La justice genevoise, qui a ouvert en février 2015 une enquête contre la Banque HSBC (Suisse) dans l'affaire dite SwissLeaks, un vaste scandale de fraude fiscale et blanchiment d'argent, a préféré conclure un accord financier avec l'établissement, plutôt que de se lancer dans un long procès.

Au cours d'une conférence de presse organisée jeudi à Genève, le procureur général Olivier Jornot a déclaré que la procédure pour blanchiment était «close» et que la banque avait accepté de payer une «contribution volontaire de 40 millions de francs suisses» (environ 54 millions de dollars).

«Il s'agit, a indiqué M. Jornot, de la somme la plus élevée jamais encaissée par le canton de Genève dans une affaire judiciaire».

«Après avoir analysé l'ensemble des aspects de son instruction, le Ministère public genevois a décidé de classer la procédure à l'encontre de la Banque HSBC Private Bank (Suisse) SA, moyennant versement par cette dernière de la somme de 40 millions de francs en faveur de l'État de Genève», a indiqué le magistrat.

Le Ministère public a ouvert une enquête pénale contre la Banque HSBC Private Bank (Suisse) pour blanchiment d'argent aggravé en février dernier et a perquisitionné les locaux de la banque à Genève.

«Beaucoup de faits concernaient des anciens clients, dont les comptes étaient clôturés, il est difficile de mettre en évidence des actes de blanchiment international», a déclaré Yves Bertossa, premier procureur du canton, ajoutant également qu'il était «difficile de récolter des informations», à l'étranger.

Parallèlement, la banque «a rapidement accepté d'entrer en matière sur le versement d'un montant destiné à réparer les actes illicites commis en son sein par le passé», ont ajouté les magistrats pour expliquer les raisons de l'accord financier conclu.

Le Ministère public a en conséquence décidé de classer la procédure moyennant versement par HSBC Private Bank (Suisse) SA de cette somme.

Le Ministère public s'est déclaré satisfait de cette solution, qualifiée de «bon deal», car elle permet à l'État de Genève d'obtenir une importante contribution financière, «largement supérieure à l'amende encourue par la banque tout en évitant les aléas d'une procédure longue et complexe».

Interrogé sur les raisons pour lesquelles la banque a accepté de payer une telle contribution au lieu de l'amende encourue, le procureur a répondu que l'amende aurait été très certainement assorties d'autres pénalités financières très élevées.

Il a cependant ajouté que les efforts constatés dans le fonctionnement de la banque ne pourraient plus être invoqués pour une éventuelle nouvelle affaire. «Cette excuse ne fonctionnera qu'une seule fois», a-t-il averti.

La Banque HSBC (Suisse) a réagi pour sa part à cette décision de justice en indiquant que ces 40 millions visaient à compenser «les défaillances organisationnelles du passé, et qu'il ne s'agit pas d'une reconnaissance de culpabilité».

«Dans les dernières années, la banque a entrepris une transformation radicale, et a mis en place de nombreuses initiatives pour empêcher que ses services soient utlisées à des fins d'évasion fiscale ou de blanchiment d'argent», a-t-elle indiqué.

L'accord annoncé jeudi ne «concerne que la banque et pas les anciens employés», a précisé M. Jornot, en référence notamment à l'ancien patron de la division Medis (Méditerranée Israël) Judah Elmaleh, aujourd'hui en fuite en Israël.

Le scandale SwissLeaks avait été révélé le 9 février par un consortium de journaux internationaux et un ex-informaticien français de l'établissement genevois, Hervé Falciani, a été à l'origine des révélations.

Ces journaux ont étudié pendant des mois les données volées en 2007 par Hervé Falciani, qui leur avaient été transmises par un informateur sur une clé USB.

Ces données ont révélé qu'au cours de novembre 2006 et mars 2007, des milliards de dollars appartenant à plus de 100 000 clients et 20 000 personnes morales ont transité sur les comptes de la banque en Suisse, dissimulés derrière des sociétés-écran ou des structures offshore.

Dès la publication de SwissLeaks, la banque genevoise avait indiqué que ces pratiques dénoncées relevaient du «passé». La banque avait aussi précisé avoir complètement changé de stratégie après 2008, et avoir fait le ménage dans son portefeuille clients.

Dans un communiqué jeudi HSBC Suisse souligne que «l'enquête a établi que ni la banque ni ses employés ne sont suspectés d'un quelconque délit criminel».

Elle ajoute qu'elle a pris de nombreuses initiatives pour que ses services ne soient pas utilisés à des fins de «fraude fiscale». Elle s'est repositionnée sur les marchés clés et a «réduit sa base de clients de près de 70%, passant d'environ 30 000 comptes en 2007 à 10 000 à 2014».