Heureusement, personne n'a prédit que le Congrès américain adopterait le compromis sur le plafond de la dette américaine dans l'honneur et l'enthousiasme.

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Car c'est plutôt en grinçant des dents que la Chambre des représentants a approuvé lundi soir, par 269 voix contre 161, l'accord trouvé in extremis pour éviter aux États-Unis un défaut de paiement aux conséquences potentiellement catastrophiques.

Les seuls applaudissements entendus sous la coupole du Capitole ont été réservés à la représentante démocrate Gabrielle Giffords, qui a voté en faveur du compromis. Il s'agissait du premier vote de la parlementaire d'Arizona depuis la fusillade de Tucson qui a failli lui coûter la vie en janvier dernier.

Le projet de loi, sur lequel le Sénat doit se prononcer mardi, prévoit un relèvement du plafond de la dette d'au moins 2 100 milliards de dollars et des coupes budgétaires d'au moins 2 100 milliards de dollars sur 10 ans, selon l'estimation du Bureau du budget du Congrès.

L'adoption du texte à la chambre haute ne semble faire aucun doute. Barack Obama aura jusqu'à minuit ce soir pour promulguer le texte. Faute d'un accord à cette heure, les États-Unis n'auraient plus été en mesure d'emprunter pour rembourser les intérêts de leur dette, qui a atteint récemment son plafond de 14 300 milliards de dollars.

Aucune hausse d'impôts

«Les gens à droite sont mécontents. Les gens à gauche sont mécontents. Les gens au centre sont mécontents», a déclaré le chef de la majorité démocrate au Sénat, Harry Reid, faisant référence aux critiques qui ont accueilli le compromis négocié par la Maison-Blanche et les dirigeants républicains et démocrates du Congrès.

Le sénateur du Nevada a néanmoins salué «l'accord remarquable qui protégera la santé de notre économie à long terme».

Le chef de la majorité républicaine à la Chambre, Eric Cantor, a reconnu de son côté que l'accord n'était «pas parfait». Mais il a estimé que son passage contribuera à changer la culture politique à Washington.

«La grande victoire pour nous, et pour le peuple américain, est qu'il n'y a aucune hausse d'impôts dans ce plan. La dernière chose dont nous avons besoin est une hausse d'impôts», a-t-il dit.

Plusieurs démocrates ont évidemment déploré l'absence de hausses d'impôts sur lesquelles Barack Obama avait pourtant insisté à plusieurs reprises. Ils ont également dénoncé la sévérité et l'arbitraire des coupes budgétaires à venir.

«Cet accord est un sandwich de Satan saupoudré de sucre. Si vous soulevez le pain, vous n'allez pas aimer ce que vous allez voir», a écrit sur Twitter le représentant démocrate Emanuel Cleaver, président du groupe des élus noirs de la Chambre.

Le projet de loi prévoit une première réduction des dépenses de 917 milliards de dollars. Sur ce montant, 315 milliards de dollars seraient économisés sur les budgets de la Défense et autres programmes liés à la sécurité. Une commission bipartite de 12 élus serait chargée de déterminer quelque 1 200 milliards de dollars d'économies supplémentaires d'ici le 23 novembre.

En cas de blocage, un mécanisme de réductions automatiques frapperait à parts égales les programmes civils et militaires, à l'exception de la Sécurité sociale et du programme d'assurance maladie Medicaid pour les personnes pauvres.

L'affrontement autour du relèvement du plafond de la dette aura servi à illustrer l'influence des élus républicains affiliés au Tea Party. Certains d'entre eux ont voté contre le compromis, trouvant insuffisantes les coupes budgétaires envisagées. Mais la plupart des commentateurs estimaient que le Tea Party était le grand gagnant du bras de fer des dernières semaines.

Et certains élus démocrates n'ont pas caché leur dépit face à ce triomphe. Le vice-président Joe Biden a notamment retenu l'attention lundi en accusant les alliés du Tea Party d'avoir «agi comme des terroristes» lors d'une réunion à huis clos avec des représentants démocrates.