Les ministres des Finances européens, qui se retrouvent lundi et mardi à Luxembourg, vont tenter d'avancer sur le dossier de l'union bancaire qui comporte encore de nombreux points d'achoppement malgré un calendrier serré.

Signe que les priorités ont changé, la réunion de lundi entre ministres de la zone euro ne devrait pas s'appesantir sur la situation des pays sous programme d'aide.

Le premier ministre irlandais, Enda Kenny, a même confirmé samedi soir que son pays devrait sortir à la mi-décembre de son plan de sauvetage assorti d'une aide de 85 milliards d'euros, car elle a retrouvé la croissance et l'accès aux marchés financiers.

Cette bonne nouvelle sur le front de la crise de la dette, et le fait que la question d'une nouvelle aide à la Grèce ne se pose pas das l'immédiat, devrait permettre aux ministres de se consacrer lundi à 17, puis mardi à 28, au mécanisme unique de «résolution» bancaire.

Ce nouveau jalon de l'union bancaire doit permettre de renflouer ou liquider les banques en difficulté sans mettre en danger tout le système, et sans trop solliciter l'argent public. Il concernera les pays de la zone euro et tous les autres membres des 28 qui souhaitent s'y joindre.

Un compromis au niveau des États est nécessaire d'ici à la fin de l'année pour que le texte ait une chance d'être adopté avant la fin du mandat actuel du Parlement européen, qui siégera jusqu'en mars.

Plusieurs problèmes ont été soulevés face à la proposition présentée en juillet par la Commission européenne, en particulier par l'Allemagne.

Le projet prévoit la création d'une autorité de résolution ad hoc. Mais selon les traités actuels, il revient à une institution européenne d'«appuyer sur le bouton» lorsqu'il s'agit de statuer sur le sort d'une banque. La Commission a proposé d'assurer elle-même ce rôle, faute de meilleur candidat. Plusieurs pays, dont l'Allemagne, ne le voient pas d'un bon oeil.

En outre, un récent avis juridique du Conseil juge que l'autorité de résolution ne peut détenir un trop grand pouvoir discrétionnaire concernant le sort des banques.

Ces problèmes devraient être résolus ou faire l'objet de compromis, selon plusieurs sources européennes. L'Allemagne pourrait accepter le rôle dévolu à la Commission sur une base temporaire. À terme, le Mécanisme européen de stabilité (MES) pourrait s'y substituer, comme l'ont proposé la Banque centrale européenne (BCE) et le commissaire chargé des Services financiers, Michel Barnier.

Filet de sécurité

Plus épineuse est la question du financement. Le projet prévoit la création d'un fonds unique de résolution, abondé par le secteur bancaire lui-même. Mais là encore, l'Allemagne tique, préférant un réseau de fonds nationaux.

Il faut aussi définir quelles banques seraient concernées: toutes, ou seulement les plus grosses? Et surtout: qui jouera le rôle de filet de sécurité si le fonds, ou les fonds, qui mettront des années à atteindre leur pleine capacité, ne suffisent pas?

Là encore, le MES semble être le candidat idéal, mais il ne concerne que les 17 et ce sera «compliqué pour les pays hors de la zone euro qui veulent participer au mécanisme», souligne une source européenne.

Le MES pourrait aussi accorder des prêts aux fonds nationaux ou au fonds unique. Des financements provenant du budget européen pourraient être sollicités. Même si l'échéance semble lointaine, «plus on en parle tôt, mieux c'est», estime cette source.

Surtout que la question du filet de sécurité risque de se poser dans un avenir plus immédiat: les banques de la zone euro vont subir dans les prochains mois un passage en revue de la qualité de leurs actifs par la BCE, qui veut établir un diagnostic avant de prendre en charge leur supervision, d'ici un an environ. Parallèlement, l'Autorité bancaire européenne va mener des tests de résistance sur les banques des 28.

Si ces exercices mettent en évidence un besoin de recapitalisation, les banques devront solliciter leurs actionnaires, leurs créanciers, voire leurs déposants dans un ordre qui reste à finaliser. Mais cela risque de ne pas suffire, et il faudra le cas échéant faire appel aux deniers publics.

Dans une lettre adressée mercredi aux ministres européens des Finances, le commissaire aux Affaires économiques, Olli Rehn, a tenu à les rassurer: un éventuel renflouement des banques par des fonds publics ne sera pas comptabilisé dans les déficits et n'obligera donc pas les États à faire des efforts budgétaires supplémentaires.