La zone euro doit impérativement rassurer les marchés financiers sur sa capacité à endiguer la contagion de la crise de la dette, jeudi lors de son sommet, alors qu'un éclatement de l'Union monétaire n'est plus tabou. Voici les scénarios envisageables, du noir au rose:

1 - L'Italie et l'Espagne sont emportées dans la tourmente

- Le sommet n'accouche à nouveau que d'un replâtrage partiel qui ne suffit pas à calmer les marchés survoltés. Les taux d'intérêt pour pouvoir emprunter de la plupart des pays de la zone euro, Allemagne exceptée, grimpent, notamment en Italie et en Espagne. Rome et Madrid sont contraints à leur tour d'appeler à l'aide leurs partenaires européens ainsi que le Fonds monétaire international (FMI) pour obtenir des prêts. Peu après, la Belgique, en pleine tourmente politique, suit à son tour.

- Avec l'Italie et l'Espagne, le défi est autrement plus difficile à relever que pour la Grèce, l'Irlande et le Portugal, qui ne représentent qu'une petite partie de l'économie de la zone euro (3% du Produit intérieur brut européen pour la Grèce). Cela obligerait les autres pays à remettre au pot de manière significative pour augmenter l'enveloppe de leur Fonds de secours financier, doté aujourd'hui de 440 milliards d'euros de capacités de prêts, et ce alors que les marges de manoeuvre budgétaires sont partout limitées. Une tâche difficile aussi sur le plan politique, car les opinions publiques en Allemagne, aux Pays-Bas ou en Finlande, rechignent de plus en plus à mettre la main au portefeuille pour payer les fins de mois difficiles des voisins. En privé, des responsables européens reconnaissent qu'un sauvetage concomitant de l'Espagne et de l'Italie, en plus des autres patients, serait sans doute au-dessus des forces de la zone euro.

2 - la zone euro s'effrite

- Dans un tel scénario noir, l'Union monétaire risquerait l'éclatement avec le départ progressif de ses pays les plus fragiles. Un économiste allemand de renom, le président de l'institut Ifo, Hans-Werner Sinn, vient d'appeler ouvertement à purger la situation en faisant sortir temporairement la Grèce de la zone euro, afin qu'elle n'emporte pas ses partenaires avec elle.

- Mercredi, le prestigieux quotidien allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung a plaidé aussi pour une expulsion. La Grèce serait autorisée à garder de facto l'euro comme monnaie de circulation, comme le Kosovo, mais serait privée des fonds de la BCE. «L'impensable est devenu envisageable: la sortie d'un pays de la zone euro, la fin de l'euro et même une désintégration de l'Union européenne ne sont plus des tabous», lui fait écho le groupe de réflexion bruxellois European Policy Center.

3 - La zone euro éteint l'incendie

- C'est le scénario optimiste. Après un an et demi d'atermoiements, les dirigeants européens prennent la mesure du danger et accouchent d'une solution convaincante pour les marchés. Dans l'immédiat, ils règlent le cas de la Grèce, en mettant rapidement sur pied un deuxième plan d'aide permettant de mettre le pays le plus fragile de l'Union monétaire à l'abri pour plusieurs années. Ils rachètent une partie de sa dette pour en réduire le montant et lui octroient de nouveaux prêts dotés de taux d'intérêt très inférieurs à ceux en cours.

- Le système de défense anticrise de l'Union monétaire est nettement renforcé pour éviter la contagion à l'Espagne et l'Italie. Partout, des plans sont adoptés pour réduire nettement les déficits publics. En parallèle, les efforts pour accélérer l'intégration économique de la zone euro s'accélèrent. Même l'idée, jusqu'ici taboue à Berlin, de créer des euro-obligations permettant aux pays d'emprunter ensemble sur les marchés pour partager les risques, est mise sur la table. «On peut regretter cela, mais l'Europe se construit à coups de crise», dit à l'AFP le ministre belge des Finances Didier Reynders.