Le géant pétrolier BP a été jugé responsable jeudi aux États-Unis de «graves négligences» ayant conduit à la marée noire de 2010 et il risque de nouveau une lourde amende qui pourrait atteindre 18 milliards de dollars.

Une cour fédérale de Louisiane (sud) a estimé que le groupe britannique avait été «imprudent» dans la gestion de sa plate-forme pétrolière Deepwater Horizon dans le Golfe du Mexique dont l'explosion en avril 2010 a tué 11 personnes et provoqué la plus grande catastrophe environnementale aux États-Unis.

«L'écoulement du pétrole a été le résultat de graves négligences de (BP) et d'une faute délibérée» de sa part, écrit le juge Carl Barbier dans sa décision portant sur le volet civil de cette longue procédure judiciaire.

Selon le jugement qui fustige des décisions «fondées sur le profit», BP est de loin le principal fautif et sa responsabilité dans la catastrophe est évaluée très précisément à 67%.

Celle de la société suisse Transocean, qui était propriétaire de la plateforme, s'élève à 30% tandis que 3% échoient à l'Américain Halliburton, qui avait construit le coffrage du puits au coeur du sinistre.

En conséquence, le magistrat assure que le géant britannique s'expose à des «dommages et intérêts encore plus élevés» qui seront versés aux plaignants parmi lesquels le gouvernement américain et les États de Louisiane et d'Alabama.

«Les conclusions de la Cour sont l'assurance que l'entreprise devra répondre de son imprudence», s'est félicité le ministre de la Justice américain Eric Holder dans un communiqué, ajoutant que le montant maximum des pénalités est fixé par la loi à 18 milliards de dollars.

«Nous sommes persuadés que cette décision dissuadera fortement tous ceux qui seraient tentés de sacrifier la sécurité et l'environnement au profit de la quête des bénéfices», a-t-il ajouté.

BP fait appel

Le groupe britannique a aussitôt réagi en contestant «vigoureusement» le jugement et en annonçant son intention de faire appel.

«La loi est claire: se rendre coupable de négligence grave répond à des critères sévères qui n'ont pas été réunis dans ce cas. BP pense qu'une vue impartiale du dossier ne colle pas avec la conclusion erronée de la cour», a affirmé le groupe dans un communiqué.

Le montant exact des dommages et intérêts dépendra du calcul par la justice américaine du nombre de barils de brut déversés dans le Golfe du Mexique et attribué à BP.

Une nouvelle audience, qui doit débuter en janvier, devra permettre de trancher entre l'estimation initiale de l'État américain (4,9 millions de barils) et celle, bien inférieure, de BP (3,1 millions).

La marée noire de 2010 a déjà coûté très cher au groupe britannique. Après avoir plaidé coupable au pénal, BP avait été condamné à payer une amende record de 4,5 milliards de dollars et avait également dû verser 7,8 milliards de dollars à des particuliers et des entreprises affectées par cette catastrophe.

Le groupe a par ailleurs versé 10 milliards de compensations aux entreprises, particuliers et autorités locales ayant accepté de ne pas porter l'affaire devant la justice et a dépensé environ 14 milliards de dollars pour les opérations de nettoyage des côtes.

Quatre ans après la catastrophe, la faune dans la région continue toutefois de souffrir de la marée noire, les dauphins, les tortues et les thons paraissant particulièrement affectés, avait relevé l'organisation écologiste américaine National Wildlife Federation en avril.

En mars dernier, BP avait décroché une petite victoire en obtenant le droit de briguer à nouveau des contrats fédéraux aux États-Unis dont il avait été exclu en raison de sa responsabilité dans la marée noire.

La levée de cette interdiction, pour le moment provisoire, a constitué un soulagement pour le groupe qui tire plus de 30% de ses bénéfices avant impôts de ses activités américaines.

Le jugement de jeudi a été très mal accueilli à la Bourse de Londres où le titre de BP a chuté de près de 6% à la clôture.