La Cour d'appel a refusé les avances du Conseil du patronat du Québec (CPQ) et rejette sa demande d'intervenir dans un litige opposant la Commission des normes du travail (CNT), la société Nordic et un ex-employé de cette dernière.

Le CPQ estimait pouvoir offrir «une perspective globale» et un «éclairage différent dont cette honorable Cour ne devrait pas se priver» au sujet d'une poursuite que la Corporation de développement Nordic a déposée contre la CNT et Jean-Pierre Lemieux, un ex-employé.

L'entreprise avance que la plainte de M. Lemieux pour salaire et indemnité de congé annuel impayés est abusive et elle leur réclame des dommages punitifs de 10 000$ et le remboursement de ses frais judiciaires. La société estime que M. Lemieux a eu son dû et qu'il se sert des services gratuits de la CNT pour soutenir des prétentions sans fondement.

Le CPQ n'a aucun lien direct avec cette dispute, mais il a tout de même demandé à la Cour d'appel de l'entendre afin de défendre le droit général des employeurs, sans prendre position sur ce cas précis, d'exercer des recours contre les employés et la CNT en cas de plainte abusive, a expliqué le service des communications du CPQ à La Presse Affaires.

Cependant, la Cour d'appel, par la plume de la juge Marie-France Bich, a indiqué que «le [CPQ] ne montre pas en quoi consiste, précisément, la «perspective globale» et l' «éclairage différent « qu'il pourrait apporter à la Cour [...]. Les enjeux sont bien définis, les arguments sont bien expliqués et on ne voit guère ce qu'on pourrait y ajouter», dit-elle dans une décision datée du 1er mars. Qui plus est, ajoute la juge, la requête du CPQ lui a été soumise tardivement.

L'audition devait avoir lieu ce matin, mais des négociations de dernière minute ont convaincu la Cour d'appel de la reporter à octobre dernier, a indiqué Jean-François Pelchat, de la Commission, hier après-midi.

Plainte en mars 2011

La CNT a déposé sa plainte contre Nordic devant la Cour du Québec en mars 2011, après avoir analysé le bien-fondé des prétentions de M. Lemieux. Dans ce genre de dossier, la Commission est le plaignant et le salarié est généralement considéré comme une tierce partie.

Cependant, Nordic a joint à sa défense écrite produite avant le procès une contre-poursuite à l'endroit non seulement du plaignant, la CNT, mais également de M. Lemieux.

La Commission a aussitôt demandé à la Cour du Québec de rejeter la poursuite de Nordic, avant même l'audition du procès, parce que «[...] le salarié Lemieux n'est pas le défendeur en la présente instance [... et que] la demande reconventionnelle [la contre-poursuite] ne peut être logée contre une tierce partie», résume le juge Daniel Dortélus, dans une décision remontant à août 2011.

Toutefois, le magistrat a écarté cette analyse et a maintenu l'action de Nordic.

La Commission s'est rebiffée et a soumis le différend à la Cour d'appel. Dans sa décision accordant le droit à la CNT de lui soumettre la question, en décembre, la cour écrit que la poursuite de Nordic contre M. Lemieux «surprend».

Le tribunal ajoute que l'usage veut que les demandes d'appel d'un jugement qui rejette une requête comme celle de la CNT soient écartées, mais «comme il s'agit d'une question qui touche la mise en oeuvre d'une loi d'ordre public de protection, l'intérêt public mérite que la Cour se penche sur la question...».