C'est imminent. Dans quelques mois, le gouvernement du Québec devrait donner son accord final aux CGA et aux CMA pour qu'ils effectuent des mandats de certification, soit des missions d'examen et de vérification de sociétés publiques et privées. Un droit auparavant réservé aux CA.

«C'est un droit plus que demandé par nos membres. En fait, c'est un droit très attendu», indique Danielle Hébert, FCGA, présidente du conseil d'administration de l'Ordre des CGA du Québec.

À l'Ordre des CMA du Québec, on se réjouit également de la nouvelle. «C'est certain que les missions de certification, ce n'est pas le créneau le plus naturel du CMA (qui s'intéresse davantage au management), dit son PDG François Renauld, FCMA. Mais nous sommes tout de même très heureux de voir que ceux qui s'intéressent à la certification pourront désormais en faire sans restriction. Il faut cesser de mettre les missions de vérification et d'examen sur un piédestal et les rendre accessibles à tous ceux qui ont les connaissances nécessaires pour en faire.»

La formation

Parce que bien sûr, qui dit nouveau champ de pratique dit aussi nouvelles connaissances à acquérir.

En effet, avant de se voir accorder un permis de comptabilité publique par leur ordre professionnel, les CGA et les CMA auront à faire leurs devoirs.

«Nos membres devront démontrer que leurs connaissances sont à jour dans le domaine de la certification, indique Mme Hébert. Ils devront avoir suivi les sessions de formation continue en mission d'examen et une en vérification. Nous étudierons ensuite le dossier de chaque candidat pour nous assurer que chacun a l'expérience adéquate pour effectuer des missions de certification.»

À l'Ordre des CMA, les membres intéressés devront avoir réussi le Programme de post certification en comptabilité publique. «C'est un programme de quatre ou cinq cours universitaires de deuxième cycle dans le domaine de la certification», précise M. Renauld.

Les CMA qui souhaiteront aller chercher leur permis de comptabilité publique devront aussi avoir complété un stage de 24 mois dans le domaine et réussir l'examen de comptabilité publique de l'Ordre des CMA.

La protection du public

Si la loi est en vigueur depuis décembre dernier, actuellement, les ordres professionnels des CGA et des CMA travaillent d'arrache-pied avec l'Office des professions du Québec pour s'entendre sur les derniers détails des règlements qui encadreront la pratique de la comptabilité publique par les CGA et les CMA. Ils souhaitent ainsi protéger l'intérêt du public.

«C'est la mission première de l'ordre professionnel», indique Mme Hébert.

Et que pense l'Ordre professionnel des CA de la fin de son monopole en matière de comptabilité publique?

«L'Ordre ne s'est jamais opposé à l'accès des CGA et des CMA aux missions de certification», affirme Daniel McMahon, FCA, président et chef de la direction de l'Ordre des comptables agréés du Québec.

Il affirme toutefois qu'il est nécessaire que quiconque acquiert le droit de faire de la comptabilité publique réponde à des exigences bien précises.

«Les deux autres ordres professionnels doivent produire des règles analogues aux nôtres, comme l'exige d'ailleurs la loi, dit-il. Si cette idée de règles analogues est bien respectée par l'Office des professions du Québec qui doit évaluer les propositions des deux ordres, nous n'avons aucune crainte. L'idée, c'est vraiment de protéger le public en lui assurant qu'il aura la même qualité de service qu'il consulte un CA, un CGA ou un CMA en matière de certification.»

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la comptabilité publique...

C'est en 1946, sous Duplessis, que les comptables agréés se sont vu accorder le quasi-monopole quant à la comptabilité publique au Québec.

Les CA étaient en fait les seuls à pouvoir effectuer des missions de certification des sociétés publiques et privées. Les CGA et les CMA pouvaient toutefois faire des missions de certification pour des organismes publics comme les municipalités, les commissions scolaires et les coopératives.

Une situation étonnante, d'après Danielle Hébert, FCGA, présidente du conseil d'administration de l'Ordre des CGA du Québec.

«Les CGA et les CMA pouvaient faire, par exemple, des missions de certification pour une ville qui a un budget de plusieurs millions de dollars, mais ils ne pouvaient pas en faire pour le dépanneur de coin!», s'exclame-t-elle.

Pour que le gouvernement du Québec décide de faire tomber le monopole, il aura fallu une plainte déposée par l'Ordre des CGA du Nouveau-Brunswick, en vertu de l'Accord sur le commerce intérieur (ACI), signé par le gouvernement du Québec en 1994, indique François Renauld, FCMA, président-directeur général de l'Ordre des CMA du Québec.

«Cet accord visait à faciliter la mobilité de la main-d'oeuvre canadienne en assurant la reconnaissance des compétences d'une province à l'autre, dit-il. Or, les CMA et les CGA pouvaient faire des missions de certification partout au Canada, excepté au Québec et en Ontario. Le gouvernement a dû bouger pour être cohérent par rapport à ses engagements. »

Le projet de loi 46 a donc été adopté, en décembre 2007, et est en vigueur depuis le 15 décembre 2008. Toutefois, avant de pouvoir commencer à accepter des missions de certification, les deux ordres, CGA et CMA, doivent finaliser leur entente sur les règlements qui encadreront la pratique avec l'Office des professions et obtenir l'approbation finale du gouvernement du Québec. Une question de mois, croit-on à l'Ordre des CGA comme à celui des CMA.