La conseillère financière Carole Morinville a plaidé non coupable à des accusations de fraude, de fabrication de faux documents et d'entrave à la justice hier matin. Passible de 14 ans de prison, elle reste en liberté en attendant son procès.

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Représentée par son avocate, Carole Morinville, 50 ans, brillait par son absence hier au palais de justice de Montréal. Son absence a soulevé la colère de certaines de ses victimes. Marie-Noëlle Déry, qui s'était déplacée au palais de justice, s'explique mal que son ancienne conseillère financière soit toujours en liberté. «Elle essaie de gagner du temps et elle vit avec notre argent. Elle est comme une couleuvre: elle réussit toujours à s'en sauver. Elle a profité de moi pendant que mon mari était mourant. Je ne comprends pas comment elle peut être en liberté. Je ne crois plus en la justice», dit Mme Déry, qui aurait été fraudée pour 115 000$.

Accusée d'avoir orchestré une fraude à la Ponzi de 3,5 millions de dollars auprès d'une quarantaine d'investisseurs, dont l'actrice Karine Vanasse, Carole Morinville ne s'est pas présentée au palais de justice de Montréal hier matin pour comparaître et enregistrer son plaidoyer de non-culpabilité.

Comme le permet la loi, c'est plutôt son avocate, Me Éliane Hogue, qui a fait part à la cour de son intention de plaider non coupable. «Mme Morinville se porte bien dans les circonstances. C'est une cause extrêmement médiatisée, mais la présomption d'innocence est toujours en vigueur», a dit Me Éliane Hogue, qui n'a pas voulu commenter le dossier sur le fond. Sa cliente fait face à sept chefs d'accusation pour des gestes commis entre octobre 2005 et août 2010.

En raison de la grève des procureurs de la Couronne, la cause a été remise au 30 mars prochain. Carole Morinville, qui a été arrêtée puis libérée le 17 novembre dernier avec promesse de comparaître hier matin, devra avoir une enquête préliminaire avant un procès.

Ordonnance de non-publication

Une caution de 10 000$ a été déposée à la cour en faveur de Carole Morinville, qui reste en liberté sous certaines conditions durant son procès. L'identité de ce donateur est protégée par une ordonnance de non-publication qui a été demandée par l'accusée. Mme Morinville, dont les comptes en banque sont bloqués depuis août dernier, devra respecter deux nouvelles conditions: ne pas communiquer avec ses présumées victimes et ne pas effectuer de transaction bancaire pour autrui.

L'ordonnance de non-publication, rendue hier matin par la Cour supérieure, vise aussi la nouvelle adresse de Carole Morinville à Rivière-des-Prairies, dans l'est de Montréal. Carole Morinville a déménagé l'automne dernier après que son mari, Robert Diano, eut vendu sa résidence de l'île-des-Soeurs. «Mme Morinville est victime de harcèlement de certaines personnes, probablement de certaines victimes, dit son avocate Éliane Hogue. Ce n'est pas jojo, ce n'est pas agréable.»

L'actrice Karine Vanasse, primée pour ses rôles dans Emporte-moi, Séraphin: Un homme et son péché et Polytechnique, a été arnaquée de 125 000$ sur la vente de son condo. Elle poursuit Carole Morinville au civil pour récupérer son argent. «Je partais pour (tourner un film à) Cuba, mon appartement était en vente. J'étais pressée, préoccupée, désorganisée. Elle l'a senti et en a profité. Au début, je me sentais bête d'avoir accordé ma confiance à une telle femme, mais quand j'ai découvert que je n'étais pas la seule et que ses autres victimes étaient plus âgées et expérimentées que moi, j'ai compris que, face à des manipulateurs nés qui ont des doubles vies et qui cultivent le secret, ce n'est pas toujours évident de voir dans leur jeu», a-t-elle confié la semaine dernière à La Presse.

Faillite

Carole Morinville, qui travaillerait actuellement dans un atelier de carrosserie Fix Auto de la région d'Ottawa, a été mise en faillite par ses victimes en août dernier. Elle se dit sans le sou. Pour l'instant, ses présumées victimes peuvent s'attendre à récupérer environ 175 000$. Le syndic de faillite nommé par la Cour supérieure, Noubar Boyadjian, a placé en fidéicommis le profit de 152 000$ réalisé sur la vente du condo de l'île-des-Soeurs jadis détenu par Carole Morinville et appartenant à son mari Robert Diano au moment de la transaction. Les créanciers pourraient aussi récupérer entre 22 000$ et 24 000$ sur la vente de deux condos appartenant à Carole Morinville et à ses deux fils.

Autre accusée

L'adjointe de Carole Morinville, Annie Berger, 31 ans, a été accusée hier matin de fabrication de faux documents et d'entrave à la justice. Ces accusations pourraient lui valoir jusqu'à 10 ans de prison. Contrairement à Carole Morinville, Annie Berger n'est pas accusée de fraude. Mme Berger ne s'est pas présentée au palais de justice hier et a nié sa culpabilité par l'entremise de son avocate, Me Marie-Josée Duhaime.

La Sûreté du Québec continue son enquête dans le dossier Morinville et n'exclut pas de porter d'autres accusations.