Les Canadiens de 50 ans et moins doivent retrousser leurs manches! Ils devront travailler deux ans de plus avant de toucher la pension de la Sécurité de la vieillesse, a confirmé Ottawa dans son budget, hier.

Entre 2023 et 2029, l'âge officiel de la retraite au Canada passera graduellement de 65 à 67 ans, comme le premier ministre Steven Harper l'avait laissé entendre l'hiver dernier à Davos, en Suisse.

«Il est clair que nous devons intervenir maintenant afin de garantir la viabilité du programme», a déclaré le ministre des Finances, Jim Flaherty.

Avec l'arrivée des baby-boomers à la retraite, les coûts de la pension de la Sécurité de la vieillesse (PSV), de 38 milliards de dollars en 2012, grimperont à 108 milliards en 2030. Mais en repoussant la retraite à 67 ans, Ottawa réalisera des économies de 10%, soit 10,8 milliards par année.

«Le programme aurait pu être viable quand même. Mais le report de l'âge de la retraite a des effets positifs sur la participation au marché du travail et sur l'économie», a commenté Luc Godbout, professeur de fiscalité à l'Université de Sherbrooke.

Il souligne que plusieurs autres pays, comme l'Australie, le Danemark, l'Espagne, les Pays-Bas et l'Allemagne, ont déjà annoncé le report de l'âge de la retraite de 65 à 67 ans pour tenir compte de l'augmentation de l'espérance de vie. Au Royaume-Uni, la retraite passera même à 68 ans en 2025.





Changement progressif

Au Canada, le changement s'appliquera progressivement. Les 4,9 millions de Canadiens qui reçoivent actuellement la PSV ne seront pas touchés, pas plus que les travailleurs qui ont 54 ans ou plus.

Ainsi, un bon nombre de baby-boomers n'auront pas à reporter leur retraite. «Cela pose un problème intergénérationnel, comme dans bien d'autres dossiers», a indiqué François Dupuis, économiste en chef du Mouvement Desjardins.

Par ailleurs, les Canadiens pourront reporter volontairement leur demande de PSV à partir du 1er juillet 2013. Chaque année de report permettra de bonifier leur pension de 7,2%. En patientant jusqu'à 70 ans, ils pourront ainsi gonfler leur pension annuelle de 36% et recevoir jusqu'à 8814$ au lieu de 6481$ à 65 ans. C'est 2333$ de plus par année, à vie.

L'an dernier, Québec avait aussi annoncé des changements au Régime de rentes du Québec (RRQ) pour encourager les gens à travailler plus longtemps. À partir de 2013, la rente pourra être majorée de 8,4% par année, soit de 42% en cinq ans.

Au total, un Québécois qui attend l'âge de 70 ans pour demander ses rentes pourrait toucher des pensions combinées (PSV/RRQ) de 25 000$, au lieu de 18 000$ s'il les touche à 65 ans, comme le démontre le tableau préparé par Stéphane Leblanc, associé fiscaliste chez Ernst&Young.

La grande question: vaut-il mieux attendre jusqu'à 70 ans ou demander sa pension au plus vite?

«Si on pense vivre plus vieux que 83 ans, il serait plus payant d'attendre l'âge de 70 ans pour demander la pension bonifiée. Mais si on meurt avant 83 ans, il aurait été plus avantageux de demander la PSV dès 65 ans», estime Annie Boivin, fiscaliste chez Richardson GMP. Pour la RRQ, le tournant se situe à 81 ans.

Inscription «proactive»

Enfin, Ottawa va mettre en place d'ici à 2015 un mode d'inscription «proactif» à la PSV et au Supplément de revenu garanti (SRG) destiné aux aînés plus pauvres.

«Cela va faciliter la tâche des gens qui arrivent à la retraite», s'est réjoui Stéphane Leblanc. Actuellement, plus de 150 000 Canadiens n'obtiennent pas leur dû. Et ceux qui oublient de réclamer leur PSV ou leur SRG ne peuvent obtenir que 11 mois rétroactivement.