La Grèce a arraché mardi la promesse du versement en novembre de 8 milliards d'euros de ses créanciers internationaux, ce qui lui permet d'éviter une faillite immédiate et de gagner du temps dans les délicates négociations de restructuration de sa dette à l'intérieur de la zone euro.

La troïka réunissant les créanciers du pays (Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international) a donné son feu vert - sous réserve d'approbation par l'eurogroupe et le conseil d'administration du FMI - au déblocage «début novembre» d'une nouvelle tranche du prêt de 110 milliards d'euros consenti au pays en mai 2010, vitale pour payer fonctionnaires et retraités et éviter la banqueroute.

Le ministre des Finances Evangélos Vénizélos avait indiqué la semaine dernière que le pays pouvait tenir jusqu'à mi-novembre sans nouveau versement.

A l'issue d'un audit entamé début septembre, puis suspendu pour contraindre le gouvernement à un sursaut de rigueur face au dérapage budgétaire constaté, la délégation des créanciers a jugé «essentiel» que les autorités grecques mettent désormais davantage l'accent sur les «réformes structurelles» de réduction du secteur public et de libéralisation de l'économie.

Pour 2011, ils prennent acte du fait que la Grèce, en récession pour la troisième année consécutive, ne pourra pas respecter sa promesse faite en juin de réduire son déficit public à 7,4% du PIB. L'objectif a été relevé à 8,5%.

Pour y parvenir, Athènes a dû empiler dans l'urgence une impopulaire taxe sur l'immobilier, d'autres relèvements d'impôts, des coupes dans les retraites supérieures à 1200 euros par mois, une révision à la baisse de la grille de salaires des fonctionnaires et l'annonce de la mise en chômage partiel de 30 000 salariés d'entreprises publiques d'ici fin décembre.

La troïka a jugé que ces mesures, annoncées depuis septembre dans un climat d'improvisation, «devraient être suffisantes» pour redresser la barre en 2012.

La troïka «exige à la veille du versement de chaque tranche du prêt des décisions changeant de manière dramatique notre mode de vie», protestait mardi le quotidien de gauche Eleftherotypia. «Le septième ou le huitième versement pourrait passer au rouleau compresseur tout ce qui reste encore debout» dans une société grecque exsangue, redoutait le journal.

Pour 2013 et 2014, les bailleurs de fonds ont effectivement demandé de «nouvelles mesures».

Ils insistent sur les privatisations et les réformes visant à briser des corporatismes, telle la libéralisation des taxis et des professions dites fermées comme avocats ou géomètres.

La troïka salue surtout «comme un grand pas en avant» le gel de l'application des conventions collectives aux entreprises, qui ouvre la voie à des réductions de salaire généralisées dans les entreprises privées.

Ceci fait voir rouge à la Confédération européenne des Syndicats (CES ou ITUC en anglais) qui a dénoncé dans un communiqué publié mardi à Bruxelles une «attaque» contre les droits des salariés grecs qui «menace la reprise à long terme de l'économie».

Les centrales grecques ont pour leur part appelé à une grève générale mercredi 19 octobre.

Le ministre des Finances, également engagé sur le front explosif de la restructuration de l'énorme dette grecque qui pourrait subir un effacement de quelque 50%, a de son côté protesté auprès des créanciers de la bonne volonté de son pays à mettre toutes les réformes en oeuvre «avant le sommet européen du 23 octobre».

«Le pas suivant (...) est le lancement de l'application d'un nouveau programme donnant une solution définitive et convaincante au problème de la viabilité à long terme de la dette», concrétisant les promesses européennes du 21 juillet pour un nouveau sauvetage du pays, a ajouté le ministre.

La mouture alors retenue, prévoyant une perte de 21% pour les créanciers privés du pays, est aujourd'hui jugée insuffisante par la zone euro.