Coup sur coup, le mois dernier, Nathalie Bernier a été nommée chef de la direction financière de l'année à la soirée des As de la finance, organisée par la section québécoise de la Financial Executives International of Canada (FEIC), et chef de la direction financière canadienne de l'année par la même organisation à l'échelle nationale. Une première dans l'histoire.

Un honneur qui n'a pas laissé indifférente la lauréate, qui agit à titre de première vice-présidente, planification stratégique et d'affaires, et chef de la direction financière d'Investissements PSP, le gestionnaire des caisses de retraite des fonctionnaires fédéraux, qui est établi à Montréal et qui gère des actifs de 150 milliards.

« J'ai été honorée, mais ça m'a aussi permis de remercier l'équipe avec qui je travaille et qui a permis à notre organisation de se démarquer », m'explique Nathalie Bernier, qui s'est jointe à Investissements PSP il y a trois ans à titre de chef de la direction financière.

Si Nathalie Bernier a obtenu cette double nomination, c'est parce qu'elle incarne le modèle évolutif de ce que doivent devenir aujourd'hui les chefs de la direction financière des grandes entreprises.

« On m'a choisie parce que je ne suis pas seulement responsable du processus fiduciaire dans notre organisation. Je ne m'occupe pas que de conformité et d'information financière et c'est la tendance d'impliquer davantage les chefs de la direction financière dans la définition des grandes orientations des organisations.

« Je joue un rôle plus stratégique et transformationnel et c'est pour cette raison qu'on m'a embauchée, il y a trois ans, parce qu'Investissements PSP devait solidifier ses fondations et se transformer », explique la gestionnaire.

UN FONDS EN TRANSFORMATION

Investissements PSP a été mis sur pied en 2000 avec le mandat de faire fructifier la caisse de retraite des fonctionnaires fédéraux. Chaque année, le fonds obtient une contribution de 5 milliards de ses déposants, mais d'ici 10 ans, les sorties de fonds dépasseront les dépôts et il faut donc s'assurer de livrer les bons rendements.

« On enregistre une bonne performance. L'an dernier, on a réalisé un rendement de 12,8 % et sur 10 ans, on a généré 20 milliards de plus que l'objectif que nous avait fixé le gouvernement fédéral. » - Nathalie Bernier

« Mais il fallait opérer un changement de culture, revoir nos stratégies d'investissement, notamment dans le domaine des placements privés. On a aussi créé un département de dette privée qui a nécessité l'ouverture de deux bureaux à l'étranger, un à New York et un autre à Londres », expose Nathalie Bernier.

La gestionnaire a participé à ce remue-ménage, orchestré par l'ex-PDG André Bourbonnais qui est allé la chercher chez KPMG pour l'aider à réaliser la transformation qui a néanmoins entraîné le départ de plus de 80 cadres de l'organisation.

Il fallait faire des transformations, explique Mme Bernier, et il y a en qui préfèrent le statu quo. Certains ont décidé de partir, d'autres ont été remerciés. Du sang nouveau a été injecté, et Investissements PSP estime que le processus arrivera à terme d'ici 2021.

« On voulait conserver la culture entrepreneuriale qui existait, mais la rendre plus collective. Il fallait simplifier les processus décisionnels et assurer une meilleure gestion de talents pour mieux travailler avec nos partenaires et pouvoir recruter à l'étranger.

« On veut aussi devenir plus efficaces au niveau opérationnel en intégrant mieux les nouvelles technologies », explique Nathalie Bernier.

LE RÔLE CHANGEANT DES DIRECTIONS FINANCIÈRES

Il est dans l'ordre des choses que les chefs de la direction financière (CDF) soient davantage impliqués dans les processus de transformation stratégique de leur organisation, estime Nathalie Bernier.

« On connaît tous les projets, on a, au même titre que les PDG, une vue transversale de nos organisations. On a beau être perçus comme des chiens de garde, on est pleinement en mesure de faire de la planification stratégique avec des indicateurs de performance financiers bien définis », soumet la gestionnaire.

Nathalie Bernier est aussi d'avis qu'Investissements PSP devait mieux se définir dans le paysage financier canadien.

« On est vus par plusieurs comme la Caisse de dépôt du fédéral. Pour la gestion de talents, on a besoin d'une personnalité mieux ancrée.

« On aura bientôt 200 milliards d'actifs sous gestion. On est un joueur important avec notre siège social et opérationnel à Montréal et nos deux bureaux à l'étranger qui emploient 800 personnes », soumet la CDF.

LE PARCOURS DE NATHALIE BERNIER

Après des études en comptabilité à l'Université McGill, Nathalie Bernier a fait carrière durant 30 ans au sein de grandes entreprises de conseil en management. D'abord durant une quinzaine d'années chez Arthur Andersen, où elle s'est occupée de vérification et de fiscalité pour des grandes entreprises des secteurs des technologies, des communications et des médias.

Elle a par la suite été recrutée par le bureau KPMG, où elle a oeuvré durant une autre quinzaine d'années et est devenue la première femme associée du bureau au Canada. « Une fois mon mandat d'associée terminé, je suis restée chez KPMG pour accompagner durant deux ans beaucoup d'entreprises à réaliser des acquisitions à l'étranger. C'est à ce moment, il y a trois ans, que je me suis jointe à Investissements PSP à titre de chef de la direction financière, une CFO un peu atypique », rappelle-t-elle.

Présidente du conseil d'administration de Centraide Montréal et trésorière de la Chambre de commerce de Montréal, Nathalie Bernier conseille d'ailleurs à ses pairs de s'impliquer à l'extérieur de leur entreprise, d'aller chercher des expériences, des rôles de leadership et des modèles stratégiques qui pourront leur servir dans leur propre organisation.