Les taux des obligations de nombreux pays de la zone euro se sont tendus mercredi, surtout ceux de l'Espagne et l'Italie, un mouvement paradoxal après l'opération de prêt à trois ans de la Banque centrale européenne (BCE), qui a connu un grand succès.

La BCE a alloué dans la matinée 489,191 milliards d'euros à 523 banques de la zone euro lors d'une opération inédite de prêt à trois ans. Les analystes prévoyaient une fourchette large comprise entre 100 et 500 milliards d'euros.

Mais alors que certains estimaient que ce montant permettrait aux banques de racheter des obligations de pays fragiles, les taux d'emprunt sur le marché de la dette se tendaient pour de nombreux pays.

Plusieurs de ces mêmes pays avaient vu avant l'opération leur taux se détendre, comme l'Espagne, pour qui le taux à 10 ans était repassé brièvement dans la matinée sous les 5%, une première depuis octobre.

Vers midi, le taux à 10 ans de l'Espagne montait nettement à 5,234% (contre 5,030% mardi à la clôture) tout comme celui de l'Italie à 6,745% (contre 6,571%).

«On ne peut pas tirer trop d'enseignements», de l'évolution des taux mercredi, estime Cyril Régnat, stratégiste obligataire chez Natixis.

«Il va falloir attendre un peu pour voir les effets bénéfiques sur les obligations» de cette opération, qui est «quand même une très bonne nouvelle», juge-t-il.

La France voyait elle son taux à 10 ans se tendre légèrement à 3,114% (contre 3,092%). En revanche, le rendement des obligations allemandes baissait à 1,931% (contre 1,951%), ces titres jugés les plus solides faisant office de valeur refuge auprès des investisseurs.

Pour l'heure, seules les banques très exposées à la dette périphérique, celles des pays concernés le plus souvent, pourraient acheter des obligations, tandis que les autres pourraient préférer par exemple financer l'économie.

«L'allocation à trois ans du jour est l'équivalent de près d'une fois et demie le programme d'émissions d'obligations de l'Espagne et l'Italie en 2012», commente Martin Van Vliet, économiste chez le bancassureur néerlandais ING.

M. Régnat voyait de son côté un autre facteur qui pourrait expliquer l'évolution des taux mercredi.

«On approche de la fin d'année. Peut-être que certains investisseurs essaient de montrer de beaux bilans et décident de réduire la voilure sur les dettes souveraines», indique-t-il.

Autre nouvelle, les investisseurs ont appris que l'économie italienne s'est contractée au troisième trimestre, le produit intérieur brut (PIB) ayant accusé un repli de 0,2% par rapport au trimestre précédent.

Par ailleurs, sur le marché de court terme, la France voyait son taux d'emprunt à trois mois évoluer en territoire négatif depuis lundi, autour de -0,07%, une première depuis au moins 20 ans selon les données consultées par l'AFP.

Cela signifie que les investisseurs achètent ces titres, dont les taux évoluent en sens inverse du prix, en acceptant le risque d'être moins remboursés à échéance.

Les opérateurs peuvent toutefois espérer les revendre avec bénéfice sur le marché avant l'échéance si les taux baissent encore en raison d'une forte demande.

Hors zone euro, le taux du Gilt britannique à 10 ans baissait à 2,070%, contre 2,093% la veille.

Outre-Atlantique, les rendements des bons américains à 10 ans montaient légèrement à 1,935% contre 1,923%, tout comme ceux à 30 ans à 2,963% contre 2,926%. Les taux à trois mois étaient stables à 0,01%.

Sur le marché interbancaire, l'Euribor à trois mois, principal taux en zone euro, était quasi inchangé à 1,416%, contre 1,418% la veille, tandis que le Libor à trois mois libellé en dollars montait à 0,571% contre 0,570%.