L'agence de notation Standard & Poor's a prévenu mardi qu'elle s'assurera que le sommet européen de la fin de semaine à Bruxelles aura été en mesure de «ramener la confiance», après avoir menacé lundi de dégrader les notes de quinze pays de la zone euro.

«Nous examinerons si les mesures (qui seront annoncées) seront susceptibles de ramener la confiance», a déclaré lors d'une conférence téléphonique Moritz Krämer, responsable des notations des États pour l'Europe de S&P, même si l'agence n'a pas l'intention de «donner des conseils politiques».

C'est en fonction de cette évaluation qu'elle décidera «plutôt tôt que tard» d'abaisser ou non les notes des quinze pays de la zone euro, dont la France et l'Allemagne, deux pays notés triple «A», la meilleure note possible. Le calendrier sera «largement déterminé par ce qui se passera sur le front politique», a expliqué M. Krämer.

Les précédents sommets, a-t-il observé, ont été marqués «par un certain degré d'optimisme» avant de finalement décevoir les attentes.

«Les responsables politiques font de leur mieux» et déploient «une activité intense», a encore estimé Moritz Krämer, mais «la vraie question est: faire de son mieux est-ce suffisant?». Or, les responsables européens «n'en ont pas fait assez dans le passé», a-t-il constaté.

Ce responsable de S&P a précisé que la note du Fonds européen de stabilité financière (FESF), créé l'an dernier pour venir en aide aux pays européens les plus fragiles, serait elle aussi abaissée si celle des pays européens notés triple «A» devait l'être. Ces pays, qui sont la France, l'Allemagne, les Pays-Bas, la Finlande, l'Autriche et le Luxembourg, garantissent «à 100%» le capital du FESF, a-t-il expliqué. Il est donc logique que la note du FESF suive celle des pays qui le garantissent, a ajouté ce responsable.

M. Krämer, interrogé à plusieurs reprises sur le «timing» de la décision de S&P, a défendu celle-ci, assurant que l'agence de notations savait bien sûr qu'un sommet européen était prévu en fin de semaine. Mais, a-t-il réaffirmé, les dirigeants européens ont déçu les attentes à l'issue de leurs précédentes rencontres.

Il a par ailleurs estimé que l'accord obtenu lundi entre la France et l'Allemagne sur une réforme de la gouvernance économique de la zone euro était «prometteur», sous réserve de sa mise en oeuvre par le sommet de Bruxelles, prévu jeudi et vendredi. Mais «il reste encore beaucoup de travail à faire», a-t-il prévenu. Ce sommet est l'occasion pour les responsables européens de «dépasser leurs divergences nationales», a-t-il souligné.

Il a par ailleurs indiqué que les réformes entreprises par chaque pays européen étaient évidemment «très importantes» dans l'appréciation de la notation décidée par S&P, mais que les pays de la zone euro étaient tous liés entre eux dans la crise de la dette et «main dans la main» face à la perspective de voir leur note abaissée ou pas.

La dette de la France est durablement «soutenable» et Paris ne devrait pas rencontrer de difficultés particulières pour la financer sur les marchés, a-t-il également estimé.

Interrogé sur le rôle de la Banque centrale européenne (BCE), que certains analystes considèrent comme seule solution à la crise dans la zone euro, M. Krämer a jugé très «improbable» un scénario de rachat massif de dette des États par l'institution de Francfort. Les Européens peuvent-ils alors se passer de la BCE pour restaurer la confiance et sortir durablement de la crise, «oui, c'est probablement possible, mais ça demande un engagement très important et vous aurez besoin de travailler un peu plus sur le plan budgétaire et de la coordination», a-t-il prévenu.

Cette crise de défiance autour de la zone euro intervient dans un contexte économique difficile avec des perspectives de croissance revues une nouvelle fois à la baisse par S&P à 0,5% en 2012, a-t-il souligné.

Il existe aussi, selon lui, un «besoin important de refinancement du système bancaire» européen avec des échéances très importantes qui arrivent à maturité l'an prochain. La notation des banques européennes sera également revue en cas d'abaissement de la note souveraine des pays de la zone euro, a-t-il encore dit.