Grâce à la diminution des emprunts d'infrastructures, à une gestion très serrée de la croissance des dépenses et à un déficit moins élevé qu'anticipé en mars pour 2011-2012, la lourde dette du Québec va augmenter moins vite.

Et l'équilibre budgétaire pourra être rétabli dès 2013-2014.

Ces deux éléments sont de nature à apaiser les inquiétudes des agences de notation et des marchés d'emprunts, après le cafouillage des premières semaines du nouveau gouvernement minoritaire de Pauline Marois, en matière d'annonces budgétaires.

Le budget déposé hier par le ministre des Finances, Nicolas Marceau, maintient aussi le déficit prévu en mars de 1,5 milliard pour l'exercice en cours, malgré les annonces dramatiques de dépassements des dépenses faites il y a quelques mois par le président du Conseil du Trésor, Stéphane Bédard. Les nouvelles taxes sur le tabac et l'alcool de même que la contribution accrue des institutions financières compensent le manque à gagner résultant d'une croissance économique affaiblie.

Une belle superbe

Le budget dissimulait en plus une surprise de taille que M. Marceau ne pouvait s'attribuer: le déficit de 2011-2012 s'élève finalement à 2,63 milliards. En mars, son prédécesseur Raymond Bachand l'avait estimé prudemment à 3,3 milliards, alors que toutes les rentrées de fonds n'avaient pas été encore comptabilisées. Il s'agissait de la troisième année d'affilée où le déficit final était moins élevé que ce qui avait été anticipé. «Pendant les trois dernières années de notre administration, les dépenses publiques étaient sous contrôle», a d'ailleurs tonné M. Bachand.

Ce déficit amoindri de 672 millions aura ralenti d'autant la croissance de la dette.

Dans l'effort de contrôle des dépenses publiques, le ministre Marceau s'engage à limiter à 9,5 milliards par année, au lieu de 11 milliards, les investissements publics en immobilisations.

«Les investissements publics jouent un rôle important, mais nous devons convenir que l'effort consenti par les contribuables québécois a atteint sa limite, a souligné le ministre. C'est maintenant à l'investissement privé de prendre le relais.»

Il a d'ailleurs annoncé plusieurs mesures pour le stimuler.

Ce changement de cap va ralentir l'augmentation de la dette publique. En 2017, la dette brute sera passée de 183,38 milliards à 207,37 milliards. C'est 3,4 milliards de moins que ce qu'avait projeté M. Bachand. Sa taille équivaudra à 51,4% de la taille de notre économie alors que la projection de mars était de 52,1%.

Cette diminution tient compte de la charge exceptionnelle de 1,35 milliard, qui correspond au manque à gagner au poste du dividende versé par Hydro-Québec, en raison de la fermeture de la centrale nucléaire Gentilly-2.

Le Fonds des générations

Malgré des déclarations contraires durant la campagne, le ministre maintient le Fonds des générations consacré à la diminution de la dette. Il en modifie cependant les sources de provisionnement, ce qui aura pour effet d'en ralentir la croissance.

Les redevances hydrauliques y restent réservées. L'abolition de l'augmentation des tarifs d'électricité sur le bloc patrimonial le privera de 315 millions chaque année, à partir de 2015. Ces 315 millions devaient aller s'additionnant jusqu'à 1,2 milliard qui devaient être récurrents par la suite.

Cela sera en partie seulement compensé par l'indexation des tarifs d'électricité, des redevances minières accrues de même que par la nouvelle taxe sur les boissons alcoolisées.

La gestion des dépenses

Cela dit, le retour prolongé à l'équilibre, jumelé à une croissance moins rapide de la dette, repose avant tout sur une gestion très serrée des dépenses.

Dans le Plan budgétaire de M. Bachand, la croissance des dépenses de programmes était limitée à 1,8% l'an prochain. Elle augmentait à 3,0% dès l'année suivante, puis à 3,4% tout en laissant un écart entre revenus et dépenses de 875 millions à résorber.

Le budget Marceau veut comprimer la croissance des dépenses à 2,4% en 2014-2015 et ne les laisse augmenter que de 3,2% par la suite. Résultat: en 2016-2017, les dépenses de programmes devraient avoir atteint 69,6 milliards, soit un demi-milliard de moins que la projection de M. Bachand.

Le ralentissement de la croissance de la dette a aussi pour effet de décélérer son service d'environ 100 millions par année d'ici 2017. Les économies ainsi réalisées permettent de diminuer de moitié l'écart de 875 millions à résorber entre les revenus et les dépenses.

Le ministre se donne en outre les moyens de combler cet écart. Il fait passer de 200 à 400 millions les provisions pour éventualités qu'avait budgétées M. Bachand pour l'an prochain. Par la suite et jusqu'en 2017-2018, la provision est portée à 500 millions. M. Bachand n'en prévoyait aucune.

Les nouvelles taxes ainsi que les efforts additionnels demandés aux sociétés d'État et l'intensification des efforts de lutte contre l'évasion fiscale aident M. Marceau. Ce coussin de 500 millions, s'il n'est pas utilisé, servira à combler à l'écart à résorber.

Il est garant d'un maintien de l'équilibre, si et seulement si les dépenses ne gonflent pas plus vite que prévu et que la croissance, même modeste, se poursuit.