Trop chers, les avocats? Plus pour très longtemps. Grâce à un nouveau site Internet, il est maintenant possible de magasiner son avocat...aux enchères!

Michael Deigh, de Montréal, n'aurait jamais cru que trouver un avocat à prix raisonnable pouvait être aussi difficile. Il s'en est rendu compte, il y a quelques semaines, lorsqu'il a eu à en chercher un pour l'aider à faire breveter un nouveau logiciel. Après quelques heures à fouiner sur l'internet, il a rapidement déchanté. Il en a bien repéré quelques-uns, mais la plupart n'étaient pas intéressés par son dossier ou demandaient beaucoup trop cher.

«Juste pour ouvrir un dossier, il y en a un qui m'a demandé 4000$!», dit cet analyste de 55 ans.

Michael Deigh a mis fin à ses recherches lorsqu'un ami lui a parlé de Shpoonkle (www.shpoonkle.com). Ce site au nom qui ne veut rien dire permet aux individus et aux entreprises de publier en ligne leurs offres de mandats juridiques et aux avocats de soumissionner les uns contre les autres pour remporter le contrat. Une sorte de vente aux enchères pour obtenir les services d'avocats à rabais.

«Nous sommes le eBay des services juridiques!», dit le fondateur, Robert Niznik, 21 ans, qui étudie le droit à la New York Law School.

Pour réduire les coûts de justice

Le jeune homme a lancé son site en mars aux États-Unis, convaincu qu'un système mettant les avocats en concurrence directe pouvait aider à réduire les coûts de la justice, la rendant plus abordable et accessible à plus de monde. Déjà, près de 4500 Américains se sont abonnés, incluant avocats, notaires, parajuristes et clients.

La semaine dernière, Shpoonkle a lancé une version canadienne; plus de 250 personnes se sont déjà inscrites. Une version québécoise, en français, devrait être accessible dès la fin du mois.

Il est vrai de dire que la justice coûte cher. Et que peu de gens ont les moyens de se payer un avocat pour aller jusqu'au bout d'un litige. En 2010, le taux horaire moyen était de 317$ pour un avocat avec 10 années de barreau, rapporte le magazine Canadian Lawyer. Une simple poursuite au civil, avec un procès de deux jours, peut coûter jusqu'à 63 000$ en frais juridiques!

Sur le site, l'utilisation est fort simple. Un membre qui cherche un avocat peut le faire par province et choisir parmi une quarantaine de domaines de pratique - droit des affaires, familial, faillite, etc. Il publie ensuite une brève description du mandat et ce qu'il attend de l'avocat ou du notaire.

Des enchères comme sur eBay

Ensuite, automatiquement, le système envoie un courriel à tous les avocats inscrits de la région choisie. C'est à partir de là que les enchères commencent. Les mises peuvent se faire sous la forme de taux horaires, de forfaits, à pourcentage, ou même pro bono (gratuites). Un peu comme sur eBay, les professionnels peuvent voir évoluer les enchères et réajuster leurs mises au fur et à mesure. Seuls les avocats membres d'un Barreau peuvent s'inscrire.

«C'est un outil fantastique», dit Michael Deigh. Sur le site, en quelques lignes, il a pu expliquer ce qu'il cherchait et quel prix il était prêt à payer, soit entre 2000$ et 2500$ pour démarrer le processus. Il n'a eu ensuite qu'à attendre les propositions des avocats. Il en a reçu cinq et retenu deux avocats pour le moment, qui lui ont proposé des tarifs plus bas que prévu.

L'avantage de Shpoonkle n'est pas seulement de trouver un avocat à un meilleur prix. C'est aussi un moyen pour le client de gagner du temps. Car avec ce système, ce sont les avocats qui viennent vers lui et non le contraire.

«On a qu'à attendre que les avocats se manifestent, on n'a plus à chercher pendant des heures parmi des centaines de juristes», explique Robert Niznik.

Pour les avocats, c'est une façon de plus pour faire croître leur clientèle. Adam Eidelmann, du cabinet Gamliel, de Montréal, le pense en tout cas. Cet avocat de 31 ans s'est inscrit sur le site il y a deux semaines. Il a depuis misé sur quelques mandats, dont celui de Micheal Deigh. Et bien qu'il n'ait pas encore remporté de mise, il a l'intention de continuer à utiliser le système.

«Pour un jeune avocat débutant, c'est une bonne façon d'aller chercher de nouveaux clients», dit-il.

Aucune entente initiale publiée sur le site n'est coulée dans le béton. Les parties peuvent changer d'avis tant que rien n'est signé entre eux. Le service est gratuit, autant pour les clients que pour les avocats, Shpoonkle misant sur la publicité pour se financer. À moyen terme, la jeune entreprise a toutefois l'intention de facturer un certain montant aux avocats pour s'inscrire...

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