Les prêts accordés par les banques chinoises ont nettement fondu en décembre, les établissements se montrant réticents à prendre des risques, mais l'ensemble du volume de crédit dans le pays a cependant fortement gonflé grâce à l'essor des obligations d'entreprises et de la «finance de l'ombre».

Les établissements bancaires ont accordé 598 milliards de yuans (83,4 milliards d'euros) de nouveaux prêts le mois dernier, contre 709 milliards de yuans en novembre, a annoncé vendredi la banque centrale (PBOC). C'est quasiment moitié moins qu'en septembre, et très en deçà de la prévision des analystes sondés par Bloomberg News.

De tels chiffres suggèrent «que les banques commerciales sont toujours très réticentes à accorder des prêts, en raison de l'accroissement des risques de crédit» face aux menaces de défauts de paiement dans une conjoncture économique morose, a expliqué Li-Gang Liu, analyste de la banque ANZ.

Les grandes banques privilégient les prêts aux grands groupes étatiques plutôt qu'aux petites et moyennes entreprises du secteur privé.

Et ce même si la PBOC a abaissé à six reprises en l'espace d'un an ses taux d'intérêt, tout en réduisant continûment les ratios de réserves obligatoires imposés aux établissements pour les encourager à prêter davantage.

Mais cet assouplissement a au contraire encouragé d'autres sources de financement.

Ainsi l'agrégat appelé «social financing», une mesure large du crédit incluant les financements disponibles en dehors des banques via divers mécanismes, a bondi à 1820 milliards de yuans (254 milliards d'euros) contre 1020 milliards le mois précédent.

C'est sa plus forte progression mensuelle depuis juin, et très au-delà des 1150 milliards qu'anticipait le marché.

En particulier, le financement des entreprises par des émissions d'obligations a grimpé de plus de 470 milliards de yuans, ce qui suggère un recours accru aux marchés de capitaux, relève ANZ, notamment de la part des promoteurs immobiliers, aux besoins pressants de liquidités face à l'essoufflement de leur secteur.

D'après les données de Bloomberg, les obligations émises par les entreprises chinoises sur l'ensemble de 2015 ont grimpé à 8100 milliards de yuans, soit une hausse de 34 % sur un an.

La «finance de l'ombre» s'est également «significativement renforcée», abonde Yang Zhao, expert de Nomura. La formule se réfère aux officines de crédit informel non réglementées, dont l'essor a encouragé ces dernières années une envolée de l'endettement dans le pays.

Sur l'ensemble de 2015, le «social financing» a cependant légèrement reculé, avec un total de 15 410 milliards de yuans (2150 milliards d'euros), selon l'agence Chine nouvelle, en dépit d'une remontée sensible des prêts bancaires sur l'année.

Selon Yang Zhao, le volume de crédit dans son ensemble reste «robuste», ce qui pourrait refléter un sursaut des investissements dans les infrastructures, à la suite des mesures de relance budgétaire (accroissement des dépenses publiques) engagées par Pékin pour enrayer le vif ralentissement de la deuxième économie mondiale.

En revanche, les vives fluctuations des Bourses locales «ne devraient pas pénaliser la capacité des entreprises à emprunter, car les marchés d'actions ne sont pas en Chine une source de financement majeure», observait de son côté Julian Evans-Pritchard, du cabinet Capital Economics.

Nomura se montrait toutefois prudent: «cette stabilisation (de la conjoncture) pourrait être seulement temporaire, car les problèmes structurels continuent de peser, comme les sévères surcapacités industrielles et la surabondance de l'offre dans le secteur immobilier».

La croissance du PIB chinois pourrait être tombée en 2015 à son plus bas niveau depuis un quart de siècle, selon les estimations du marché.