GMP. L’action est vite passée de 10 $ à 1 $. On voyait énormément de potentiel, mais l’exécution n’était pas au rendez-vous. Je peux me permettre d’en rire, car personne ne frappe pour 100 % à la Bourse. Il suffit d’apprendre de ses erreurs et de ne pas les répéter.

Quelle est la plus belle entreprise que vous avez suivie ?

Sans aucun doute, la plus belle est Couche-Tard. Les synergies que cette entreprise extrait de ses acquisitions sont sans égales au pays. En moyenne, Couche-Tard augmente le bénéfice d’exploitation des entreprises acquises de 40 % à 50 %. C’est phénoménal. C’est rendu le plus gros client d’Exxon et de Shell dans le monde. Leur pouvoir d’achat est énorme. Et ce qui est intéressant, c’est que Couche-Tard peut prendre de l’expansion mondialement. Un dépanneur au Mexique, en Chine ou en Allemagne vend la même chose : bouteilles d’eau, Pepsi, bière, chocolat, etc. Les mêmes fournisseurs partout. Tu peux aller chercher des économies de volume. Le modèle d’affaires est fantastique.

Qui est le meilleur PDG que vous avez rencontré ?

Ce qu’Alain Bouchard a bâti avec Couche-Tard est impressionnant. Mais je dirais Bruce Linton, de Canopy, en raison de sa vision. On peut mesurer sa performance avec d’autres entreprises qui ont obtenu leur licence en même temps que lui. Ces entreprises ne valent aujourd’hui que des fractions de la capitalisation boursière de Canopy. On peut donc comparer des pommes avec des pommes. On peut voir qu’il a surperformé de façon magistrale ses concurrents. Il a créé énormément de valeur pour ses actionnaires.

Quel est le secret de votre succès ?

Le travail. J’ai toujours eu comme approche que les gens veulent mon poste. Si je ne donne pas tout ce que j’ai, je vais me faire remplacer. J’ai toujours eu un petit côté enquêteur. J’ai toujours voulu creuser, parler aux concurrents et appeler d’anciens employés pour forger ma propre opinion. On appelle ça des « channel checks » dans le jargon.

Qui est Martin Landry ?

Âge : 42 ans Lieu de naissance : Thetford Mines Études universitaires : Concordia Expérience : analyste chez GMP (2011-2019), analyste chez Desjardins (2008-2011), analyste chez BMO (2005-2008) Spécialités : petites et grandes capitalisations dans le secteur de la consommation et du commerce de détail Entreprises suivies durant sa carrière d’analyste : Couche-Tard, Gildan, Saputo, BRP, Transat, Mega Brands, Marché Goodfood, Lunetterie New Look, etc.