La zone euro a entamé vendredi un marathon de plusieurs jours pour tenter de sauver la monnaie unique et restaurer son image, qualifiée de «désastreuse» en raison des divisions persistantes entre Paris et Berlin notamment autour des moyens d'enrayer la crise de la dette.

Les ministres des Finances des 17 pays de l'Union monétaire se sont retrouvés vers 14h00 (08h00 heure de Montréal) à Bruxelles pour préparer le premier sommet européen de dimanche, longtemps considéré comme celui de la dernière chance.

Cette rencontre promet d'être «difficile», a reconnu la ministre finlandaise des Finances Jutta Urpilainen, à son arrivée à Bruxelles. Aucune conférence de presse n'est du reste prévue à l'issue de la rencontre.

L'ampleur de la tâche est considérable face aux clivages entre la France et l'Allemagne. Ces divisions, ainsi que la nécessité de consulter le Parlement allemand sur les mesures envisagées, ont contribué à repousser les annonces tant attendues à la semaine suivante avec un deuxième sommet au plus tard le 26 octobre.

«L'impact à l'extérieur (...) est désastreux» pour l'Europe, s'est inquiété à Bruxelles le chef de file des ministres des Finances de la zone euro, Jean-Claude Juncker. «Nous ne donnons pas vraiment l'exemple éclatant d'un leadership qui fonctionne bien», a-t-il ajouté.

Pour preuve: la Chine a appelé vendredi à une «réforme fondamentale» des finances des pays de l'UE. Et le président américain Barack Obama s'est encore entretenu jeudi par visioconférence de la crise de la zone euro avec le président français Nicolas Sarkozy et la chancelière allemande Angela Merkel.

La France et l'Allemagne sont engagées depuis plusieurs jours dans un bras de fer sur le meilleur moyen de renforcer la force de frappe du Fonds de soutien européen (FESF), un instrument essentiel pour espérer empêcher une contagion de la crise de la dette à des pays comme l'Espagne et l'Italie.

Paris est isolé mais insiste pour transformer le Fonds en banque afin qu'il s'approvisionne auprès du guichet de la Banque centrale européenne (BCE). Berlin refuse cette option qui irait à ses yeux à l'encontre des traités européens.

«Il est clair qu'on s'en tient à ce qui est autorisé par le traité (de l'UE), à savoir que la BCE ne peut être utilisée», a prévenu le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble.

De son côté, son homologue français, François Baroin, a assuré qu'il y avait «une volonté de faire des avancées de part et d'autre».

Mais selon un diplomate européen, Paris n'est toujours pas persuadé du bien-fondé de la solution qui a la préférence de Berlin, à savoir permettre au FESF de garantir une part des titres de dette émis par les pays fragiles, afin d'inciter les autres investisseurs à en acheter.

La France, mais aussi Rome et Madrid, redoutent que cela crée une différence entre des obligations garanties et des obligations non garanties, dont les taux s'envoleraient aussitôt, a expliqué ce diplomate.

Seule lueur d'espoir dans l'immédiat: les ministres de la zone euro devraient donner leur accord de principe vendredi au versement en novembre de la sixième tranche de prêts internationaux prévus pour la Grèce, de 8 milliards d'euros.

«Nous allons nous mettre d'accord au sein de l'Eurogroupe, à tout le moins je l'espère, sur la sixième tranche de l'aide à la Grèce», a affirmé M. Juncker.

Le versement de cette somme, tirée du premier plan de sauvetage de 2010, est vital pour le pays qui risque sinon la cessation de paiement.

Pour l'obtenir, Athènes a adopté jeudi soir de nouvelles mesures d'austérité très contestées dans le pays qui prévoient notamment la mise au chômage technique de quelque 30.000 personnes dans le secteur public.

Mais si le feu vert des Européens semble acquis, celui du FMI est bien moins sûr car des divergences existent sur la santé réelle du pays.

Autre sujet délicat sur la table pour les prochains jours, la question de la recapitalisation des banques en Europe. Les besoins devraient finalement s'élever à entre 80 et 100 milliards d'euros, un chiffre moins important que celui avancé par le FMI, a fait savoir une source européenne.

Reste à définir des modalités: quelles banques seront concernées? quel sera le calendrier? et surtout par quels moyens, les banques vont-elles se recapitaliser?

Les ministres vont également plancher sur une participation plus importante que prévu des banques dans le cadre du second plan d'aide à la Grèce, décidé en juillet. Ils travaillent actuellement sur l'hypothèse d'une réduction de 50% des créances détenues par les banques envers la Grèce, pour soulager le pays, a affirmé vendredi une source européenne proche du dossier.

En juillet, l'effort avait été fixé à seulement 21%.

En attendant les décisions reportées au 26 octobre, une nouvelle réunion des ministres européens des Finances est programmée samedi, avant un tête-à-tête Merkel-Sarkozy samedi soir à Bruxelles en préambule au premier sommet du lendemain.