L'échéance arrive en 2012. Les parents de Sylvie atteindront alors tous deux 71 ans. Son père, Robert, devra transformer son REER en Fonds enregistré de revenus de retraite (FERR), comme la loi l'y oblige.

Depuis de nombreuses années, Sylvie conseille son père sur les questions financières. «Il n'a pas une grande connaissance des finances», décrit-elle.

Son père s'interroge: «Quels sont ses choix par rapport à ses futurs besoins?»

Ce n'est pas que ses parents s'inquiètent pour leur avenir. «Ils n'ont pas un rythme de vie élevé, décrit Sylvie. Ils ne voyagent pas. Ce sont des gens simples.»

Sa mère, Louise, a travaillé très jeune pour la Ville de Montréal, d'où elle a pris sa retraite il y a presque 20 ans. Elle n'a aucune épargne en REER. «Elle vit de sa rente de retraite, mais elle dépense moins qu'elle reçoit», indique Sylvie.

Ses parents habitent depuis 30 ans un duplex à Montréal, dont ils louent un logement et un studio au sous-sol.

Au milieu des années 90, Robert avait reçu une indemnité de départ au moment de la fermeture de l'usine où il travaillait depuis longtemps. Il a ensuite accepté de petits emplois qui, s'ajoutant aux revenus de location du duplex, ont suffi à ses besoins. Il détient environ 300 000$ en REER. Comment doit-il franchir le cap du FERR?

Un FERR à repasser

Pierre Renaud, planificateur financier principal du Groupe Banque Scotia, a passé en revue pour nous les principales notions du FERR.

En effet, Robert, qui atteindra 71 ans en 2012, devra transférer son REER avant le 31 décembre. Deux choix se présentent à lui. Il peut convertir ses placements en rente, ou encore transformer son REER en FERR.

À défaut, ces sommes seraient présumées extraites du REER, et par conséquent ajoutées aux autres revenus imposables de l'année.

«Nulle raison de craindre ce dernier scénario, nous rassure Pierre Renaud, puisque les institutions financières gèrent cette possibilité en convertissant automatiquement les REER en FERR lorsqu'aucune instruction ne leur est transmise avant le 31 décembre de l'année où le détenteur d'un REER atteint l'âge de 71 ans.»

Mais si Robert veut exercer son libre choix, il n'attendra pas cette échéance. Car il pourrait, en effet, préférer transformer son REER en rente, question de s'assurer un revenu jusqu'à son décès, aussi lointain soit-il.

Il s'agit alors d'utiliser l'argent détenu pour acheter une rente viagère auprès d'une compagnie d'assurance vie. La rente est calculée notamment en fonction de l'espérance de vie du rentier et des taux d'intérêt du marché.

«Présentement, les taux d'intérêt sont bas et il n'est pas propice d'y mettre tous ses avoirs à long terme», prévient cependant notre planificateur.

Pour Robert, mieux vaut convertir le REER en FERR. «Je conseille cette solution, car elle permet de conserver le contrôle sur les placements et les sorties de fonds», exprime Pierre Renaud.

D'ailleurs, rien n'empêchera ensuite Robert, au moment opportun, d'utiliser une partie ou la totalité des fonds détenus en FERR pour acheter une rente viagère.

Les règles fiscales exigent un retrait annuel minimal du FERR dans l'année où le détenteur a 71 ans au premier janvier. Robert atteindra cette échéance en 2013. «Si Robert et Louise étaient d'âges différents, nous pourrions utiliser l'âge du plus jeune comme base du retrait du FERR», souligne au passage M. Renaud.

Mais la question ne se pose pas pour Robert. Il devra retirer en 2013 un minimum de 7,38% de chacun de ses FERR, calculé sur la valeur marchande de ses actifs au 31 décembre 2012. En supposant que cette valeur ait alors atteint 310 000$, il devra encaisser un total d'au moins 22 878$ au courant de 2013.

L'année suivante, le retrait s'élèvera à un minimum de 7,48% du nouveau solde, puis à 7,59% l'année subséquente.

Ce taux de retrait prescrit s'élève graduellement jusqu'à l'âge de 94 ans, à partir duquel il demeure fixe à 20%, de telle sorte que le FERR soit virtuellement épuisé à 100 ans.

«Dans le futur, si le couple a besoin de plus de revenus, un montant au-delà du minimum pourrait être retiré du FERR, car il n'y a pas de limite maximale», rappelle Pierre Renaud. Seuls les REER immobilisés - ils proviennent d'un régime de retraite assujetti à la juridiction fédérale - sont soumis à des plafonds de retraits.

Petite précaution, cependant: l'institution financière qui détient le FERR ne retiendra pas d'impôt à la source sur le retrait s'il s'agit du minimum prescrit.

«Attention à l'impôt en fin d'année, car ce revenu s'ajoute aux autres revenus imposables», prévient notre planificateur. Robert devrait demander à son conseiller de retenir l'impôt sur ses retraits, suggère-t-il, afin d'éviter une mauvaise surprise fiscale en avril.

Dernière bonne nouvelle? Le retrait du FERR n'amputera pas la Pension de la Sécurité de la vieillesse de Robert.

Malgré cet ajout de près de 23 000$, ses revenus individuels n'atteindront pas le seuil de 69 563$ (en 2012), au-delà duquel la PSV commence à être réduite.

LA SITUATION

Robert et Louise auront tous deux 71 ans en 2012. Robert devra transformer son REER en FERR. Il y détient 300 000$ mais n'a jamais puisé dedans. Pour l'instant, ses seuls revenus de retraite sont la RRQ, la PSV, et les revenus de location du duplex qu'il détient avec Louise. Que se passera-t-il?

Les données

Robert, retraité, 70 ans

RRQ: 7800$

REER: 300 000$

Louise, retraitée, 70 ans

Rente de retraite d'employeur: 18 000$

RRQ: 6800$

Aucun REER

Résidence principale: 500 000$, libre d'hypothèque

Aucune dette

L'analyse de Pierre Renaud, planificateur financier principal du Groupe Banque Scotia au Québec.

Dans l'année de son 71e anniversaire, Robert a deux options: transformer son REER en FERR ou le convertir en rente viagère. En raison des bas taux d'intérêt, cette dernière solution est moins opportune. Le premier retrait obligatoire minimal de son FERR, en 2013, s'établira à près de 23 000$. Il ne réduira pas sa PSV.

«Le retrait du FERR pourra faire l'objet d'un partage sur la déclaration d'impôt 2013, tout comme peut déjà l'être la rente de retraite de Louise.»

Photo archives La Presse

Pierre Renaud, planificateur financier principal du Groupe Banque Scotia au Québec.