Lorsque les allégations de collusion ont éclaté dans le monde de la construction l'an dernier, plusieurs ont critiqué le fait que les villes et ministères confient énormément de travaux à des firmes externes plutôt que de les faire à l'interne.

Or, sans dire que le «faire faire» est la solution à tout, des firmes de génie-conseil croient que lorsque la pratique est faite dans les règles de l'art, elle est très bénéfique pour le Québec.

«Les retombées économiques sont beaucoup plus grandes lorsqu'une ville ou un ministère fait faire son travail à l'externe plutôt qu'à l'interne», affirme Kazimir Olechnowicz, président de Cima".

Bien sûr, pour faire des travaux à l'interne, l'organisme public doit pouvoir compter sur un bon bassin de main-d'oeuvre spécialisée.

«Si un ministère embauche des gens pour réaliser des travaux lors de besoins spécifiques, il faut avoir en tête que ces gens resteront en poste pour 30 ans, en plus des 30 ans de pension qu'ils recevront par la suite. Le problème, c'est que ces travailleurs peuvent être utiles pour quelques années seulement et que par la suite, on les gardera à ne rien faire. Personne n'est gagnant dans une situation comme ça», explique-t-il.

Il donne l'exemple des besoins actuels dans le domaine des infrastructures.

«On croit qu'il y aura du travail pour cinq ans encore. Les villes et ministères ont avantage à confier une bonne partie de ces contrats à des firmes externes, parce que les besoins sont énormes en ce moment, mais ils sont ponctuels. Contrairement aux villes et aux ministères, les firmes comme la nôtre peuvent réaliser ces travaux et par la suite, exporter leur savoir-faire à l'étranger», indique M. Olechnowicz.

De plus, comme les firmes continuent toujours de réaliser des mandats dans leurs champs d'expertise, ici comme ailleurs, elles ont la chance de demeurer à la fine pointe de la technologie et voient différentes façons de faire.

Les firmes comme Cima" tirent des profits importants du faire faire, mais la société québécoise peut aussi en bénéficier, affirme le président.

«Lorsque nous exportons notre savoir-faire, ce sont d'autres pays qui payent pour ces contrats alors que nous payons des impôts ici. C'est très bon pour l'économie locale.»

Dans le privé aussi

On parle de faire faire dans le domaine public, mais la pratique se fait également dans le privé.

«On utilise plutôt le terme sous-traitance, mais concrètement, c'est la même chose et les mêmes avantages», affirme Steeve Fiset, président et chef de la direction de BBA, une firme de génie-conseil qui travaille beaucoup pour des clients industriels, notamment dans le secteur des mines et de l'énergie.

Il remarque d'ailleurs une augmentation de recours à la sous-traitance dans les entreprises privées depuis les 15-20 dernières années.

«La capacité des compagnies de réaliser des projets à l'interne a grandement diminué. L'industrie a beaucoup moins d'ingénieurs et de techniciens à l'interne et je crois que c'est dû entre autres aux efforts de consolidation et au désir de réaliser des économies d'échelle», croit M. Fiset.

L'expertise interne indispensable

Toutefois, il y a des précautions à prendre lorsqu'une organisation décide de faire appel à une firme externe pour réaliser un contrat.

«Le client doit avoir l'expertise nécessaire à l'interne pour savoir quel genre de mandat donner à une firme externe et pour être en mesure de prendre des décisions éclairées» indique Kazimir Olechnowicz.

«C'est la clé du succès, ajoute M. Fiset. Il ne faut surtout pas croire que la sous-traitance est la solution à tout.»

Hydro-Québec est souvent citée en exemple en matière de faire faire. «Hydro-Québec a toujours fait confiance au faire faire tout en gardant une bonne expertise à l'interne. Cela a permis à plusieurs firmes québécoises de développer des expertises solides qui ont par la suite été exportées à travers le monde», affirme M. Olechnowicz.

Le Canada se situe au 4e rang des pays exportateurs de services d'ingénierie au monde et 50% de ses activités sont réalisées par les firmes québécoises de génie-conseil.