Malgré la crise nucléaire, le Japon garde la confiance des trois grandes agences de notation mondiales, alors que le violent séisme suivi d'un tsunami la semaine dernière devrait fortement pénaliser l'économie nippone.

Tour à tour, Fitch Ratings, Moody's Investors et Standard & Poor's ont confirmé la note qu'elles attribuent chacune à la dette à long terme de l'archipel.

Tokyo dispose d'une note quasi similaire («AA») chez les trois agences, ce qui classe le pays dans la catégorie des emprunteurs les plus fiables. L'archipel avait perdu en 1998 la prestigieuse note «AAA», dont jouissent la plupart des autres grands pays industrialisés.

«Le Japon est un pays riche, qui a prouvé par le passé qu'il pouvait se relever d'une catastrophe naturelle», commente à l'AFP Tom Byrne, responsable de la notation du Japon chez Moody's. «C'est une grande économie dont le PIB égale celui de l'Allemagne et de l'Italie réunis», ajoute-t-il.

«Le pays peut emprunter à des taux faibles sur les marchés et dispose d'une épargne colossale lui permettant de financer sa dette, c'est ce qu'il ne faut pas perdre de vue», renchérit Andrew Colquhoun, son homologue chez Fitch.

Selon le «triumvirat», il est «trop tôt» pour estimer l'impact des catastrophes sur la troisième économie mondiale, dont les perspectives de croissance sont en berne.

Fitch «ne voit pas pour l'heure un impact économique suffisamment fort du récent tremblement de terre suivi d'un tsunami pour réviser à la baisse» la note du pays.

«Il faudra des semaines, voire des mois pour voir si on touche à la note», souligne M. Colquhoun, ajoutant que son agence allait toutefois réviser en baisse ses prévisions de croissance pour le pays.

Pour Standard & Poor's, la facture totale de la reconstruction du pays est encore «floue». Mais elle devrait être plus élevée qu'en 1995, après le séisme de Kobe, qui avait coûté 159 milliards de dollars au Japon entre 1995 et 2000.

«Ces dommages avaient été contrebalancés par les investissements engagés pour la reconstruction. Le PIB avait alors accéléré à un rythme plus rapide qu'avant le séisme», fait remarquer cependant Tom Byrne.

Ce scénario devrait se répéter avec des investissements publics liés à la reconstruction qui devraient compenser l'arrêt de la production et l'effondrement de la demande, selon Moody's.

Reste le lourd endettement du pays, dont le niveau devrait encore augmenter. Le Japon a une dette équivalente aujourd'hui à quelque 200% de son PIB, la proportion la plus élevée parmi les pays développés, en raison de ses plans de relance à répétition.

Mais, selon les analystes, la situation du Japon n'est pas comparable à celle des pays européens en difficulté financière, comme la Grèce, l'Irlande ou le Portugal.

D'abord parce que l'économie japonaise, la troisième mondiale, est d'une taille autrement plus importante; ensuite parce qu'environ 95% des bons du Trésor sont détenus par des investisseurs japonais, ce qui réduit les risques de faillite de l'Etat.

«Le Japon n'ira pas demander une aide externe pour financer son déficit public, contrairement à ce qui s'est passé en Irlande et en Grèce qui ont fait appel à l'Europe», souligne Tom Byrne.

Prudentes sur la note du pays, les trois grandes agences prennent moins de gants avec les entreprises japonaises, contraintes d'arrêter temporairement leur production.

Fitch, Moody's et S&P ont averti que les notes des sociétés des secteurs de l'assurance dommages risques, automobile, technologique et énergétique allaient être affectées à court terme. Panasonic, Fujifilm, Nikon, Canon et Toyota pourraient être concernées.