Le criminel en cravate le plus célèbre du Québec, Vincent Lacroix, a recouvré la liberté ce matin.

Arrivé en taxi, transportant ses effets personnels dans un sac de vidanges et un sac de sport, l'ex-PDG de Norbourg a fait son entrée ce matin vers 11h30 à sa nouvelle résidence: le Centre résidentiel communautaire Jeun'Aide, dans le quartier Saint-Henri à Montréal. Vincent Lacroix doit séjourner dans cette maison de transition au cours des trois prochaines années. Vêtu très sobrement d'une paire de jeans, d'un chandail et d'un manteau bleu, il avait quitté la prison de Ste-Anne-des-Plaines une heure auparavant.

Vincent Lacroix, condamné pour avoir orchestré une fraude de 113,5 millions de dollars auprès de 9200 investisseurs, avait demandé de vivre sa libération conditionnelle dans la ville de Pickering en Ontario, mais sa requête a été refusée. Il est plutôt retourné dans la même maison de transition où il avait séjourné à sa première sortie de prison, en 2009. Il a été muet devant les questions des nombreux journalistes qui l'attendaient devant la porte de sa maison de transition.

Incarcéré depuis octobre 2009 à la prison de Ste-Anne-des-Plaines, Vincent Lacroix a obtenu une libération conditionnelle au sixième de sa peine de 18 ans moins un jour de prison. La Commission des libérations conditionnelles lui impose six mois de travaux communautaires. Vincent Lacroix servira notamment des repas dans des soupes populaires. «On a différents partenaires, comme des oeuvres de charité, des soupes populaires et des comptoirs d'aide à la communauté. Ce sont des endroits d'une grande valeur, parce qu'ils nous aident dans notre effort de réinsertion de ces individus dans la société», dit Jean-Yves Roy, porte-parole de Service correctionnel Canada, l'organisme gouvernemental qui supervisera la liberté de Vincent Lacroix.

Sauf pour des raisons exceptionnelles, Vincent Lacroix, 44 ans, ne pourra pas sortir du pays durant sa libération conditionnelle. Il pourra quitter sa maison de transition pour profiter d'une libération conditionnelle complète à compter du 7 février 2014.

En maison de transition, Vincent Lacroix devra respecter un couvre-feu et ne pourra pas consommer d'alcool dans son nouveau domicile. Il fera six mois de travaux communautaires. La Commission des libérations conditionnelles a rejeté pour l'instant sa demande de retourner aux études. «Vous devez approfondir votre conscience sociale et vous éloigner des valeurs matérialistes», ont écrit les commissaires Pierre Cadieux et Michel Pallascio dans leur décision rendue publique vendredi dernier.

Comme conditions de libération, la Commission interdit à Vincent Lacroix d'occuper un emploi rémunéré, de travailler dans le domaine de la finance et de communiquer avec ses anciens complices. Cinq anciens employés de Norbourg subissent actuellement leur procès criminel, qui doit prendre fin le mois prochain après plus de quatre mois. Il s'agit du deuxième procès des co-accusés de Vincent Lacroix, le premier procès ayant avorté en janvier 2010.

Une sortie «prématurée»

Vincent Lacroix a écopé d'une peine criminelle de 13 ans et d'une peine pénale de cinq ans moins un jour en vertu d'infractions à la Loi sur les valeurs mobilières. Il est entré une première fois en prison le 28 janvier 2008 et a été libéré en maison de transition au sixième de sa sentence pénale le 21 juillet 2009. Le 9 octobre 2009, il a repris le chemin de la prison quand il a été condamné au criminel à 13 ans de prison. Sa peine se termine officiellement le 26 janvier 2026.

Les victimes de la fraude Norbourg ont conclu la semaine dernière un règlement à l'amiable de 55 millions de dollars avec l'Autorité des marchés financiers (AMF), le gardien de valeurs Northern Trust et la firme de comptables KPMG. Avec cette entente, ils récupèrent l'ensemble de leur argent investi dans Norbourg.

Wilhelm Pellemans, l'une des victimes de la fraude Norbourg qui avait intenté un recours collectif contre l'AMF, trouve la libération de Vincent Lacroix «prématurée». «On peut se consoler en pensant que Vincent Lacroix n'est plus qu'un petit monsieur, un peu minable, qui ne compte plus pour grand-chose», a dit M. Pellemans la semaine dernière.

Le ministre fédéral de la Sécurité publique, Vic Toews, n'a pas voulu commenter la libération de Vincent Lacroix. Il a déposé un projet de loi rendant plus difficile la libération automatique des fraudeurs financiers au sixième de leur peine. «La libération des fraudeurs sérieux au sixième de leur peine est un affront à l'intégrité du système criminel canadien», dit son attaché de presse Christopher McCluskey.