Incertitudes sur le plan d'aide au Portugal après la percée des nationalistes finlandais, interrogations persistantes sur la dette grecque, besoins de soutien accru des banques irlandaises: la zone euro replonge dans une période délicate.

Les nationalistes de droite Vrais Finlandais, eurosceptiques, ont réalisé dimanche une percée historique aux élections législatives en Finlande, devenant la troisième force politique du pays.

Leur réussite pose un problème à la zone euro car elle pourrait compromettre le plan d'aide financière actuellement négocié en faveur du Portugal, crucial pour stabiliser l'Union monétaire et éviter une contagion.

La politique européenne de la Finlande doit en effet passer par le Parlement, où les Vrais Finlandais, qui s'opposent à l'aide financière aux pays de la zone euro frappés par la crise, détiendront 39 sièges sur 200.

Or, si tous les pays européens se sont engagés sur le principe à aider le Portugal, rien n'est encore bouclé. Les représentants de l'UE et du FMI en sont actuellement au stade des négociations avec les autorités portugaises pour définir le montant et les conditions d'un plan de sauvetage qui doit être conclu d'ici la mi-mai. Il pourrait avoisiner les 80 milliards d'euros (110 milliards de dollars).

La Commission européenne s'est voulue rassurante lundi.

Les résultats de l'élection n'ont «rien changé», a déclaré sa porte-parole, Pia Ahrenkilde Hansen. «Nous sommes pleinement confiants que la Finlande va continuer à honorer ses engagements», a-t-elle ajouté.

Outre l'aide au Portugal, la Finlande s'est aussi engagée, comme les autres pays de la zone euro, à doubler la capacité effective de prêt du Fonds de soutien aux pays de l'Union monétaire, actuellement doté de 440 milliards d'euros (608 milliards de dollars) de garanties des États.

Or, les pays de la zone euro ne se sont pas encore mis d'accord sur les moyens d'y parvenir. L'option la plus probable est celle d'une augmentation des garanties de prêts des États et les nationalistes finlandais y sont hostiles.

Les derniers engagements pris par la Finlande ne sont «pas encore en danger», estiment cependant les analystes de Barclays Capital.

Mais les résultats des élections sont un «clair coup de semonce» et «il sera de plus en plus dur de continuer à se mettre d'accord sur des mesures de soutien additionnelles» aux pays de la zone euro en difficulté, ajoutent-ils.

Cette contestation croissante face aux plans de sauvetage fragilise un peu plus l'Union monétaire, alors que les craintes sont déjà vives concernant son état général. Ces inquiétudes ont entraîné lundi l'euro sous le seuil de 1,43 dollar.

Les pays qui ont déjà bénéficié d'un plan d'aide, Grèce et Irlande, sont de leur côté loin d'être tirés d'affaire.

En Grèce, les spéculations sur une restructuration de la dette ne cessent de s'intensifier.

La semaine dernière, le ministre des Finances allemand Wolfgang Schaüble les a attisées en affirmant dans l'hebdomadaire Die Welt que si une analyse de la viabilité de la dette grecque en juin montrait que la Grèce n'était pas sur une trajectoire soutenable, alors «il faudrait décider quelque chose», évoquant «de nouvelles mesures».

En Irlande, c'est la situation des banques qui reste préoccupante.

L'agence de notation financière Moody's a revu lundi à la baisse les notes d'endettement des principales banques irlandaises, les reléguant dans la catégorie des investissements spéculatifs.

En cause: le gonflement du coût du sauvetage des banques irlandaises et des perspectives économiques moroses.

Les autorités irlandaises ont estimé fin mars que les banques du pays nécessitaient 24 milliards d'euros (33 milliards de dollars) supplémentaires pour être renflouées, à l'issue de tests de résistance sur leur système bancaire.

Les obligations grecques au-dessus des 14%

Les taux des obligations grecques à 10 ans ont dépassé lundi les 14% pour la première fois depuis la création de la zone euro, face aux spéculations persistantes sur une restructuration de la dette du pays.

À 16h (10h, heure de Montréal), les taux grecs à 10 ans grimpaient à 14,344% contre 13,712% vendredi à la clôture. Preuve de la pression exercée par les marchés, la tension était encore plus flagrante sur les obligations à échéance courte. Les taux à deux ans s'envolaient au-dessus des 20% à 20,021% contre 18,166% vendredi.

«Il y a de vraies craintes dans les salles de marché sur le fait que la Grèce soit contrainte de demander une restructuration. Une telle situation serait catastrophique», a souligné Patrick Jacq, stratégiste obligataire chez Natixis.

«Un consensus semble se dessiner concernant un allongement de la durée de remboursement, auquel pourrait s'ajouter une réduction des intérêts», ont expliqué Benoit Rodriguez et François Duhen du CM-CIC Securities.

Les mauvaises nouvelles sur la santé économique de la Grèce ne cessent de s'accumuler.

Les réformes structurelles «restent en retard par rapport à l'évolution de la dette», mais une restructuration n'est «ni nécessaire, ni souhaitable», a déclaré le gouverneur de la Banque de Grèce (BdG), Georges Provopoulos.

Il a reconnu que les banques helléniques avaient perdu «une partie importante de leurs dépôts» en raison de la crise que traverse depuis un an le pays.