La facture de l'affaire de la «baleine de Londres» continue de s'alourdir pour JPMorgan Chase, qui va payer 920 millions de dollars d'amende à quatre régulateurs, mais reste la cible d'autres enquêtes.

Dans des accords amiables annoncés jeudi, la banque accepte de payer aux États-Unis 200 millions de dollars au gendarme boursier (SEC), 300 millions au régulateur bancaire (OCC) et 200 millions à la Réserve fédérale (Fed). En Grande-Bretagne, elle versera 220 millions de dollars à l'autorité boursière FCA.

Ces amendes sanctionnent essentiellement des manquements dans les systèmes de contrôle internes de JPMorgan en liaison avec les investissements de la «Baleine de Londres» Bruno Iksil, un trader français de la banque ainsi surnommé à cause de ses énormes positions risquées dans les dérivés de crédit. Début 2012, les traders d'autres banques s'étaient retournés contre lui, forçant JPMorgan à solder ses positions.

Le PDG Jamie Dimon, qui jusque-là avait réussi à faire traverser la crise à sa banque mieux que ses concurrents, avait d'abord évoqué une «tempête dans un verre d'eau». Quelques mois plus tard, JPMorgan avouait toutefois avoir perdu plus de six milliards de dollars.

«JPMorgan a échoué à garder ses traders sous surveillance alors qu'ils surévaluaient un portefeuille très complexe afin de cacher des pertes massives», a indiqué George Canellos, un dirigeant de la SEC.

Le gendarme boursier, qui accusait aussi JPMorgan d'avoir faussé ses résultats du premier trimestre 2012, a obtenu que la banque reconnaisse sa culpabilité, quand les entreprises se contentent souvent dans les accords de ne pas démentir ni avouer les faits.

JPMorgan a salué jeudi dans un communiqué «une étape majeure dans les efforts (...) pour mettre ces problèmes derrière elle», assurant qu'elle «continue de coopérer avec les enquêtes en cours».

JPMorgan toujours pas tirée d'affaire

Bruno Iksil a lui-même obtenu l'immunité en échange de sa coopération avec les autorités américaines. Un de ses subordonnés, le Français Julien Grout, et son supérieur espagnol Javier Martin-Artajo ont en revanche été inculpés par les autorités américaines pour dissimulation des pertes de la banque.

Dans un document boursier séparé, JPMorgan indique aussi que le département de la Justice (DoJ), le régulateur des marchés de produits dérivés (CFTC) et les autorités financières de l'État du Massachusetts (Massachusetts Securities Division) continuent d'enquêter, ce qui pourrait lui valoir des amendes supplémentaires.

La CFTC en particulier l'a informée lundi de son intention de prendre des mesures contre elle, précise la banque.

JPMorgan a parallèlement écopé jeudi de 80 millions d'amendes supplémentaires et de l'obligation de rembourser 309 millions à des clients de sa filiale Chase pour de mauvaises pratiques dans les cartes de crédit.

«Les problèmes régulatoires et légaux vont probablement durer plus longtemps qu'attendu», prévient la société de courtage Sterne Agee dans une note, jugeant toutefois que les coûts associés devraient reculer en 2014 et 2015.

«Nous avons accepté notre responsabilité et reconnu nos erreurs dès le départ, nous en avons tiré les leçons et nous avons travaillé pour les réparer», a assuré jeudi Jamie Dimon, qui avait notamment vu en janvier son bonus réduit de moitié à cause de l'affaire de la baleine.

Les régulateurs, souvent critiqués pour leur manque de réactivité à la crise financière, ont semble-t-il cette fois voulu faire un exemple.

Pour le chef de l'OCC, Thomas Curry, «les amendes de près d'un milliard de dollars et les pertes de plus de 6 milliards (...) servent de rappels importants pour tous les banquiers».

L'amende de la SEC est l'une des plus élevées de l'histoire de cet organisme et «sans précédent» pour des contrôles internes, selon George Canellos.

Joe Rundle, un analyste de la société financière ETX Capital, relativise néanmoins le montant de l'amende «pour une banque d'une capitalisation de 200 milliards de dollars», estimant que «le plus grand dommage est bien sûr pour la réputation de JPMorgan» et de la City de Londres «enlisée dans un scandale financier après l'autre».