À l'aube de la saison 2010, deux «nouveautés» sur le circuit de la F1: le retour du Grand Prix du Canada avec le promoteur François Dumontier et le retour de Michael Schumacher. D'ailleurs, François Dumontier et Michael Schumacher ont trois choses en commun: la jeune quarantaine, la marque de voiture et la passion de la F1.

D'accord, des petites nuances s'imposent. Schumacher roule avec la fringante nouvelle F1 Mercedes et François Dumontier avec un 4X4 de Mercedes. À 41 ans, Schumacher fait figure de pépé à comparer aux jeunots de la F1, alors que François Dumontier, 42 ans, devient le jeune loup des organisateurs de Grands Prix.

Dans les traces de Bernie

François Dumontier, c'est la nouvelle recrue de Bernie Ecclestone, grand manitou de la F1. Il en a fait son bras canadien pour assurer le succès du retour du Grand Prix à Montréal. À la suite d'un différend avec Ecclestone, l'ancien promoteur Normand Legault a décidé de tirer sa révérence.

À titre de nouveau promoteur, François Dumontier se retrouve présentement au volant d'une folle course contre la montre, tellement l'échéancier pour remettre le Grand Prix sur la voie du Circuit Gilles-Villeneuve est serré. Il doit compresser et réaliser en l'espace de six mois tout le travail d'organisation qui s'échelonne habituellement sur une année.

Après avoir sauté l'édition 2009, le retour du Grand Prix a été officiellement confirmé à la fin de novembre dernier, par suite de l'entente intervenue entre la Formula One Management d'Ecclestone et nos gouvernements. Ces derniers ont accepté de lui verser une subvention annuelle de 15 millions de dollars, pour les cinq prochaines années.

«Moi, je n'ai absolument rien à voir avec cette entente, précise François Dumontier. Je ne touche pas une cenne de ces 15 millions annuels. Ma job, moi, consiste à organiser le Grand Prix, indépendamment de cette entente de nos gouvernements avec Bernie.»

À ses risques et périls

Et François Dumontier, par l'entremise de son entreprise Groupe de course Octane, va organiser le Grand Prix à ses risques et périls, car Ecclestone ne lui verse pas de ristourne sur cette subvention. Au contraire, François Dumontier, à titre de nouveau «promoteur et propriétaire» du Grand Prix du Canada, doit verser à l'organisation de la Formule 1 un droit annuel pour faire venir à Montréal la prestigieuse course.

Ainsi, François Dumontier a le défi de remettre sur la bonne voie un événement qui doit absolument s'autofinancer en dehors de l'importante subvention gouvernementale. On parle quand même d'un événement majeur, dont le budget s'élèverait à quelque 25 millions.

S'il y avait déficit cette année? «C'est moi qui devrai l'éponger! L'organisation du Grand Prix est de mon entière responsabilité financière.»

Toutefois, François Dumontier ne semble aucunement inquiet pour la santé de son portefeuille, même s'il admet que son équipe de vente de commandites doit travailler excessivement fort pour conclure des ententes avec les entreprises. Il faut dire que la crise financière de 2008 et la récession de 2009 ont rendu les commanditaires potentiels passablement frileux.

Mais quand on porte en soi le gène du promoteur comme François Dumontier, on n'a pas le choix de rester optimiste... Sinon, on ne fait pas ce métier!

Un métier rare

Comme métier rare, promoteur de Grand Prix F1... c'est dur à battre. Il n'y en a que 19 dans le monde, moins que le nombre de pilotes (26) devant être sur la grille de départ de la saison de Formule 1, le 14 mars prochain, à Bahreïn.

Comment François Dumontier, un petit Montréalais bien ordinaire, y est-il parvenu? À vrai dire, il était prédestiné à devenir le promoteur du Grand Prix du Canada, l'événement touristique annuel non seulement le plus couru au Canada, mais également le plus rentable en matière de retombées économiques.

Flash-back 1985. Le jeune François Dumontier, 17 ans, étudie au cégep du Vieux-Montréal, en technique de loisirs. Une dame à l'emploi de la Société de l'île Notre-Dame (renommée aujourd'hui Société du parc Jean-Drapeau) se pointe au cégep dans le but de recruter des étudiants bénévoles pour travailler à la Fête des neiges.

«Sur le lot d'étudiants en loisirs qui étaient au cégep, je suis le seul qui a rappelé cette dame-là pour donner mon nom.»

Et quelle activité a-t-il organisée? «Ma première activité? J'ai organisé une course de lit sur le Bassin olympique. Sur la glace. Le principe c'était: quatre personnes qui poussaient un malade sur... son lit. Une dizaine d'équipes avaient participé à ma course. Dont plusieurs membres de ma famille, qui, insiste-t-il, voulaient m'encourager.»

Son initiation à la Fête des neiges l'a fort bien servi par la suite.

«Tout le long de mes études en loisirs, j'ai travaillé ici, au parc Jean-Drapeau. À temps partiel. Puis, quand j'ai terminé le collège, la Société du parc Jean-Drapeau (organisme para municipal) m'a embauché. J'ai travaillé ici jusqu'en 1994.»

Comme par destin, c'est lui qui avait la responsabilité d'assurer le lien entre la Société du parc Jean-Drapeau et Normand Legault, ancien promoteur du Grand Prix du Canada.

«C'est là, en 1994, que Normand Legault m'a recruté. Il faut imaginer que le Grand Prix était déjà installé ici depuis 1978. Et comme c'était sur l'île Notre-Dame, nous, la Société du Parc, on offrait certains services à l'organisation du Grand Prix.»

«J'ai donc fait le saut de l'île Notre-Dame au Grand Prix, à titre de directeur de l'exploitation. Après, Normand m'a nommé vice-président à l'exploitation. Et je suis même devenu directeur général du Grand Prix, en 2000 et 2001.»

Un entrepreneur

En 2002, François Dumontier quitte le Grand Prix et décide de voler de ses propres ailes.

La raison? «Parce que j'avais le goût de créer ma propre entreprise. C'est là qu'est né le Groupe de course Octane. Et j'ai loué mes services de consultants pour organiser le Grand Prix de Trois-Rivières en 2002, avec Léon Méthot, président du Grand Prix à ce moment-là.»

Pourquoi Octane? «Au-delà de la connotation pétrole et char, j'ai choisi Octane parce que c'est un terme qui s'écrit pareil en anglais et en français. Dans le milieu des courses, comme c'est quand même pas mal anglophone, ça convenait bien.»

Après le Grand-Prix de Trois-Rivières, François Dumontier se porte acquéreur d'une Cage aux sports.

«Celle-là je ne l'avais pas prévue. Ça ne faisait pas partie de mon plan de carrière, du tout. J'étais un franchisé. Je l'ai eue de 2003 à 2006. C'est la Cage qui est à Saint-Jérôme, dans les Laurentides.»

«Ça, c'est parti par un beau matin, au cours d'un déjeuner avec Jean Bédard, du Groupe Sportscene (propriétaires du réseau des Cages aux sports), que je connaissais... Parle parle, jase jase, puis oups! C'est le bon temps, il m'a convaincu... J'ai finalement vendu ma Cage au printemps 2006, pour me consacrer uniquement aux sports.»

C'est dur d'exploiter une Cage aux sports? «Ouf! Je pense que la restauration, c'est un milieu qui est difficile. Et comme je n'avais jamais travaillé dans un restaurant, j'avais pas d'expérience. C'est tough. Disons qu'on n'est pas sortis de là glorieusement. On n'en est pas sortis ben riches. Mais, comme dans n'importe quelle expérience, on a quand même tiré quelque chose de positif...»

De retour au Parc

Entre-temps, François Dumontier revient en 2005 sur son terrain de prédilection, le Parc Jean-Drapeau. À la suite d'un appel de Normand Legault, à titre cette fois coprésident du Championnat du monde de natation, il accepte de diriger les opérations de l'événement.

Par la suite, Normand Legault le convainc de revenir au Grand Prix. Et il en devient son bras droit. S'enclenchent par après une manche de ChampCar à Tremblant et les courses Nascar sur le Circuit Gilles-Villeneuve.

Normand Legault pilote maintenant le Festival Juste Pour Rire, laissant ainsi la voie libre à son dauphin, François Dumontier. Le seul promoteur au monde à organiser à la fois un Grand Prix et une course Nascar.