L'objectif de Québec de bloquer les sites de jeux de hasard illégaux se heurte à de nouveaux obstacles. Un regroupement d'entreprises de télécommunications s'est tourné vers les tribunaux, hier, dans l'espoir de bloquer cette démarche.

Sans faire trop de bruit, Québec a adopté en mai dernier le projet de loi 74, qui donnera à Loto-Québec le pouvoir de dresser une liste des sites considérés comme « illégaux ».La province pourra ensuite obliger les fournisseurs de service internet - comme Bell et Vidéotron - à en bloquer l'accès, à défaut de quoi ils s'exposeront à de lourdes pénalités.

Or, l'Association canadienne des télécommunications sans fil (ACTS) conteste « la validité, l'applicabilité et le caractère opérant » d'un article de la nouvelle loi, devant la Cour supérieure du Québec. En gros, l'ACTS accuse Québec de vouloir s'immiscer dans une réglementation de compétence fédérale.

« Cet article empiète de façon importante sur les éléments essentiels des compétences législatives fédérales exclusives [...], notamment la gestion et l'exploitation des réseaux, ainsi que sur la transmission et la réception des communications », souligne la requête déposée hier.

PÉNALITÉS DE 100 000 $

L'ACTS estime en outre que la confection d'une liste de sites illégaux par Loto-Québec « sera un exercice purement arbitraire, n'étant encadré ni par la loi ni par un règlement ». Le refus de bloquer un site pourra valoir une amende de 100 000 $ aux fournisseurs de service internet.

Comme il y a plus de 2000 sites de jeux d'argent actifs au Canada, les amendes potentielles atteignent un total de 200 millions de dollars, souligne la requête. Notons que certains sites pourraient être intégrés à la plateforme web Espacejeux, propriété de Loto-Québec, après une négociation avec la société d'État.

QUÉBEC SE DÉFEND

Ce n'est pas la première fois que le projet de loi 74 soulève l'indignation. Il y a deux semaines, le Centre pour la défense de l'intérêt public a déposé une requête au CRTC dans l'espoir de faire déclarer cette loi inconstitutionnelle.

Au cabinet du ministre des Finances, Carlos Leitao, on indique que le CRTC a été informé « en amont » de la démarche de Québec. « Nous avons l'assurance raisonnable que nous agissons dans le respect de notre juridiction afin de mieux protéger le consommateur et de lutter contre les risques du jeu pathologique », a fait valoir hier une attachée de presse.

Chez Loto-Québec, le porte-parole Patrice Lavoie a quant à lui affirmé hier que l'ACTS « a droit à son opinion », en refusant toutefois de commenter le contenu de la requête.

M. Lavoie a du même souffle tenu à défendre la loi 74, qui « permettra à la fois de protéger les Québécois qui jouent en ligne sur des sites illégaux non encadrés et aussi de récupérer des revenus qui échappent à l'ensemble des Québécois ».

Quoi qu'il advienne, les changements prévus par Québec ne devraient pas être implantés avant 2018.