Un câblodistributeur peut-il vous imposer des frais supplémentaires sans tenir compte du rabais qu'il vous offre? La Cour supérieure devra trancher cette question à environ 5 millions de dollars dans le cadre d'un recours collectif contre Vidéotron.

Dans ce recours collectif autorisé par la Cour supérieure en avril dernier mais officiellement rendu public à partir d'août, un client de Vidéotron, Charles Girard, se plaint d'avoir payé le coût du Fonds pour l'amélioration de la programmation locale (FAPL) sur le prix courant de son service de câble, sans que l'on tienne compte du rabais mensuel que lui accordait Vidéotron.

En 2009, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) a obligé les distributeurs télé à verser 1,5% de leurs revenus dans un fonds pour soutenir les émissions locales des télés généralistes (ex.: Radio-Canada, TVA, V). Comme la quasi-totalité des distributeurs télé, Vidéotron a refilé à ses clients le coût du FAPL. Le représentant du recours collectif fait toutefois valoir que ces frais supplémentaires (1,5% de la facture au départ, 0,5% actuellement) auraient dû être calculés par Vidéotron sur le montant réel de sa facture (en tenant compte de son rabais mensuel), et non sur le prix courant.

«Refiler un coût supplémentaire aux consommateurs n'est pas illégal. Là où il y a un problème [sur le plan juridique], c'est quand le distributeur fait payer le 1,5% du Fonds sur le prix régulier même s'il offre un rabais au client. C'est injustifié", dit Me David Bourgoin, du cabinet BGA Avocats, qui représente le plaignant Charles Girard dans le cadre du recours collectif contre Vidéotron. Ce recours vise environ 1,5 million d'abonnés. Une somme de 4 à 6 millions de dollars est en jeu, selon Me Bourgoin.

Le câblodistributeur appartenant à Québecor Média estime, au contraire, «s'être conformé aux obligations réglementaires du CRTC» et «avoir informé de façon diligente l'ensemble de ses clients de l'existence de ces frais».

D'autres poursuites en vue

À l'exception de Telus, tous les grands distributeurs télé au Québec (Bell, Vidéotron, Rogers, Cogeco) ont refilé à leurs clients le coût du FAPL depuis sa création en 2009. Sur une facture mensuelle de 61$, le FAPL coûtait environ 91 cents par abonné (lorsque le plein tarif de 1,5% était en vigueur). «Nous n'excluons pas de poursuivre d'autres entreprises de télécoms, mais nous n'avons pas la preuve actuellement qu'elles aient facturé le 1,5% du Fonds sur le rabais», dit Me Bourgoin.

À première vue, d'autres recours collectifs sur la question du calcul du FAPL semblent peu probables. Bell et Rogers disent calculer le coût du FAPL sur le prix réel payé (donc en tenant compte des rabais accordés aux clients), au contraire de Vidéotron. Cogeco n'était pas en mesure de préciser cette information hier.

Après l'avoir créé en 2009 au plus fort de la crise de la télé généraliste, le CRTC a annoncé en juillet 2012 l'abandon progressif de ce fonds de 106 millions par année, qui sera aboli en septembre 2014. Pour sa dernière année, le taux de cotisation au Fonds a été réduit de 1,0% à 0,5% des revenus des distributeurs.

Bell a profité de l'occasion pour cesser d'imposer ces frais à ses clients, tandis que Vidéotron a révisé le montant des frais afin de tenir compte de la diminution de taux.