Le FMI a assuré mercredi ne pas avoir de «commentaire supplémentaire» sur la mise en examen de sa directrice générale Christine Lagarde dans l'enquête sur l'arbitrage entre l'homme d'affaires Bernard Tapie et la banque Crédit Lyonnais.

«La directrice générale s'est déjà exprimée sur cette affaire. Elle est maintenant en route pour Washington et informera, évidemment, le conseil d'administration (du FMI) dès que possible», a déclaré le porte-parole du Fonds monétaire international, Gerry Rice, dans un communiqué transmis à l'AFP.

«Jusque-là, nous n'avons pas de commentaire supplémentaire», a-t-il ajouté.

Mise en examen pour «négligence» à Paris, Mme Lagarde a déjà affirmé à l'AFP qu'elle excluait de démissionner du FMI dont elle a pris la tête en juillet 2011 après le départ forcé de Dominique Strauss-Kahn.

Elle a également jugé «totalement infondée» sa mise en cause par la Cour de justice de la République qui l'entendait pour la quatrième fois et qui l'avait déjà placée sous le statut intermédiaire de témoin assisté en mai 2013.

Jusqu'à présent, le conseil d'administration du FMI, qui représente ses 188 États-membres, a toujours exprimé sa «confiance» dans les capacités de Mme Lagarde à assumer «efficacement ses fonctions» en dépit de l'enquête la visant.

Christine Lagarde, dont le sort dépend désormais du Conseil d'administration du Fonds monétaire international, a annoncé elle-même à l'AFP sa mise en examen (inculpation), survenue la veille à Paris. Alors qu'elle était ministre de l'Économie française, elle avait rendu un arbitrage entre l'homme d'affaires Bernard Tapie et la banque Crédit Lyonnais, sujet aujourd'hui à polémique et à enquête judiciaire.

Interrogée par l'AFP pour savoir si elle entendait démissionner du FMI, l'ex-ministre a répondu: «Non». «Je retourne travailler à Washington dès cet après-midi», a-t-elle précisé.

Christine Lagarde avait succédé en 2011 à la tête du FMI à un autre Français, Dominique Strauss-Kahn, emporté par le scandale provoqué par des accusations d'agression sexuelle à New York.

Mme Lagarde a été entendue mardi pendant plus de 15 heures par les magistrats de la Cour de justice de la République (CJR), seule instance judiciaire en France à enquêter et juger les membres du gouvernement pour des faits commis dans l'exercice de leurs fonctions.

«La commission d'instruction de la CJR a décidé ma mise en examen sur le fondement d'une simple négligence», a-t-elle expliqué à l'AFP lors d'un entretien au cabinet de son avocat, Me Yves Repiquet.

Escroquerie en bande organisée

«Après trois années d'instruction, des dizaines d'heures d'audition, la commission s'est rendue à l'évidence que je n'avais été complice d'aucune infraction et a donc été réduite à alléguer que je n'aurais pas été suffisamment vigilante» lors de l'arbitrage en question, a-t-elle ajouté.

«J'ai demandé à mon avocat d'exercer tous les recours contre cette décision que je considère comme totalement infondée», a-t-elle poursuivi.

La sentence arbitrale de 2008 avait octroyé quelque 400 millions d'euros à Bernard Tapie - dont 45 millions d'euros au titre du préjudice moral - pour clore un très long litige qui opposait l'homme d'affaires au Crédit Lyonnais sur la revente du groupe d'équipements sportifs Adidas.

Dans le volet non-ministériel du dossier, cinq personnes ont été mises en examen pour «escroquerie en bande organisée», dont M. Tapie ou encore l'ex-directeur de cabinet de Mme Lagarde à Bercy et actuel PDG de l'opérateur téléphonique Orange, Stéphane Richard.

Les juges cherchent à déterminer si cette sentence est le fruit d'un «simulacre» d'arbitrage organisé avec l'aval du pouvoir de l'époque, sous l'ère du président de droite Nicolas Sarkozy.

Mme Lagarde, qui a toujours affirmé avoir agi «conformément à la loi» dans cette affaire, avait été placée en mai 2013 sous le statut de témoin assisté, statut intermédiaire entre celui de simple témoin et celui de mis en examen.

Jusqu'à présent, l'institution financière internationale a toujours assuré Christine Lagarde de son soutien. Mais une inculpation formelle pourrait changer la donne, même si elle n'est mise en examen pour «négligence», un délit passible d'un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende. Il lui est notamment reproché de ne pas avoir introduit de recours contre l'arbitrage une fois qu'il a été rendu.

Christine Lagarde a toujours revendiqué la responsabilité de l'arbitrage et la décision de renoncer à en demander l'annulation, en invoquant sa volonté de mettre fin à une procédure longue et coûteuse.

Elle a démenti avoir agi sur ordre de Nicolas Sarkozy, qui aurait voulu ainsi obtenir le soutien de Bernard Tapie, ex-ministre de gauche dans les années 1990.