Le vérificateur Deloitte et Touche a eu sa part de responsabilité dans les pertes de centaines de millions de dollars essuyées par les créanciers du producteur de théâtre torontois Livent, dirigé par le fraudeur Garth Drabinsky, a confirmé vendredi la Cour d'appel de l'Ontario.

Le plus haut tribunal de la province a ainsi maintenu le jugement de première instance qui condamnait la firme d'experts-comptables Deloitte et Touche à verser 85,6 millions $ - 118 millions $ en comptant les intérêts.

Les tribunaux concluent que la firme a fait preuve de négligence en ne détectant pas, avec le temps, les gestes frauduleux posés par Drabinsky et son partenaire d'affaires, Myron Gottlieb, dans les années 1990, alors que ces procédés étaient pourtant assez évidents.

Dans un jugement écrit d'une centaine de pages, la Cour d'appel estime que Deloitte savait que Drabinsky et Gottlieb étaient des entrepreneurs énergiques qui tournaient les coins ronds en matière de finances et de comptabilité.

Un examen «diligent et objectif» des états financiers de la compagnie aurait permis de découvrir la fraude, selon la cour.

Sous la gouverne du flamboyant Drabinsky, la compagnie Livent a produit des spectacles très populaires sur la scène d'Amérique du Nord, comme Le Fantôme de l'opéra, Show Boat ou Le Baiser de la femme-araignée. Mais cet énorme succès cachait des tours de passe-passe comptables - manipulation des états financiers, pots-de-vin et ristournes, dépenses fantaisistes.

Le pot aux roses a été découvert en 1998 par de nouveaux administrateurs, et Livent a fait faillite en quelques mois, faisant perdre aux investisseurs et aux banques quelque 500 millions $. Drabinsky et Gottlieb ont été plus tard condamnés à la prison pour fraude et contrefaçon.

Puis, au nom des créanciers, le syndic de faillite a poursuivi Deloitte et Touche, auditeur institutionnel de Livent de 1989 à 1998.