Des fournisseurs, pris dans la tempête qui secoue l'industrie aéronautique, réussissent à limiter les dégâts. Leur secret: la diversification.

«Avec les années, nous avons appris à nous diversifier», raconte Jean-Pierre Lepage, président d'Air Data, une petite entreprise de Montréal qui fabrique divers instruments avioniques ainsi que des systèmes de ventilation et de bioprotection pour les appareils.

 

Bell Helicopter Textron Canada est un client important, mais Air Data a également des contrats en France et en Israël.

«Nous avons ralenti un peu la production à cause des calendriers de livraison, nous avons un peu réduit le personnel en début d'année, mais nous prévoyons maintenant être stable, affirme M. Lepage. Ça avait été plus pénible au début des années 2000: nous avions un ou deux gros clients. Lorsqu'ils ont eu de la misère, ça nous a donné un grand coup.»

Air Data compte une trentaine d'employés. CMC Électronique, une entreprise de 1200 employés, a recours à sensiblement la même recette.

«Depuis plusieurs années, CMC a adopté une stratégie de diversification de ses clients, indique la directrice des relations publiques de l'entreprise, Janka Dvornik. Nous sommes diversifiés entre les grands fabricants et les entreprises qui modernisent des appareils, et nos activités sont à 50% dans le domaine civil et à 50% dans le domaine militaire. Ça nous permet de nous ajuster lorsque le marché cyclique est en baisse dans un domaine.»

CMC, qui fabrique divers équipements avioniques pour les cabines de pilotage et des antennes satellites pour les appareils, a dû procéder récemment à une réduction de sa main-d'oeuvre. Celle-ci a toutefois touché moins de 5% des effectifs.

Alta Précision, une PME d'Anjou qui fabrique des pièces spécialisées pour les trains d'atterrissage, a également réussi à sauver les meubles parce que le domaine de la défense représente 50% de ses revenus.

«Nous souffrons, mais pas autant que si nous étions des fournisseurs exclusifs de Bombardier, de Pratt & Whitney et de Bell, précise le président de l'entreprise, Guillermo Alonso. Nous sommes dans le noir, pas dans le rouge.»

Un de ses clients, le fabricant de trains d'atterrissage et de structures aéronautiques Héroux-Devtek, est aussi actif dans plusieurs créneaux.

«Nous faisons des travaux sur les avions d'affaires, les avions régionaux, les avions de plus de 100 places, les hélicoptères commerciaux, les hélicoptères militaires, les avions de chasse», énumère le président et chef de la direction, Gilles Labbé.

L'entreprise n'a pas procédé à des mises à pied importantes, mais elle a instauré des programmes de travail à temps partagé pour conserver ses employés pendant la période difficile. Elle travaille à remporter de nouveaux mandats pour que ses employés reviennent à temps plein.

Turbomeca Canada, une petite entreprise de Mirabel spécialisée dans la maintenance de turbines d'hélicoptère, s'était préparée au pire. Au début de l'année, elle avait prévu une diminution de 20% de ses activités. C'est effectivement ce qui s'est passé sur le marché canadien.

«Il y a une réduction du nombre de vols, observe la directrice générale de Turbomeca Canada, Hélène Séguinotte. La saison canadienne n'a pas vraiment démarré, si on fait exception des vols liés aux incendies de forêt.»

Or, les affaires liées à l'international vont très bien, même mieux que l'année dernière. La maison mère de Turbomeca Canada a pour politique d'envoyer le matériel à réparer là où il y a de la capacité.

«Nous sommes tirés par le reste du monde, affirme Mme Séguinotte. Habituellement, le tiers de nos affaires provenait du Canada et les deux tiers du reste du monde. Actuellement, pratiquement 85% de nos affaires proviennent du reste du monde.»

Turbomeca Canada n'a donc pas eu à effectuer de mises à pied parmi ses 127 employés.

À ExelTech, une entreprise de maintenance d'avions à Montréal et à Québec, ça va plutôt bien ces temps-ci. «Nous n'avons pas encore l'impact de la récession, déclare le président et chef de la direction, Sylvain Duval. Les compagnies aériennes n'achètent pas de nouveaux avions, mais elles doivent entretenir ceux qu'elles ont. L'entretien est très réglementé, les gens n'ont pas le choix.»

Il ajoute qu'ExelTech bénéficie d'un autre facteur: lorsqu'un transporteur aérien réduit sa flotte et renvoie des appareils au locateur, comme GECAS, celui-ci les envoie dans des entreprises de maintenance pour les retaper et les louer à d'autres clients.

«Ça a changé notre clientèle, indique M. Duval. Les lignes aériennes représentaient 95% de nos clients. Maintenant, nous avons moins de lignes aériennes, mais plus de locateurs.»

Évidemment, cette vague ne durera qu'un certain temps.

«Nous espérons que la reprise dans l'industrie arrivera au moment où ce transfert de propriété d'avions arrivera à échéance», lance M. Duval.